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Négociations sur le nucléaire iranien prolongées de sept mois

L'Iran et les puissances du "P5+1" ont décidé de prolonger les négociations sur le programme nucléaire de Téhéran jusqu'au 30 juin prochain. /Photo prise le 24 novembre 2014/REUTERS/Joe Klamar/Pool

par Louis Charbonneau et Fredrik Dahl VIENNE (Reuters) - Les négociations sur le programme nucléaire iranien ont échoué lundi pour la deuxième fois cette année, Téhéran et les six grandes puissances du "P5+1" se donnant sept mois de plus pour sortir de l'impasse. Les Occidentaux ont dit viser un "accord de principe" sur le fond d'ici mars 2015, les détails pratiques étant mis au point par la suite. Américains, Iraniens et Britanniques ont toutefois fait état de progrès lors de cette session de discussions dans la capitale autrichienne. "Nous avons dû conclure qu'il n'était pas possible de parvenir à un accord pour la date limite qui était fixée à aujourd'hui et c'est pourquoi nous allons étendre le JPOA au 30 juin 2015", a déclaré à la presse le chef de la diplomatie britannique, Philip Hammond, à la fin des négociations. Il faisait référence au Joint Plan of Action, l'accord intérimaire conclu il y a un an à Genève entre le P5+1 (les cinq membres du Conseil de sécurité de l'Onu : Chine, Etats-Unis, France, Grande-Bretagne et Russie + l'Allemagne) et l'Iran. Ce plan prévoyait que la République islamique cesse d'augmenter son niveau d'enrichissement d'uranium en échange d'un allègement partiel des sanctions internationales. Dans ce cadre, Téhéran avait notamment obtenu l'accès à une partie de ses revenus pétroliers gelés à l'étranger. A l'origine, le P5+1 et l'Iran avaient fixé comme date-butoir juillet 2014 pour parvenir à un accord définitif. Cette échéance avait ensuite été repoussée au lundi 24 novembre. Les Occidentaux ont néanmoins affiché un certain optimisme. Dans un communiqué commun, le chef de la diplomatie iranienne, Mohammad Javad Zarif, et l'émissaire de l'UE Catherine Ashton disent qu'ils "restent convaincus que, sur la base des progrès réalisés et des nouvelles idées qui continuent à être explorées, il y a une voie possible vers une solution définitive". Zarif et Ashton soulignent leur volonté de s'appuyer "sur l'élan actuel afin de terminer ces négociations dans un délai le plus court possible." "Si nous pouvons parvenir à un accord plus tôt, ce sera tant mieux", a dit le secrétaire d'Etat américain John Kerry. "Les discussions ne vont pas être plus faciles simplement parce que nous les prolongeons. Elles sont difficiles. Elles ont été difficiles et elles continueront à l'être." "PROGRÈS" "Ces derniers jours à Vienne nous avons fait des progrès réels et substantiels et nous avons vu apparaître de nouvelles idées", a ajouté John Kerry, "même si demeurent d'importants points de désaccord". En Iran, le président Hassan Rohani a déclaré que les positions s'étaient rapprochées entre l'Iran et le groupe P5+1. "Durant les discussions de Vienne, de nombreux fossés ont été en partie comblés, nos positions et celles de l'autre partie se sont rapprochées", a-t-il dit. Le secrétaire britannique au Foreign Office a aussi évoqué des "progrès importants". Son homologue russe Sergueï Lavrov a pour sa part parlé de "progrès substantiels" et a dit espérer un accord global sur les "principes de base" d'ici "trois à quatre mois". "Au cours de ces derniers jours, il y a des idées nouvelles qui ont été mises sur la table et qui demandent évidemment un examen technique très précis", a pour sa part commenté le ministre français des Affaires étrangères Laurent Fabius. "Il faudra davantage de temps. L'objectif, c'est d'essayer de trouver un accord si possible ‎qui aille dans le sens de la paix et de la sécurité". Les discussions reprendront en décembre dans un lieu non encore fixé. Le prochain cycle de discussions pourrait se tenir de nouveau à Vienne, mais Oman est également cité. Pendant ces prolongations, Téhéran restera éligible à un allègement des sanctions d'une valeur de 700 millions de dollars (560 millions d'euros) par mois. A Washington, trois sénateurs républicains, dont John McCain, ont pour leur part réclamé de nouvelles sanctions contre Téhéran. "CHOIX POLITIQUE" L'objectif du P5+1 est de réduire les capacités iraniennes d'enrichissement de l'uranium en échange d'une levée progressive des sanctions qui frappent l'Iran depuis 2007. Dans son rapport mensuel d'évaluation consulté par Reuters, l'Agence internationale de l'énergie atomique indique que l'Iran a réduit ses stocks d'uranium faiblement enrichi qui représentent désormais un peu moins de 7.400 kg, en dessous du seuil accepté par les grandes puissances l'an passé. Au début du mois, ces stocks se trouvaient juste au-dessus de cette limite. Les principaux points de désaccord portent sur l'étendue du programme d'enrichissement de l'Iran, le rythme de la levée des sanctions qui affectent l'économie iranienne et la durée d'un éventuel accord. Un haut diplomate occidental a fait part de son pessimisme. "Cela fait dix ans que des idées et des propositions sont présentées" a-t-il dit sous le sceau de l'anonymat. "Il ne reste plus rien. C'est essentiellement une question secondaire maintenant. Les Iraniens ne bougent pas. C'est un choix politique." "Je suis sceptique quant au fait que même si nous prolongeons, nous puissions parvenir à un accord", a-t-il déclaré avant l'annonce officielle de la prolongation. Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a fait part de sa satisfaction dès les premières rumeurs d'échec. "L'absence d'accord vaut mieux qu'un mauvais accord", a-t-il déclaré à la BBC. "L'accord que prônait l'Iran était terrible. Un accord aurait permis à l'Iran d'enrichir de l'uranium pour une bombe atomique tout en supprimant les sanctions." (Avec Jonathan, John Irish et Parisa Hafesi; Henri-Pierre André, Danielle Rouquié et Guy Kerivel pour le service français)