Ukraine : pourquoi est-il nécessaire de continuer à documenter la guerre pour en appréhender la réalité

Press Service of the 93rd Kholodnyi Yar Separate Machanized Brigade of the Ukrainian Armed Forces/Handout via REUTERS

Faire son sac, prendre des piles, des câbles et des cartes SD pour l’enregistreur numérique. Demander son accréditation médias auprès du ministère ukrainien de la Défense avant de partir, de revenir sur le terrain pour la troisième fois depuis le début de l’invasion russe, avec ce désir de documenter la guerre.

Dans l’avion pour la Pologne, juste devant moi, un jeune Ukrainien revient aussi. La teneur existentielle de son retour est sans commun rapport avec mes préoccupations. J’imagine qu’il se réinstalle après un long exil, ou alors peut-être rentre-t-il simplement pour quelques jours, pour revoir les siens, ceux qui sont restés.

À l’approche de l’atterrissage, il tient son téléphone en main. Il fait défiler ses photos : les fumées d’une bonne grosse bombe, une autre explosion, un chat (il zoome), un bébé, encore le même bébé, toujours le bébé mais cette fois-ci dans les bras de sa maman, une voiture de sport en cours de réparation dans un garage (il zoome sur le capot), un immeuble détruit, une femme nue (il ne s’attarde pas sur la photo), des amis au restaurant tout sourire devant l’objectif.

Revenir en Ukraine, une ethnographie des corps en résistance

Chroniquer la guerre d’un point de vue ethnographique n’est pas une affaire si courante. J’ai tenté de le faire au cours de plusieurs séjours en Syrie (2012-2018), puis en Ukraine, afin de mieux comprendre comment les conflits s’inscrivent dans le quotidien de chacun.

J’ai toujours pensé que ce travail a du sens. Il...


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