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L'offensive sur Alep s'intensifie, la France veut une résolution

par Ellen Francis et Tom Perry BEYROUTH (Reuters) - Deux hôpitaux et une boulangerie situés dans des secteurs d'Alep tenus par les rebelles ont été touchés par des frappes aériennes, tôt mercredi matin, alors que s'intensifie l'offensive de l'armée syrienne appuyée par la Russie pour reprendre la totalité de la ville. La France a annoncé vouloir présenter une résolution au Conseil de sécurité de l'Onu qui imposerait un cessez-le-feu à Alep. Ceux qui ne voteront pas ce texte, a prévenu le ministre français des Affaires étrangères Jean-Marc Ayrault, "prendront le risque de porter la responsabilité de complicités de crimes de guerre". Le pape François a réclamé mercredi l'arrêt des bombardements à Alep, qu'il a qualifiée de "ville martyre", et dont les auteurs seront selon lui soumis un jour au "jugement de Dieu". Pour le secrétaire général de l'Onu Ban Ki-moon, la situation dans la ville est pire que celle dans un "abattoir" et ceux qui emploient des "armes encore plus destructrices" commettent des crimes de guerre. Une semaine après le début de l'offensive, qui a commencé jeudi dernier par des frappes aériennes avant de se doubler, lundi, d'une attaque terrestre, on compte plusieurs centaines de morts, pris notamment sous les décombres. Il ne resterait plus que 30 médecins dans la zone assiégée pour s'occuper de plusieurs centaines de blessés par jour. Selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), les deux hôpitaux touchés mercredi, le M2 et le M10, ne fonctionnent plus. L'hôpital M2 pourrait être à nouveau fonctionnel dans quelques jours, a déclaré le docteur Abd Arrahman Alomar de la société médicale américano-syrienne, en revanche il est impossible de savoir quand l'hôpital M10 pourra être réparé. Au total, il n'y a plus aucune unité d'anesthésie dans la partie Est de la ville qui ne dispose plus que de six lits pour les soins d'urgence, a-t-il ajouté. Face à cette offensive majeure, lancée à la fin d'une brève trêve, la semaine dernière, des Etats étrangers ont fourni aux insurgés des missiles sol-sol Grad de 22 et 40 km de portée "en excellente quantité", a déclaré à Reuters le commandant rebelle Farès al Baïouch, qui dirige la division nord de l'Armée syrienne libre (ASL). Les armes fournies jusqu'ici avaient une portée de 20 km. Ces nouveaux missiles seront utilisés à Alep, mais aussi sur les fronts d'Hama et de la côte, a déclaré le commandant. Dans le quartier d'Al Maadi, à Alep-Est, un tir d'artillerie a visé une boulangerie devant laquelle une file d'attente s'était formée. D'après l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), le bombardement a fait au moins six morts. FAIRE DIVERSION Mohammad Abou Radjab, radiologue à l'hôpital M10 de Sakhour, précise que les missiles ont touché l'établissement vers 04h00 du matin. "Des gravats sont tombés sur les patients de l'unité de soins intensifs", a-t-il dit. L'hôpital M10 est le plus important établissement de traumatologie dans les quartiers tenus par les rebelles. Les frappes ont également touché les générateurs d'électricité et d'oxygène de l'hôpital. Des patients ont dû être transférés dans un autre établissement du secteur, a indiqué le personnel médical de l'hôpital M10. On ne sait pas s'il y a eu des victimes dans l'hôpital. Dans le quartier de Saladin à Alep, l'armée syrienne a annoncé avoir détruit mercredi un lieu de réunion du groupe islamiste Djabhat Fateh al Cham, l'ex-Front al Nosra, lié à Al Qaïda. Des stocks d'armes et de munitions ont été détruits dans le secteur de la vieille ville, poursuit-elle dans un communiqué sans avancer de bilan. Une vidéo diffusée sur YouTube lundi montre des rebelles de l'ASL tirant des missiles Grad sur des positions du gouvernement près d'Alep. Le commandant Al Baïouch a confirmé que les armes qu'on y voit viennent d'être livrées. Selon un haut commandant rebelle, les forces progouvernementales se mobilisent pour une nouvelle attaque au sol, cette fois dans les quartiers centraux d'Alep. La Coalition nationale syrienne (CNS, opposition) a indiqué ne plus croire à la possibilité d'une solution politique. "L'opposition politique et armée travaillent étroitement et reformulent leurs priorités à la lumière de la campagne militaire brutale menée par le régime et ses alliés", annonce-t-elle dans un communiqué. Cette position est partagée par les alliés d'Assad, les Iraniens et les combattants du Hezbollah libanais, qui estiment que cette guerre ne pourra être gagnée que par les combats. De son côté, la Russie affirme être prête à reprendre ses efforts communs avec les Etats-Unis pour normaliser la situation à Alep. (Ellen Francis et Lisa Barrington; Henri-Pierre André et Danielle Rouquié pour le service français)