"On veut tout savoir": les potentiels colistiers de Kamala Harris soumis à un "éprouvant" processus de sélection
"Intense". Cité par USA Today, le mot est de Tim Kaine, colistier d'Hillary Clinton en 2016. L'emploie-t-il pour évoquer la campagne présidentielle? Non. Tim Kaine fait référence à l'étape précédente: l'examen minutieux auquel sont soumis les candidats potentiels à la vice-présidence. Et les possibles colistiers de Kamala Harris, comme les gouverneurs de Pennsylvanie et du Minnesota Josh Shapiro et Tim Walz, n'y ont pas non plus échappé alors que la candidate doit révéler ce mardi le nom de celui qui l'accompagnera sur le ticket démocrate.
Par rapport aux précédentes élections présidentielles, le processus est cette fois mené à marche forcée. D'habitude, les éventuels candidats à la vice-présidence peuvent être sous le feu des projecteurs pendant de longs mois. Kamala Harris et son équipe ont disposé de beaucoup moins de temps en raison du retrait de Joe Biden de la course à la Maison Blanche il y a seulement deux semaines. "Ils n'ont disposé que de quelques jours et ça peut être éprouvant", remarque David Axelrod, ancien conseiller de Barack Obama interrogé par Politico.
Dossiers médicaux et comptes bancaires épluchés
Qu'il prenne des jours ou des mois, ce passage au banc d'essai n'a rien d'un simple entretien de motivation et de personnalité. L'une des étapes incontournables est de soumettre les candidats à un "questionnaire extrêmement complet et très indiscret", explique à la radio NPR James Hamilton, un ancien avocat ayant épaulé Al Gore, John Kerry, Barack Obama et Hillary Clinton pour choisir leur colistier.
"La dernière fois que j'ai regardé, il comportait entre 100 et 120 questions", précise Hamilton. Et tous les aspects de la vie des politiques sont passés en revue.
"On veut tout savoir de votre santé physique et mentale. On cherche à tout connaître de votre vie professionnelle, à découvrir si vous avez déjà eu par exemple une relation extraconjugale."
Ce passage au peigne fin concerne aussi tout ce qui a pu être écrit ou publié par les candidats sur les réseaux sociaux. Et ce n'est pas fini. "Une équipe est chargée de fouiller dans votre vie, de vos comptes bancaires à vos dossiers médicaux", poursuit James Hamilton. "On mène également des entretiens avec des amis et des membres de la famille des candidats potentiels". Quant aux principaux intéressés, ils passent aussi plus d'une fois sur le grill.
Le précédent Thomas Eagleton
Dans le cas de ceux sondés pour mener campagne avec Kamala Harris, ils étaient au total une demi-douzaine à passer un entretien avec la candidate ce week-end. La démocrate n'était bien sûr pas seule depuis deux semaines pour débusquer la moindre faille chez ses interlocuteurs. L'équipe l'entourant spécialement pour l'occasion est dirigé par Eric Holder, procureur général durant l'administration Obama, et Dana Remus. Cette dernière, ancienne conseillère de Joe Biden, avait déjà aidé le président américain à choisir Kamala Harris pour la présidentielle de 2020.
Toutes ces précautions prises ne sont parfois pas suffisantes. L'histoire de Thomas Eagleton a beau dater de plus d'un demi-siècle, elle est sans doute encore dans les esprits des huiles du parti. Colistier de George McGovern en 1972, le sénateur de Missouri avait dû jeter l'éponge deux semaines après sa nomination et être remplacé par Sargent Shriver. Un abandon provoqué par les révélations de la presse concernant ses séjours en hôpital psychiatrique et le traitement par électrochocs qu'il avait suivi en raison d'une dépression.
Quand bien même le processus de sélection est censé faire émerger un nom à la fois capable d'augmenter les chances de Kamala Harris de l'emporter dans les États clés sans constituer un handicap supplémentaire, il ne faut pas non plus sous-estimer le rôle de "l'alchimie" devant exister entre elle et son colistier, insiste Tim Kaine. "Je pense que Harris doit choisir quelqu'un avec qui elle se sent entièrement confortable", ajoute James Hamilton. "Quelqu'un qui lui sera loyal et qui défendra sa cause sur les routes de la campagne."