Veolia juge "légitime" le débat sur le prix pour Suez, défend son projet

VEOLIA JUGE "LÉGITIME" LE DÉBAT SUR LE PRIX POUR SUEZ, DÉFEND SON PROJET

par Benjamin Mallet

PARIS (Reuters) - Le débat sur le prix proposé par Veolia pour le rachat de l'essentiel de la participation d'Engie au capital de Suez est "légitime" mais ne doit pas occulter la logique industrielle du projet de fusion porté par le groupe, a déclaré mardi à Reuters Estelle Brachlianoff, directrice générale adjointe de Veolia en charge des opérations.

Veolia a proposé fin août de racheter l'essentiel de la participation d'Engie dans Suez (29,9% sur un total de 32%) pour 15,50 euros par action, soit un montant de 2,9 milliards d'euros, avant de lancer une offre sur le reste du capital de son concurrent afin de créer un champion français du traitement de l'eau et des déchets.

Bien que fermement rejetée par Suez, cette approche suscite l'intérêt d'Engie sous certaines conditions, notamment celles d'un relèvement du prix proposé et de garanties en matière d'emplois.

"Oui, il y a un débat légitime à avoir sur le prix, évidemment, et il y aura une discussion à avoir. Mais ce n'est absolument pas le coeur du projet, me semble-t-il, ou alors il faut vendre à l'encan et éventuellement démanteler, ce que (Suez est) en train de faire", a déclaré Estelle Brachlianoff dans une interview à Reuters.

"On n'a que la moitié des solutions de transition écologique qui existent aujourd'hui. Il faut qu'on invente l'autre moitié et donc qu'on mette des moyens, de la recherche et développement et de la création d'emplois", a expliqué la n°2 de Veolia.

"J'aimerais bien qu'on évite de disperser nos moyens et qu'on soit plutôt dans la complémentarité pour être capable de traduire ce savoir-faire français en France, et puis après de le projeter à l'international (...). Finalement, on est en train de parler d'une façon de voir la transition écologique qui n'est pas forcément la même que celle des Américains d'une part ou des Chinois d'autres part."

"Le sujet du prix est légitime et nous en discuterons avec Engie, nous n'allons pas le nier", confirme Olivier Brousse, directeur de la stratégie de Veolia, dans un entretien accordé aux Echos.

"Le prix est un des éléments, nous voulons convaincre Engie de nous vendre ses parts, mais nous ne ferons pas varier le prix au détriment de l'emploi et des actifs. Faire plus d'économies ou céder des filiales n'est pas notre projet, donc notre marge de manoeuvre existe mais elle est limitée", ajoute-t-il.

Interrogée sur l'éventualité que Veolia allonge la durée de validité de son offre à Engie, dont l'échéance a été fixée au 30 septembre, Estelle Brachlianoff a au contraire jugé urgent de mener à bien le projet dans un contexte de multiples cessions annoncées par Suez ces derniers jours.

VEOLIA VEUT CRÉER DES EMPLOIS EN FRANCE AVEC SUEZ

"Ce démantèlement en accéléré n'est pas quelque chose qui me plaît car notre projet industriel est de construire quelque chose, et donc voir quelqu'un détruire les choses comme ça, c'est regrettable", a-t-elle dit.

Indiquant que Veolia continuait "d'être à l'écoute de toutes les parties prenantes et de prendre des engagements", avec l'ambition de créer des emplois en France, qui resterait "l'ancrage" d'un nouvel ensemble formé avec Suez, la dirigeante a de nouveau appelé la direction de Suez au dialogue.

"La question, c'est d'étudier projet contre projet (...). J'entends aussi des gens s'inquiéter qu'un contre-projet éventuel, avec des fonds d'investissement, n'apporterait pas les garanties que nous apportons et pas nécessairement ce que souhaitent les uns et les autres. Le statu quo n'est pas une option", a-t-elle dit.

Suez s'est pour sa part engagé mardi à doubler la valeur de son titre pour ses actionnaires d'ici à 2022, à travers notamment un dividende exceptionnel ou des rachats d'actions, lors d'une série d'annonces en forme de plaidoyer en faveur de son indépendance.

Les nouvelles ambitions de Suez reposent en particulier sur une accélération de son plan stratégique, avec un total de 4 milliards d'euros de cessions d'actifs visé dès début 2021 - au lieu de 3 à 4 milliards à fin 2023 précédemment - et 1,2 milliard d'économies annuelles à l'horizon 2023, contre un milliard annoncés à l'automne 2019.

(Edité par Jean-Stéphane Brosse, Jean-Michel Bélot, Bertrand Boucey et Jean-Philippe Lefief)