Deux opposants vénézuéliens arrêtés et détenus

par Corina Pons et Alexandra Ulmer CARACAS (Reuters) - Deux des chefs de file de l'opposition vénézuélienne ont été placés en détention mardi sur ordre de la Cour suprême, alliée au président Nicolas Maduro, qui les accuse d'avoir planifié leur évasion. Leopoldo Lopez et Antonio Ledezma, qui avaient appelé à des manifestations contre la nouvelle assemblée constituante élue dimanche, étaient assignés à résidence, le premier depuis le 8 juillet, après avoir passé plus de trois ans en prison pour sa participation aux manifestations antigouvernementales de 2014; le second depuis 2015, après avoir purgé une peine de prison pour des accusations de coup de force contre Nicolas Maduro. La libération surprise de Lopez, et son assignation à résidence, avaient été interprétées comme une possible signal de détente dans la crise politique en cours depuis avril, sur fond de difficultés économiques et de pénuries. Dans un communiqué annonçant leur réincarcération, la Cour suprême explique qu'en plus de planifier leur évasion, ils ont violé les termes de leur assignation à résidence en faisant des déclarations politiques et en s'exprimant dans les médias. Mais l'opposition a vu dans leur arrestation un signe de la détermination du gouvernement socialiste de réduire au silence toute voix dissidente après l'élection dimanche d'une Assemblée constituante, boycottée par l'opposition et présentée par Maduro comme un moyen de sortir de la crise qui a fait quelque 120 morts en quatre mois, dont au moins dix le jour du scrutin. D'après son épouse, Leopoldo Lopez a été interpellé en pleine nuit par des agents du Sebin, les services de renseignement du pays. "Minuit 27, cette nuit: le moment où la dictature enlève Leopoldo chez moi", a tweeté Lilian Tintori en joignant une vidéo où l'on voit son mari poussé vers un véhicule portant le sigle du "Sebin". Le député Freddy Guevara, membre comme Lopez du parti Volonté populaire, a affirmé que les autorités avaient "kidnappé Leopoldo Lopez parce qu'il ne voulait pas céder aux pressions et aux fausses promesses du régime". Antonio Ledezma, ancien maire de la capitale, Caracas, et lui aussi opposant en vue au régime socialiste de Maduro, a également été emmené par le Sebin, a tweeté sa fille, Vanessa Ledezma, postant une vidéo où l'on voit son père, en pyjama, emmené par des agents. Aux Etats-Unis, le département d'Etat a réclamé mardi la libération immédiate des deux hommes. Zeid Ra'ad al Hussein, Haut commissaire des Nations unies aux droits de l'homme, a déploré leur arrestation et a condamné l'usage excessif de la violence. "J'exhorte les autorités à ne pas aggraver une situation déjà instable par un usage excessif de la force, à l'image des violentes interventions des forces de sécurité dans plusieurs parties du pays", a-t-il ajouté dans un communiqué. L'Assemblée nationale, où l'opposition est majoritaire depuis les élections de décembre 2015 mais dont les jours pourraient être désormais comptés en fonction des travaux de la Constituante, s'est réunie en session mardi. Les ambassadeurs de Grande-Bretagne, de France, du Mexique et d'Espagne étaient présents. (avec Tom Miles à Genève; Eric Faye, Arthur Connan et Henri-Pierre André pour le service français)