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Une réforme du logement social contre les ghettos urbains

Manuel Valls a annoncé vendredi des mesures en faveur des logements sociaux et de la mixité de leurs habitants, objectif central d'une "politique de peuplement" censée mettre fin, selon ses mots, aux situations d'"apartheid" en France. /Photo d'archives/REUTERS/Youssef Boudlal

PARIS (Reuters) - Manuel Valls a annoncé vendredi des mesures en faveur des logements sociaux et de la mixité de leurs habitants, objectif central d'une "politique de peuplement" censée mettre fin, selon ses mots, aux situations d'"apartheid" en France. C'est un des volets du plan présenté par le Premier ministre à l'issue d'un comité interministériel pour lutter contre les ghettos urbains en réponse aux attentats djihadistes de janvier et à la montée du radicalisme religieux. Une de ses mesures phares consiste à mobiliser d'ici juin les préfets pour sévir contre 216 communes qui ne respectent pas la loi SRU fixant des quotas de logements sociaux obligatoires. Ils pourront délivrer au nom des communes en question des permis de construire, préempter des terrains, des logements ou des immeubles existants, pour les transformer en logements sociaux, précise un document de présentation. "À l’inverse, des instructions seront données aux préfets pour limiter la construction de logements sociaux dans les 1.500 quartiers prioritaires de la politique de la ville, dès lors que le taux de logement social y dépassera 50%." Les personnes aux ressources trop faibles ne seront plus logées systématiquement dans ces quartiers prioritaires. Une revendication des élus locaux, fatigués de l'afflux d'une population fragile dans leurs quartiers sensibles dans le cadre de la loi sur le droit au logement opposable (Dalo). Le gouvernement veut aussi généraliser les systèmes de points pour les demandeurs de logement selon des critères de priorité transparents et accélérer le renouvellement urbain. Les logements sociaux démolis seront reconstruits d'abord en dehors des quartiers prioritaires, où le logement intermédiaire et l’accession à la propriété seront favorisés. "Arrêtons de rajouter de la pauvreté à la pauvreté", a fait valoir le Premier ministre. REMEMBREMENT La politique des loyers sera revue dans le parc social pour diversifier les habitants de ces immeubles. Ces loyers ne seront plus fixés en fonction du financement d'origine de l'immeuble mais des revenus des locataires. "Cette possibilité permettra de minorer le loyer d'un logement dans une zone favorisée pour l'attribuer à un ménage à faibles ressources", explique le gouvernement. Afin de ne pas fragiliser son équilibre économique, le bailleur social concerné sera autorisé, en compensation, à pratiquer un loyer plus élevé dans un autre secteur. Le gouvernement veut accélérer le remembrement d'un parc social éparpillé entre des opérateurs trop nombreux pour assurer une bonne gestion -il y a aujourd’hui environ 800 organismes HLM pour près de cinq millions de logements sociaux. Dans certaines communes, plus de 20 organismes gèrent ces immeubles. Manuel Valls a dit vouloir "casser les logiques de la ségrégation" et revendiqué l’expression d’"apartheid", très critiquée. Cela a été "utile" à la prise de conscience, a dit le Premier ministre, qui a aussi répondu par avance aux critiques prévisibles sur un manque de moyens: "Tout ne se réglera pas à coup de millions supplémentaires", a-t-il déclaré. "Si on regarde les mesures qui sont annoncées aujourd'hui, on est sans doute sur les trois ans qui viennent autour d'un milliard d'euros", a-t-il dit à la presse. "Il faut y rajouter les mesures d'emplois, les mesures dans le domaine de l'école." De nombreuses autres mesures visent notamment à mieux accompagner les enfants nouvellement arrivés en France, à renforcer la maîtrise du français chez les immigrés et à favoriser la mixité sociale dans les établissements scolaires. Ce plan remet également en cause les "enseignements de langue et culture d’origine" (Elco), introduits au départ comme "aide linguistique" au retour au pays des enfants de migrants, mais dont le gouvernement reconnaît qu'ils "ne contribuent pas à l’intégration" des descendants de migrants en France. (Julien Ponthus, édité par Emmanuel Jarry)