Un rapport de RSF fait la lumière sur la répression de la presse en Iran

PARIS (Reuters) - Les autorités iraniennes ont arrêté, emprisonné ou exécuté au moins 860 journalistes entre 1979 et 2009, révèlent jeudi des documents confidentiels divulgués par Reporters Sans Frontières (RSF).

Ces documents, dont l'existence a été rendue publique par l'ONG en présence de l'Iranienne Shirin Ebadi, lauréate du prix Nobel de la paix en 2003, contiennent 1,7 million de procédures judiciaires ouvertes à l'encontre de citoyens, de membres de minorités, opposants politiques et journalistes.

Selon Christophe Deloire, le secrétaire général de l'ONG, RSF a passé plusieurs mois à vérifier l'authenticité des informations contenues dans ces documents obtenues "grâce à l'intermédiaire de lanceurs d'alerte". Elle a pu établir que des centaines de journalistes ont été ciblés par les autorités entre 1979, point de départ de la Révolution islamique iranienne dont le quarantième anniversaire est célébré ces jours-ci par le régime.

Ce registre est un "fichier détaillant l'intégralité des arrestations, détentions et exécutions infligées par les autorités iraniennes pendant des dizaines d'années dans la région de Téhéran", dit RSF.

"Grâce à un minutieux travail de recherche réalisé pendant des mois, RSF est en mesure d'affirmer qu'au moins 860 journalistes et journalistes-citoyens, recensés dans ce registre officiel, ont été arrêtés, détenus ou exécutés par le régime iranien entre 1979 et 2009."

Ce fichier sera transmis au Haut commissariat des Nations unies aux droits de l'homme, a prévenu Christophe Deloire, disant espérer que cela permette de mettre Téhéran devant ses responsabilités.

"L'existence même de ce fichier et les millions de données qu'il contient démontre non seulement l'ampleur du mensonge des autorités iraniennes depuis des années quand elles affirment qu'il n'existe pas de prisonniers politiques (...) mais également avec quelle implacable machination le régime a réprimé pendant 40 ans des centaines d'hommes et de femmes pour leur opinion et leur travail d'information", a-t-il expliqué.

L'analyse de documents a permis à RSF d'établir qu'au moins quatre journalistes ont été exécutés. Parmi eux, Simon Farzami, un Irano-Suisse qui dirigeait le bureau de l'AFP de Téhéran lors de son arrestation en 1980.

RSF affirme en outre que le fichier atteste de la violence de la répression de 1988 lorsque près de 4.000 prisonniers politiques ont été exécutés sur ordre de l'ayatollah Khomeini entre juillet et septembre.

Les autorités iraniennes ont toujours réfuté l'existence de cette campagne d'exécutions.

(Luke Baker, avec Michaela Cabrera à Paris et Parisa Hafezi à Dubai, Nicolas Delame pour le service français)