"La Vie invisible d'Eurídice Gusmão" : la grande fresque féministe de Karim Aïnouz

"Le Brésil est le pays qui tue le plus de femmes au monde." Au dernier Festival de Cannes, Karim Aïnouz faisait ce constat terrible en préambule de la projection de son nouveau long métrage au titre énigmatique, La Vie invisible d'Eurídice Gusmão, récompensé quelques jours plus tard par le prix Un certain regard. "J'étais venu à Cannes en 2002 pour mon ­premier film, Madame Satã, ­rappelle le ­réalisateur. Sa ­présentation en sélection officielle s'était ­déroulée dans des circonstances ­identiques : un lundi à 19 heures! Un bon ­présage." Il s'exprime dans un français parfait, hérité de son père algérien. "Par contre, je ne parle pas un mot d'arabe : ma langue natale est le portugais! Mon père a fui le FLN au début des années 1960 pour s'installer aux États-Unis, où il a rencontré ma mère brésilienne. Ils se sont séparés quand j'étais tout petit."

Karim Aïnouz adapte le roman de Martha Batalha Les Mille ­Talents d'Eurídice Gusmão et ­retrace le ­destin contrarié de deux sœurs, Eurídice et Guida, dans la banlieue de Rio de Janeiro au début des années 1950. Guida tombe amoureuse d'un Européen qui lui demande de le suivre sur le Vieux Continent. La jeune fille accepte et quitte brusquement la maison familiale. Quelques années plus tard, Eurídice, mariée, habite désormais en ville. Guida débarque à l'improviste chez ses parents, enceinte. Son père la renie et la met à la porte. Pis, il ne dit pas à Eurídice, morte d'inquiétude de ne pas avoir de nouvelles de sa sœur, que cette...


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