En Tunisie, «la jeunesse déshéritée n’est pas prise en charge par les politiques»

Vendredi à Ettadhamen, près de la capitale tunisienne, après des pillages.

Le chercheur Pierre Vermeren souligne le faible engagement de l'Europe aux côtés des démocrates après des émeutes qui pourraient bénéficier aux islamistes d'Ennahdha.

Pierre Vermeren enseigne l’histoire du Maghreb contemporain à l’université Paris-I-Panthéon-Sorbonne. Spécialiste des mondes arabes et africains du Nord et de la décolonisation (1), il analyse les pires émeutes depuis cinq ans en Tunisie.

N’a-t-on pas un sentiment de déjà-vu dans cette «géographie» des émeutes ?

Absolument. Les embrasements se sont déroulés dans ces zones déshéritées de l’intérieur du pays, à fort chômage et dans lesquelles les jeunes diplômés n’ont ni avenir ni perspective d’émigration. Ces événements rappellent d’ailleurs les émeutes du pain, dans les années 80. Malgré la révolution qui s’est déroulée il y a cinq ans, il n’y a pas eu de rattrapage. Même s’il y a des associations et des ONG dans lesquelles certains chômeurs se sont investis, cette jeunesse des déshérités, des candidats à l’émigration ou au jihad, des diplômés chômeurs n’est pas représentée ni prise en charge par les partis politiques. Que cela débouche sur des émeutes n’est pas surprenant. Je note que ces révoltes ne touchent pas le Grand Sud, où le vote islamiste Ennahdha est fort. On peut imaginer que le commerce avec la Libye permet à ces populations de tenir économiquement, pour le moment.

Ces jeunes ne sont donc pas politiquement représentés à gauche ?

La gauche n’a jamais réussi à s’unir et la seule force qui représente les ouvriers insérés est l’Union générale tunisienne du travail (UGTT), une force syndicale qui rassemble plutôt les 40-50 ans qui ont un emploi. Les tentatives de fonder un parti de gauche, ou du moins représentant les diplômés chômeurs, n’ont pas fonctionné car les dirigeants des partis ont 60 ans ou plus, et une culture politique des années 70-80, en décalage par rapport aux jeunes élevés sous Ben Ali, où il n’y avait apparemment plus de politisation.

On a l’impression que l’UGTT est (...) Lire la suite sur Liberation.fr

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