"On verra ce qu'on fait": la majorité partagée autour de la proposition de loi "anti-squat"

L'opposition au sein de ses propres rangs. L'Assemblée démarre ce lundi l'examen d'une proposition de loi visant à sanctionner davantage les squatteurs. Un texte porté par Guillaume Kasbarian, député Renaissance et président de la commission des Affaires économiques, et qui pourrait être adopté grâce aux voix des députés LR et RN.

"Nous avions déposé une proposition de loi similaire il y a trois ans", indique un député du Rassemblement national à BFMTV, tandis qu'un élu des Républicains nous explique que la proposition "va dans le bon sens".

Débat sur le choix de la commission pour ce texte

Un vote assuré pour la majorité? Pas sûr. Les parlementaires du Modem pourraient en effet jouer les trouble-fête selon nos informations. Depuis cet après-midi en effet, les tractations vont bon train entre les députés Modem, Matignon, et Guillaume Kasbarian pour essayer "d'atterrir" sur une loi qui "en l'état, ne nous satisfait pas".

"Ça mériterait presque une motion de rejet", nous dit avec le sourire un député du Modem.

Le Modem ne cache donc plus son embarras - pour ne pas dire son mécontentement - face à un texte qui se serait trompé de commission parlementaire.

"Cette proposition de loi traite du pénal, du civil, elle aurait dû revenir à la commission des Lois qui a l'habitude de ces sujets, de la question des juges, du contradictoire, pas la commission des Affaires économiques", nous confie un député Modem qui juge le processus existant "suffisant". "Après il faut juste veiller à sa bonne application", ajoute-t-il.

Le ministre Olivier Klein "favorable", mais sous conditions

Le Code pénal prévoit qu'une personne condamnée pour squat encourt jusqu'à un an de prison et 15.000 euros d'amende. La proposition de loi examinée à partir de ce lundi entend tripler ces sanctions en faisant passer la peine de prison maximale à trois ans et l'amende à 45.000 euros. Un texte dénoncé par la gauche et par plusieurs associations.

D'autant que le parti de François Bayrou peut compter sur le soutien d'un membre du gouvernement et non des moindres: Olivier Klein. L'ancien socialiste, désormais ministre délégué chargé de la Ville et du Logement, souhaiterait "rééquilibrer" un texte loin de plaire à tous les députés de la majorité.

"Il passe sa vie avec les associations de logement, pas étonnant qu'il soit contre", souffle un député Renaissance favorable au texte.

Le ministre, qui a pris la parole ce lundi soir au Palais-Bourbon, a terminé son intervention en se disant "favorable" au texte tout en y mettant plusieurs conditions.

"Ce texte doit trouver l'équilibre", a déclaré Olivier Klein, qui insiste sur le fait que "l'assimilation entre squatteurs et mauvais payeurs ne doit pas exister".

"On ne veut pas leur mettre des bâtons dans les roues"

Des députés Modem et de la majorité se sont entretenus toute l'après-midi avec Matignon pour arbitrer. "Nous attendons de voir comment le texte va tourner. Nous avons eu la confirmation par Matignon qu'ils vont rééquilibrer le texte, nous avons déposé des amendements avec eux, ils nous soutiennent", indique à BFMTV un député Modem.

"Ce sont nos copains, on ne veut pas leur mettre des bâtons dans les roues. S'il y en a chez nous qui votent contre ou qui s'abstiennent, ça va encore faire les gros titres de la presse", soutient un autre parlementaire, "on verra ce qu'on fait et ce qui ressort de cette loi".

Vote pour, ou abstention

Du côté du rapporteur, qui a beaucoup travaillé avec les députés Républicains pour faire passer son texte, pas question de laisser ce texte "perdre de sa substance".

"Qu'ils votent contre, et qu'ils aillent expliquer dans leurs circonscriptions pourquoi ils ont voté contre une loi qui protège les petits propriétaires", confie un député Renaissance à BFMTV.

Dans le groupe Modem, certains députés devraient la voter, d'autres s'abstenir. Mais plusieurs, au sein du groupe partenaire de Renaissance râle sur la méthode et dénonce la façon de faire de la présidente de groupe Aurore Bergé, proche du rapporteur Guillaume Kasbarian.

"Une petite musique consiste, au sein de Renaissance, surtout au sein d'un petit commando autour d'Aurore Bergé, à se jeter sur tous les sujets que le RN pourrait porter...", observe un député Modem.

Un procédé qui pourrait s'expliquer par l'absence de majorité absolue pour le camp présidentiel, et la nécessité de convaincre le Rassemblement national ou les Républicains pour faire passer des textes. Un autre élu s'insurge d'ailleurs devant cette posture des députés Renaissance autour de ce texte: "ils n'ont plus aucun complexe à bosser avec la droite, à se droitiser!"

Article original publié sur BFMTV.com