Un actionnaire de Toshiba juge la vente des puces inutile

par Taro Fuse et Makiko Yamazaki

TOKYO (Reuters) - Un investisseur activiste de Toshiba, basé à Hong Kong, estime que le conglomérat japonais n'a plus besoin de vendre de sa division de semi-conducteurs au fonds Bain Capital grâce à la récente injection de capital dont il a bénéficié, montre une lettre consultée par Reuters.

Argyle Street Management, un fonds spéculatif avec 1,2 milliard de dollars d'actifs sous gestion, a adressé une lettre au conseil d'administration de Toshiba lundi soir, a déclaré à Reuters le directeur des investissements, Kin Chan. Le fonds a refusé d'indiquer le nombre d'actions Toshiba qu'il détient.

Premier actionnaire activiste à exprimer ouvertement son opposition à la vente des mémoires de Toshiba, Argyle invite la trentaine d'investisseurs étrangers ayant participé à la récente augmentation de capital de 600 milliards de yens (4,5 milliards d'euros) du groupe japonais à le rejoindre. Il dit être déjà en discussions avec au moins trois fonds qui partagent son opinion.

Toshiba, deuxième producteur de mémoires Nand derrière Samsung Electronics, a annoncé en septembre avoir signé un accord pour céder sa division de semi-conducteurs à un consortium emmené par le fonds d'investissement Bain Capital pour 2.000 milliards de yens (15,1 milliards d'euros) au terme de tractations aux multiples rebondissements.

Cette cession doit lui permettre de redresser sa situation financière, mise en danger par la faillite de sa filiale nucléaire américaine Westinghouse, et éviter de comptabiliser une nouvelle fois un actif net négatif, ce qui pourrait avoir comme conséquence sa radiation de la Bourse de Tokyo.

Pour éviter toute déconvenue, le groupe japonais a parallèlement sollicité une injection de capital en levant ce mois-ci 5,3 milliards de dollars auprès de fonds étrangers, un montant suffisant pour couvrir ses engagements, grâce aussi à des déductions fiscales.

Argyle estime "qu'il n'y a plus d'urgence à procéder à une vente des mémoires Toshiba", peut-on lire dans la lettre, qui propose une réunion avec le conseil d'administration de Toshiba en décembre ou en janvier.

Le prix de 2.000 milliards de yens ou 18 milliards de dollars proposé pour la division puces "sous-évalue de manière significative l'activité", indique la lettre, ajoutant que le conseil devrait plutôt envisager une introduction en Bourse de la division.

ACTIONNAIRES ACTIVISTES

Une porte-parole de Toshiba a refusé de dire si le groupe avait reçu une lettre d'Argyle. Mais elle a déclaré que Toshiba travaillait à finaliser la vente au consortium amené par Bain d'ici la fin du mois de mars "afin de garantir que Toshiba Memory dispose de ressources nécessaires pour continuer à innover et délivrer sur un marché de la mémoire flash qui est en pleine croissance."

Les représentants de Bain n'étaient pas disponibles dans l'immédiat pour un commentaire.

L'augmentation de capital, équivalente à une participation de 35% dans le capital de Toshiba, s'est faite avec le concours d'actionnaires activistes de premier plan comme Third Point et Oasis Management Company.

Argyle, qui ne fait pas partie du groupe, a commencé à acheter des actions Toshiba au cours des derniers mois, a déclaré Kin Chan.

Argyle estime par ailleurs dans sa lettre que Westinghouse dispose encore d'une valeur substantielle et l'investisseur dit ne pas comprendre les raisons pour lesquelles Toshiba lui a attribué une valeur comptable nulle.

La lettre fait également valoir que, comme l'émission d'actions nouvelles a entraîné une modification importante de l'actionnariat de Toshiba, le conseil devrait tenir compte des opinions des nouveaux actionnaires.

Aux termes de l'accord avec Bain, Toshiba détiendra 40,2% de la division mémoires et Hoya, un équipementier de puces, 9,9%. L'actionnariat sera ainsi à plus de 50% japonais, comme le souhaitait le gouvernement nippon.

Le principal actionnaire de Toshiba est actuellement le fonds de Singapour Effissimo Capital Management, avec une participation de 11,34%.

Ce potentiel nouvel obstacle à la vente de Toyota Memory intervient alors que se dessine un accord de principe entre Toshiba et le groupe américain Western Digital, qui contestait l'opération depuis le début et avait porté l'affaire en justice.

(Claude Chendjou pour le service français, édité par Véronique Tison)