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Theresa May conclut un accord de gouvernement avec le DUP

Theresa May (à droite) et la présidente du DUP, Arlene Foster (à gauche), toutes deux souriantes et échangeant des plaisanteries, ont procédé à la signature de l'accord lors d'une rencontre au 10 Downing Street à Londres. /Photo prise le 26 juin 2017/REUTERS/Jack Hill

par Guy Faulconbridge LONDRES (Reuters) - La Première ministre britannique, Theresa May, a noué lundi un accord de gouvernement avec le principal parti unioniste d'Irlande du Nord en échange d'une aide supplémentaire d'un milliard de livres (1,13 milliard d'euros) en faveur de la province. L'accord avec le Parti unioniste démocrate (DUP) permettra au Parti conservateur de Theresa May de disposer d'une majorité absolue à la Chambre des communes, majorité qu'il a perdue lors des élections législatives anticipées du 8 juin. La chef du gouvernement britannique avait besoin de l'appoint des dix députés du DUP, une formation connue pour ses positions très conservatrices sur des questions de société, pour retrouver cette majorité et gouverner avec les coudées franches. Le DUP apportera son soutien aux Tories lors de votes clés sur des sujets essentiels, comme le budget, la sécurité nationale, l'économie ou encore le Brexit. L'accord ne signifie pas toutefois la création d'un gouvernement de coalition. En échange, Londres s'engage à accroître les financements en faveur de l'Ulster, à hauteur d'un milliard de livres, sur les deux prochaines années. Cet argent servira pour les trois quarts à financer des projets d'infrastructure routière ainsi que dans les domaines de l'éducation et de la santé. Theresa May et la présidente du DUP, Arlene Foster, toutes deux souriantes et échangeant des plaisanteries, ont procédé à la signature de cet accord lors d'une rencontre au 10 Downing Street à Londres. L'ÉQUILIBRE EN ULSTER Theresa May a salué un accord "qui va nous permettre de travailler ensemble dans l'intérêt de l'ensemble du Royaume-Uni et nous apporter la certitude dont nous avons besoin au moment où nous lançons notre sortie de l'Union européenne". Arlene Foster a abondé dans le même sens, jugeant que l'accord, intervenu au terme de deux semaines de négociations plus ardues que prévu, garantissait "un gouvernement stable dans l'intérêt du Royaume-Uni, à un moment vital". Theresa May avait convoqué le scrutin législatif anticipé afin de conforter son assise politique avant d'entamer les délicates négociations avec les Européens sur le Brexit. Celles-ci ont débuté lundi dernier et devraient prendre deux ans. Mais elle a perdu son pari électoral et ce revers cinglant a fragilisé sa position de leader au sein du Parti conservateur, certains de ses ministres allant jusqu'à souhaiter son remplacement par l'actuel ministre des Finances, Philip Hammond. Dans les rangs des Tories, on s'inquiète en outre de voir un accord avec le DUP nuire au délicat équilibre du partage du pouvoir en Ulster. UNITÉ DU ROYAUME-UNI EN CAUSE ? Le Sinn Féin, principale force nationaliste et qui milite pour la réunification de l'Irlande, a quitté le gouvernement de Belfast en janvier, provoquant des élections en mars et une série de rendez-vous manqués pour rétablir la coalition entre nationalistes catholiques et unionistes protestants. Le gouvernement britannique a donné jusqu'à jeudi aux deux camps pour reformer une coalition de gouvernement dans la province, conformément à l'accord de paix signé en avril 1998. "Le temps presse pour que les parties s'entendent et rétablissent un partage du pouvoir", a rappelé Theresa May. Mais le Sinn Féin se montre prudent. Il a estimé la semaine dernière ne pas être en mesure d'évaluer les conséquences d'un accord entre le DUP et les conservateurs au niveau national. Son président, Gerry Adams, a jugé lundi que l'accord fournissait aux Tories "un chèque en blanc" pour négocier le Brexit, ce qui en soi représente "une menace pour l'accord du Vendredi saint", de 1998. En Irlande, le ministre des Affaires étrangères, Simon Coveney, a pris note du fait que l'accord entre Londres et le DUP, parti notoirement eurosceptique, donnerait du poids à la position particulière de la province d'Irlande du Nord dans les négociations sur le Brexit. L'accord avec le DUP a été en revanche mal accueilli en Ecosse et au Pays-de-Galles, où certains dénoncent une forme de favoritisme mettant en péril l'équilibre même du Royaume-Uni. "Toute idée de justice sacrifiée sur l'autel du gourmand DUP afin de permettre (à Theresa May) de s'accrocher au pouvoir", dit sur Twitter la Première ministre écossaise, Nicola Sturgeon. Le chef du gouvernement gallois, Carwyn Jones, y voit une "injure faite à l'engagement de construire un pays plus uni", jugeant que cet accord "affaiblit plus encore le Royaume-Uni". (Avec Padraic Halpin à Dublin et Elisabeth O'Leary à Edimbourg, Gilles Trequesser pour le service français)