Le tourbillon politique en Slovénie pourrait retarder les projets de Bruxelles
Nous ne connaîtrons pas la composition de la prochaine Commission européenne avant au moins une semaine, en raison d'un blocage des procédures parlementaires en Slovénie.
Dans d'autres pays, la sélection d'un commissaire a causé des problèmes politiques, étant donné les nombreuses façons différentes dont les 27 Etats membres choisissent leurs candidats pour l'exécutif de l'UE.
Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, a demandé aux gouvernements des pays membres d'envoyer les noms de leurs candidats ; une fois qu'elle aura la liste complète, elle annoncera les portefeuilles que chacun recevra.
En vertu du traité sur l'Union européenne, les candidats à l'exécutif européen doivent être compétents, indépendants et attachés à l'Europe. Mme von der Leyen doit toutefois s'assurer qu'elle obtient des profils de qualité, car les députés européens vérifieront ces critères lorsqu'ils décideront d'approuver ou non les membres du nouvel exécutif.
La président de la Commission a déclaré vouloir des personnes ayant une expérience de haut niveau dans un gouvernement, dans la diplomatie ou au sein des institutions de l'UE. Elle s'est opposée à un certain nombre de candidats qui ne répondaient pas à ces critères, en particulier lorsqu'ils mettaient en péril son objectif de parité hommes-femmes.
Le mode de sélection des candidats varie d'un pays à l'autre et devient parfois un sujet politique brûlant.
Dans le cas de la Slovénie, la candidate choisie par le gouvernement est la diplomate Marta Kos, qui n'a été officiellement choisie que le lundi 9 septembre, après un remplacement de dernière minute de Tomaž Vesel.
M. Vesel, ancien président de la Cour des comptes, avait été proposé avant l'été, une décision confirmée par le gouvernement la semaine dernière (3 septembre), avant que Ljubljana ne cède et n'accepte d'envoyer une femme.
Cette volte-face a provoqué une tempête politique en Slovénie, ce qui risque de retarder encore les projets de Mme von der Leyen.
En vertu de la loi, Mme Kos doit assister à une audition de la commission des affaires européennes de l'Assemblée nationale slovène, qui était initialement prévue le 13 septembre.
Bien que les opinions des législateurs ne soient pas contraignantes, le président de la commission, Franc Breznik, aurait, selon les médias slovènes, menacé de retarder l'audition de deux semaines afin d'obtenir plus d'informations sur les pressions exercées par le gouvernement sur M. Vesel pour qu'il se retire.
Le porte-parole de la Commission, Eric Mamer, a déclaré que "les événements" en Slovénie étaient la raison officielle du retard dans la présentation de la liste complète des candidats et de leurs portefeuilles, initialement prévue cette semaine (11 septembre).
L'audition de Mme Kos donne à Mme von der Leyen quelques jours de plus pour peaufiner son équipe dirigeante, notamment en raison des préoccupations des eurodéputés de gauche concernant l'équilibre entre les sexes et l'affectation des politiques, mais la menace de M. Breznik pourrait entraîner un retard bien plus important.
Dans d'autres pays, comme la Lituanie, la procédure est assez différente : le choix doit être approuvé par les législateurs, après avoir été approuvé par le Premier ministre et le président, ce qui a créé un casse-tête.
Le premier candidat en lice, le ministre des Affaires étrangères Gabrielius Landsbergis, a dû s'incliner après que le président Gitanas Nausėda, a menacé d'opposer son veto.
Cette complexité pourrait bien être la raison pour laquelle Vilnius n'a pas répondu à la demande de Mme von der Leyen de présenter un homme et une femme pour le poste.
"Dans le cas de la Lituanie, nous avons une procédure de nomination tellement compliquée que pour nous, même désigner un candidat est un véritable défi", a déclaré l'ancien Premier ministre Andrius Kubilius à Euronews après avoir été choisi par la Lituanie. "Désigner deux candidats, ce serait peut-être un résultat presque irréalisable".
Dans d'autres pays, comme les Pays-Bas, les législateurs doivent seulement être informés de la nomination de la Commission, comme l'a fait le Premier ministre Dick Schoof juste avant de reconduire Wopke Hoekstra dans ses fonctions.
Pour certains, ce choix a été surprenant, car l'Appel chrétien-démocrate, le parti qu'il dirigeait auparavant, ne fait pas partie des quatre partis de la coalition de M. Schoof.
D'un point de vue formel, cela n'a pas empêché le gouvernement de le choisir, et M. Schoof a peut-être estimé que le fait de nommer un député sortant déjà proche de Mme von der Leyen augmentait ses chances d'obtenir un bon portefeuille.
Dans d'autres pays, il n'y a pas de consensus sur la manière de choisir le commissaire, et ce choix peut représenter un champ de mines politique.
En France, le choix d'un candidat est traditionnellement considéré comme une prérogative du président, dans le cadre de sa responsabilité en matière de politique étrangère.
C'est ce qu'a fait Emmanuel Macron avant l'été, lorsqu'il a fait part à ses homologues du Conseil européen de son intention de renommer Thierry Breton pour le poste.
Dans une série d'interventions enflammées à la radio, Marine Le Pen, du parti d'extrême droite Rassemblement national, a qualifié sa décision de "sorte de coup d'État administratif", ajoutant que "c'est la prérogative du Premier ministre de nommer le commissaire européen".
À l'époque, la France était en pleine période d'élections législatives au cours desquelles Mme Le Pen espérait que son parti prendrait le contrôle du pays.
La nomination du Breton a été officialisée, peu avant que M. Macron ne choisisse Michel Barnier, un homme de centre-droit, comme Premier ministre.
En Belgique, le choix du commissaire n'est qu'un autre élément du jeu d'échecs à quatre dimensions qui mène à la formation du gouvernement.
Les élections fédérales et régionales de juin n'ont pas permis de dégager un vainqueur clair, ce qui a conduit à des négociations approfondies sur la formation d'une coalition. Au cours de ces négociations, les partis se voient attribuer des points en fonction du nombre de sièges qu'ils détiennent, qu'ils dépensent pour des postes prestigieux, dont celui de commissaire européen n'est qu'un exemple, aux côtés du Premier ministre et d'autres fonctions gouvernementales.
La complexité de ce processus fait que la Belgique détient déjà le record mondial du temps passé sans gouvernement. C'est également la raison pour laquelle le pays a été le seul à ne pas respecter la date limite du 30 août fixée par Mme von der Leyen pour choisir un nom.
La Belgique a finalement choisi Hadja Lahbib, ministre libérale francophone des Affaires étrangères, comme candidate, alors que les pourparlers entre les cinq partis pour former un gouvernement fédéral ont échoué, puis repris.