Tirs meurtriers sur Alep, les rebelles refusent de partir
BEYROUTH (Reuters) - Les rebelles syriens ont exclu mercredi de se retirer des quartiers d'Alep-Est dont ils restent maîtres, malgré la progression rapide des forces syriennes. Depuis ce week-end, l'armée et les milices qui lui prêtent mains fortes auraient repris un tiers de la partie orientale de la ville, auparavant tenue par les insurgés. Tandis que leur défaite semble se dessiner, Recep Tayyip Erdogan et son homologue russe Vladimir Poutine, alliés respectifs de l'opposition et de Damas, ont reconnu la nécessité de parvenir à un cessez-le-feu et d'acheminer de l'aide humanitaire à Alep, a-t-on appris de sources proches de la présidence turque. Le ministre russe des Affaires étrangères doit rencontrer jeudi son homologue turc à Antalya. L'armée et ses alliés disent s'être emparés mercredi de Cheikh Saïd, un quartier du sud de la ville, mais les rebelles assurent les avoir repoussés. Ils ne tiennent plus qu'un tiers de ce secteur, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH). L'intensification de l'offensive gouvernementale a fait 50.000 déplacés en quatre jours, d'après le même organisme proche de l'opposition qui dresse un bilan quotidien du conflit à l'aide d'un réseau d'informateurs. Le CICR parlait mardi de 20.000 déplacées en 48 heures. L'OSDH ajoute que plusieurs centaines de personnes fuyant les quartiers aux mains des rebelles ont été arrêtées ces derniers jours par les forces de l'ordre. L'information a été démentie par une source militaire syrienne, qui a parlé de contrôles d'identité. Tous ceux qui ne peuvent être correctement identifiés sont placés dans des "lieux spécifiques" où les civils sont rassemblés, a-t-on expliqué. "GIGANTESQUE CIMETIÈRE" Les insurgés ont quant à eux fait état d'un intensification des raids aériens, notamment dans la vieille ville. La défense civile présente dans les zones rebelles fait état de 45 morts mercredi, tandis que l'OSDH en a dénombré 26. Dans Alep-Ouest, sous contrôle gouvernemental, huit personnes ont été tuées par des bombardements rebelles dans les secteurs d'Adhamiyeh, du Nouvel-Alep et de Fourkan, rapporte l'agence de presse officielle syrienne Sana. Brita Hagi Hassan, président du conseil municipal d'Alep-Est, a demandé l'établissement de "corridors sécurisés" pour permettre l'évacuation des civils. S'adressant à la presse en compagnie du ministre français des Affaires étrangères Jean-Marc Ayrault à Paris, il a également accusé les forces gouvernementales de bombarder les civils sans distinction et a fait état d'exécutions parmi ceux qui ont rejoint les quartiers ouest de la ville. Jean-Marc Ayrault, à l'origine de la réunion extraordinaire du Conseil de sécurité de l'Onu ce mercredi à New York, a souhaité que les mesures nécessaires soient prises pour sauver les civils. Lors de cette réunion à l'Onu, Stephen O'Brien, secrétaire général adjoint des Nations unies aux affaires humanitaires, a lui aussi invité toutes les parties à agir avant qu'Alep ne devienne "un gigantesque cimetière". "Nous partageons l'inquiétude suscitée par ce qu'endurent les civils de l'Est d'Alep mais l'arrêt des opérations antiterroristes ne mettrait pas fin à leurs souffrances", a quant à lui estimé l'ambassadeur russe à l'Onu Vitali Tchourkine. (Tom Perry et Ellen Francis avec John Irish à Paris; Henri-Pierre André, Pierre Sérisier et Jean-Philippe Lefief pour le service français, édité par Tangi Salaün)