Brexit: "Quoi que vous fassiez, ça me va", dit Trump après avoir critiqué May

par Jeff Mason et William James

CHEQUERS, Angleterre (Reuters) - Donald Trump s'est dit impatient vendredi de conclure un accord commercial post-Brexit avec le Royaume-Uni, après avoir critiqué le plan de sortie de l'Union européenne de la Première ministre britannique Theresa May.

Dans un entretien accordé au Sun, le président américain explique que les Etats-Unis ne pourront pas conclure d'accord commercial avec la Grande-Bretagne si elle s'en tient au "livre blanc" sur le Brexit présenté jeudi par Theresa May, qui prévoit le maintien de liens commerciaux étroits avec l'Union européenne.

"Si (la Grande-Bretagne) conclut un accord comme celui (proposé par Theresa May), nous traiterons avec l'Union européenne plutôt qu'avec le Royaume-Uni, ce qui va probablement tuer l'accord" anglo-américain, dit-il.

Donald Trump regrette par ailleurs que la Première ministre britannique ait ignoré ses conseils sur la façon de quitter l'UE. "Je l'aurais fait très différemment", dit-il. "J'ai dit à Theresa May comment faire mais elle ne m'a pas écouté."

Le président américain a tenu ces propos au terme d'une semaine agitée pour Theresa May, après les démissions lundi des ministres des Affaires étrangères et du Brexit, Boris Johnson et David Davis, mécontents du plan de Brexit qui prévoit le maintien de liens commerciaux à leurs yeux trop étroits avec l'UE.

Boris Johnson "ferait un bon Premier ministre (...) Il a tout ce qu'il faut", estime Donald Trump dans l'entretien accordé au Sun. Il souhaite en outre que l'ancien secrétaire au Foreign Office retrouve une place au sein du gouvernement.

"UNE INCROYABLE OPPORTUNITÉ"

Aucun président américain en exercice n'avait critiqué aussi vertement un Premier ministre britannique pendant une visite officielle.

Vendredi après-midi, lors d'une conférence de presse conjointe à Chequers, résidence de campagne de Theresa May à 60 kilomètres de Londres, Donald Trump a tenté d'apaiser les tensions, saluant "l'excellent" travail de la Première ministre.

"Une fois que la procédure du Brexit sera terminée et que le Royaume-Uni aura, peut-être, quitté l'UE, quoi que vous fassiez, ça me va, c'est votre décision", a-t-il dit au côté de Theresa May.

"C'est une incroyable opportunité pour nos deux pays et nous allons la saisir pleinement", a-t-il ajouté.

Interrogé sur l'entretien qu'il a accordé au Sun, Trump a assuré non seulement qu'il n'avait pas critiqué Theresa May, mais qu'il l'avait encensée.

"Malheureusement, l'article qui a été publié était globalement bon, mais ne contient pas ce que j'ai dit sur la Première ministre, et j'ai dit des choses formidables. Cela s'appelle des 'fake news'", s'est-il défendu.

Theresa May a quant à elle rappelé que le compromis sur le Brexit, décidé à Chequers vendredi dernier, allait permettre de conclure un partenariat commercial ambitieux avec les Etats-Unis.

"Nous nous sommes entendus aujourd'hui sur le fait que, dès que le Royaume-Uni quittera l'UE, nous rechercherons un accord de libre-échange ambitieux", a-t-elle déclaré.

LE THÉ À WINDSOR

La Première ministre avait reçu le président américain jeudi soir au palais de Blenheim, demeure ancestrale de la famille Churchill près d'Oxford, où elle avait prôné la conclusion d'un accord commercial avec les Etats-Unis après la sortie du Royaume-Uni de l'UE.

"Pour le bien de nos peuples, travaillons ensemble pour bâtir un avenir plus prospère", avait-elle déclaré, ajoutant qu'Etats-Unis et Grande-Bretagne n'étaient "pas seulement les alliés les plus proches mais aussi les amis les plus sincères".

Quelques milliers de manifestants s'étaient rassemblés à l'extérieur du palais pour huer Donald Trump à son passage.

A Londres, des centaines de manifestations sont organisées pour la visite du président américain. Plus de 64.000 personnes ont prévu d'y participer.

Des milliers de manifestants se sont réunis vendredi à Parliament Square, devant le palais de Westminster, avec un ballon de baudruche représentant un bébé orange à l'effigie de Donald Trump.

Dans l'après-midi, Donald et Melania Trump sont allés prendre le thé avec la reine Elizabeth II au château de Windsor. La souveraine les a accueilli avec le sourire, non sans avoir jeté un oeil à sa montre alors qu'elle les attendait. Le locataire de la Maison blanche l'avait auparavant qualifiée de "femme formidable". Alors que la reine, âgée de 92 ans, passait la garde en revue en sa compagnie, il s'est brutalement arrêté, la contraignant à faire un écart.

Donald Trump quittera le Royaume-Uni dimanche, après une escale en Ecosse où il possède deux parcours de golf, pour se rendre à Helsinki où il doit rencontrer lundi le président russe Vladimir Poutine.

(Jean-Philippe Lefief, Jean Terzian et Arthur Connan pour le service français)