USA: Les démocrates dévoilent leur projet de réforme de la police après la mort de Floyd

par David Morgan

WASHINGTON (Reuters) - Des élus démocrates au Congrès américain ont présenté lundi une proposition de loi visant à lutter contre les violences policières et les discriminations raciales aux Etats-Unis, en réponse au mouvement de protestation suscité par la mort de George Floyd lors d'une interpellation à Minneapolis.

Leur texte énumère sur 134 pages un ensemble de mesures interdisant notamment les techniques d'interpellation par étranglement, restreignant aussi le recours à la "force létale" ou obligeant les agents des unités fédérales de police à porter sur eux une caméra corporelle.

Ce projet de "Justice in Policing Act" vise aussi à permettre à des victimes de manquements aux règles de la police de porter plainte, mettant de ce fait un terme à l'"immunité qualifiée" qui protège la police contre des poursuites pour usage de la force, et à faciliter le déclenchement d'enquêtes indépendantes sur les unités de police soupçonnées de dérapages structurels.

Le "profilage racial" serait également prohibé pour les agences fédérales, et les entités de maintien de l'ordre au niveau des Etats ou des villes bénéficiant de financements fédéraux seraient tenues d'éliminer cette pratique.

"Une profession dans laquelle on a le pouvoir de tuer devrait être une profession qui exige des agents hautement formés responsables devant l'opinion", a souligné l'élue démocrate Karen Bass, présidente du Caucus noir, représentant les Afro-Américains au Congrès.

S'exprimant la veille sur CNN, elle avait estimé que le moment était venu que "la culture policière change dans de nombreux services". "Nous sommes à un tournant dans notre pays au regard des manifestations", avait-elle ajouté, espérant que la vague de protestations qui balaie les Etats-Unis depuis la mort de George Floyd accentuerait la pression pour que les législateurs soient amenés à agir.

TRUMP: "99% (DES POLICIERS) SONT VRAIMENT FORMIDABLES"

Les démocrates, majoritaires à la Chambre des représentants, espèrent soumettre ce texte à la chambre basse du Congrès le 4 juillet prochain, date symbolique de la Fête de l'indépendance.

On ignore pour le moment si cette proposition recevra le soutien des républicains, majoritaires au Sénat, dont l'appui est indispensable, ainsi que celui de Donald Trump pour devenir une loi.

A la Maison blanche, une porte-parole a rapporté lundi que le président américain examinait différentes propositions de réforme des forces de police. Il juge en revanche "inacceptables" plusieurs aspects de la proposition de loi déposée par les démocrates, a ajouté Kayleigh McEnany.

"Nous voulons nous assurer qu'il n'y a pas de mauvais citoyens (dans les différentes forces de police), mais 99% d'entre eux sont des gens vraiment formidables qui font un travail record", a déclaré pour sa part Donald Trump, qui a présidé une table ronde avec des représentants des organes fédéraux, régionaux et locaux de maintien de l'ordre.

Il a ajouté qu'il n'était pas question de "démanteler nos forces de police" et qu'il n'y aurait pas de coupes budgétaires, réponse au slogan "Defund the police" apparu dans les cortèges et appelant à retirer les financements des forces de police pour les investir ailleurs.

"Nous avons confondu l'idée d'avoir des quartiers sûrs avec le fait de recruter davantage de policiers quand, en fait, la véritable façon d'arriver à des quartiers sûrs et solides, c'est d'investir dans ces quartiers", a déclaré la sénatrice démocrate de Californie Kamala Harris.

Mais ces appels à la suppression des budgets de la police ne figurent pas dans la proposition de loi présentée lundi par les démocrates et Joe Biden, leur candidat à l'élection présidentielle du 3 novembre, a également fait savoir qu'il n'y était pas favorable.

Les images de l'arrestation le 25 mai de George Floyd, un Noir de 46 ans, ont soulevé une vague de colère contre la police américaine accusée de racisme et de brutalité contre la communauté afro-américaine. Ce dernier est décédé après qu'un policier a pressé son genou sur son cou pendant près de neuf minutes.

(David Morgan, avec Susan Heavey; version française Claude Chendjou et Henri-Pierre André, édité par Jean-Stéphane Brosse et Jean-Michel Bélot)