Huit ans de prison pour un militant chinois des droits de l'homme

par Christian Shepherd

PEKIN (Reuters) - Un militant chinois des droits de l'homme a été condamné mardi à huit ans de prison, la peine plus lourde infligée ces dernières années dans ce type de dossier.

Wu Gan, un blogueur connu sous le pseudonyme de "Super Vulgar Butcher" (le boucher super vulgaire), dénonçait régulièrement des abus de pouvoir qu'il imputait au gouvernement. Il a été arrêté en 2015 avant d'être accusé de subversion.

Un tribunal de Tianjin, dans le nord-est du pays, l'a déclaré coupable, entre autres, de diffusion de fausses nouvelles, d'avoir proféré des insultes et de s'être servi de prétextes artistiques pour provoquer des perturbations.

"Il a commis une série de délits pour subvertir la puissance publique et renverser le système socialiste et a gravement mis en danger la sécurité publique et la stabilité sociale", a jugé le tribunal intermédiaire du peuple de la municipalité de Tianjin.

Son avocat a indiqué à Reuters qu'il ferait appel.

La sévérité de la peine a conduit l'ambassade d'Allemagne à Pékin à publier un communiqué faisant état de sa déception.

D'après des ONG, sa condamnation à huit ans de prison est sans précédent pour ce type de dossiers depuis le lancement, en juillet 2015, d'une campagne de répression contre les militants des droits de l'homme.

CONFESSION FILMÉE

Dans une affaire distincte, un avocat spécialisé dans les questions liées aux droits de l'homme, lui aussi condamné pour subversion, a échappé à une peine de prison après avoir avoué les crimes qui lui étaient reprochés.

Xie Yang comparaissait devant un tribunal de la ville de Changsha, dans le sud-est de la Chine. Dans une vidéo mise en ligne par le tribunal, il dit accepter le verdict, remercie les autorités et s'engage à respecter la loi.

L'avocat avait travaillé sur plusieurs affaires sensibles, assurant notamment la défense de partisans des manifestants démocrates de Hong Kong.

En janvier dernier, son épouse, qui vit aux Etats-Unis, et son avocat ont divulgué un récit détaillé des tortures auxquelles l'avocat aurait été exposés durant sa détention.

Ce récit avait été qualifié de fausses informations par les médias publics chinois.

"Dans ces deux affaires, il y a de graves inquiétudes relatives au respect de la loi", a commenté l'ambassade d'Allemagne à Pékin dans son communiqué.

Patrick Poon, chercheur basé à Hong Kong travaillant pour Amnesty International, a souligné pour sa part que la date de ces deux verdicts, au lendemain de Noël, semblait relever d'un "calcul politique cynique" tablant sur une mobilisation moindre des diplomates et des observateurs étrangers en cette période des fêtes de fin d'année.

Au ministère des Affaires étrangères, la porte-parole, Hua Chunying, a indiqué lors de son point de presse qu'Amnesty n'était pas fiable sur la Chine et qu'il ne fallait pas porter crédit à ses allégations. La Chine, a-t-elle ajouté, respecte l'Etat de droit.

(Nicolas Delame et Henri-Pierre André pour le service français)