Transports en commun : les astuces des femmes pour se sentir plus en sécurité

Plus d’une femme sur deux a peur de prendre le métro, le RER, le bus, de peur de se faire agresser. A défaut de voir de vraies initiatives mises en place pour les protéger, les voyageuses ont développé des techniques pour se sentir plus en sécurité. Elles racontent.

Campagne anti-harcèlement dans les transports en commun
Campagne anti-harcèlement dans les transports en commun

Les résultats de la dernière enquête de l’Institut d’aménagement d’urbanisme (IAU) ont de quoi faire froid dans le dos. L’étude, intitulée “Victimisation et sentiment d’insécurité en Île-de-France” révèle que 56,3% des utilisatrices des transports en commun sont angoissées à l’idée de prendre le RER ou le métro : elles redoutent d’être victimes d’agressions physiques, sexuelles, de vol ou de harcèlement.

En 2015, une étude affirmait déjà que 100% des voyageuses avaient déjà été victimes d’une agression ou de harcèlement sexiste dans les transports publics. Preuve que les choses sont loin d’avoir évolué au cours de ces dernières années.

Angoisse dans les transports en commun : un manque de solutions proposées

Les chiffres de l’étude sont accablants : par crainte pour leur sécurité, de nombreuses femmes préfèrent renoncer aux transports en commun, quitte à investir de l’argent pour faire appel à un taxi ou un VTC. Et si le Syndicat des transports d’Île-de-France (STIF) et la présidente de la région Valérie Pécresse travaillent actuellement sur des mesures pour rendre les transports plus sûrs, les choses n’évoluent pas assez vite.

Dans un monde idéal, il n’y aurait pas d’agressions dans les transports. Les utilisateurs auraient été éduqués, et les voyageurs se sentiraient en sécurité. Mais ce n’est pas le cas. Résultat : les femmes ont été contraintes de développer des techniques et astuces pour pouvoir se protéger, et si besoin, se défendre.

Les femmes changent leur tenue pour prendre le métro

Première constatation ? Les utilisatrices des transports en commun sont nombreuses à adapter leur tenue. L’objectif ? Être transparente, passe-partout, ne pas attirer l’attention… Et surtout, offrir un minimum de prise à un agresseur potentiel, et pouvoir prendre la fuite facilement.Depuis que j’habite à Paris, je n’ose pas sortir jambes nues si je ne suis pas accompagnée“, explique Floriane.

Même expérience pour Capucine, qui, après une agression, a décidé d’adopter une tenue de camouflage :Jamais de robe ou de jupe sans collant. L’objectif ? Me faire discrète. C’est triste“. Nawal complète :Dans le métro tôt le matin, je préfère les baskets aux talons, histoire de pouvoir courir si besoin“.

Toutes ont conscience que cela ne devrait pas être à elles de s’adapter, et que cela ne fait que renforcer la culpabilisation des victimes et la fameuse maxime “En même temps, vu ta tenue, tu l’as cherché“. Pourtant, cela vaut toujours mieux que de se faire agresser.

Choisir la bonne place et la bonne attitude

Autre mécanisme de défense ? Ne pas s’installer n’importe où. Elodie, par exemple, mise sur les wagons les plus remplis pour se sentir en sécurité. Violette se place toujours près du chauffeur ou de la porte du conducteur, dans le premier wagon. Et surtout : les femmes comptent sur la solidarité féminine, et préfèrent s’installer entre elles, ou à proximité de familles, si elles se sentent en danger. Beaucoup cherchent également des visages rassurants, même si d’expérience, elles savent que très peu de personnes risquent d’intervenir en cas de problème.

Côté attitude : elles misent toutes sur un air revêche. Ecouteurs en place dans les oreilles (sans musique, pour ne pas être prise par surprise), Lily s’interdit de sourire :Les mecs ont tendance à voir ça comme une invitation“. Fanny et Margaux ont la même technique : elles prennent un air “sérieux, concentré, énervé : mine de rien, ça décourage certaines personnes“.

Quand n’importe quoi peut devenir une arme

Le contenu du sac à main d’une femme est souvent étudié pour l’auto-défense. Nombreuses sont celles à confier avoir en leur possession un mini-taser ou une bombe lacrymogène. Alice a une autre technique :Une bombe de déodorant. Discret, passe-partout, mais vaporisé dans les yeux d’un agresseur, ça me permet de l’aveugler et de courir“. Marie, elle, mise tout sur son livre :Bien épais, et avec une tranche renforcée. Parfait pour me défendre en cas de besoin“.

Autre technique bien connue de ces dames : garder ses clés à la main et s’en servir comme d’un poing américain. Ce qui n’est pas forcément une bonne idée, car en frappant son agresseur avec cette arme de fortune, on risque de s’auto-sectionner l’artère digitale palmaire. Raison pour laquelle d’autres préfèrent tenir un briquet dans son poing fermé, afin de protéger leurs phalanges. Des solutions “faites maisons”, qui permettent de se sentir un peu plus en sécurité… Sans jamais totalement empêcher la méfiance.

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