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Toujours pas de dialogue Kiev-Moscou sur la crise

PARIS (Reuters) - Le ballet diplomatique qui s'est joué mercredi à Paris pour tenter de trouver une solution à la crise ukrainienne n'a pas permis de rétablir le dialogue entre Kiev et Moscou, mais la France estime qu'il a permis "d'amorcer quelque chose". Réunis à l'occasion de la rencontre du groupe international de soutien au Liban organisée par François Hollande, les pays occidentaux avaient émis l'espoir de réussir à réunir dans la même pièce les chefs de la diplomatie russe et ukrainienne, Sergueï Lavrov et Andrii Deshchytsia. Une ultime tentative orchestrée par le ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius, a échoué mercredi soir. Les chefs de la diplomatie russe, ukrainienne, américaine, française, allemande et polonaise se sont retrouvés au Quai d'Orsay, mais les deux principaux protagonistes de la crise ont quitté Paris sans se rencontrer. "Nous sommes convenus de poursuivre ces discussions dans les jours à venir pour voir de quelle manière nous pouvons stabiliser, normaliser la situation et surmonter la crise", a dit Sergueï Lavrov en quittant le ministère français. Prié de dire s'il avait rencontré son homologue ukrainien, il a répondu. "Qui c'est ? Je n'ai vu personne ?" Laurent Fabius s'est montré prudemment optimiste. "Il a été convenu de poursuivre les négociations, ce n'est pas terminé et la situation n'est pas facile, mais nous sommes heureux que cette journée à Paris pour la première fois ait permis d'amorcer quelque chose", a-t-il dit à la presse. Les discussions devraient continuer jeudi à Rome, où se tient une conférence internationale pour le soutien à la Libye. Dans la foulée, Andrii Deshchytsia a dit penser "que nous parviendrons à un résultat positif". CONSEIL EUROPÉEN JEUDI Kiev, Londres et Washington avaient publié dans l'après-midi d'un communiqué commun dans lequel ils insistaient sur l'importance de discussions directes entre Kiev et Moscou, "facilitées si nécessaire" par la communauté internationale. Un message répété par le secrétaire d'Etat américain John Kerry lors d'un entretien avec Sergueï Lavrov, le premier depuis le feu vert donné samedi par le parlement russe au recours aux forces armées en Crimée. Dans un chassé-croisé diplomatique sans précédent depuis le début de la crise ukrainienne, les pays occidentaux ont multiplié les échanges en marge du sommet sur le Liban. En début d'après-midi, François Hollande a réuni à l'Elysée John Kerry, Sergueï Lavrov, Laurent Fabius et leurs homologues britannique et allemand, William Hague et Frank-Walter Steinmeier à la veille d'un Conseil européen extraordinaire consacré à l'Ukraine. "Ce n'est pas un conseil qui devrait annoncer de nouvelles sanctions mais il y aura peut être des précisions là-dessus", déclarait-on dans l'entourage de François Hollande. "L'objectif, c'est une mise en garde sévère de la Russie". "Le problème c'est que les Russes adoptent une position ferme mais ne disent pas ce qu'ils veulent", a dit cette source. "L'objectif aujourd'hui était d'analyser leur position mais ils n'ont pas fait de demandes précises." Au coeur des tensions entre l'Occident et Moscou, la Crimée, une république autonome, qui appartient depuis 1954 à l'Ukraine mais qui est majoritairement peuplée de Russes. Elle fait l'objet d'un bras de fer entre pro-occidentaux et pro-Russes, et la destitution du président pro-Russe Viktor Ianoukovitch le 22 février a ravivé les tensions séparatistes. BAIN DE SANG Soufflant le chaud et le froid en l'espace de trois jours, le président russe Vladimir Poutine a temporairement écarté mardi l'idée d'une intervention armée mais la tension reste vive sur le terrain et la voie diplomatique semble dans l'impasse. Selon des responsables américains, Barack Obama a évoqué avec Vladimir Poutine un possible plan de sortie de crise qui prévoit le retour des forces russes en Crimée dans leurs casernes et l'envoi d'observateurs internationaux chargés de garantir le respect des droits des Ukrainiens russophones. Un projet rejeté mercredi par le chef de la diplomatie russe qui a réaffirmé que Moscou n'avait aucune autorité sur les forces d'autodéfense déployées en Crimée. Prévenant que la Russie ne permettrait pas un "bain de sang" en Ukraine, il a réitéré son soutien à l'accord conclu le 21 février entre Viktor Ianoukovtich et l'opposition ukrainienne. Cet accord prévoit une élection présidentielle anticipée, une révision de la Constitution et la formation d'un gouvernement d'union nationale. Selon Sergueï Lavrov, Moscou et les puissances occidentales conviendraient que les parties ukrainiennes doivent s'en tenir à l'accord de sortie de crise signé le 21 février, ce que Washington a démenti. (Marine Pennetier, avec John Irish, édité par Yves Clarisse)