The Handmaid's Tale saison 3 : Elisabeth Moss annonce que Gilead peut devenir encore bien pire

En quoi la série a-t-elle changé votre regard sur le monde actuel, par exemple en ce qui concerne l'activisme ou les droits des femmes ?

Elisabeth Moss : Quand on vit l'expérience The Handmaid's Tale, pendant sept mois de tournage, et au total une dizaine de mois par an, on ne peut pas faire autrement que l'avoir dans la peau. On a l'impression d'être connecté de manière plus profonde à ce qui se passe. C'est inévitable et j'en suis très heureuse.

June vous inspire-t-elle au quotidien ?

Bien sûr, elle m'inspire ! On espère toutes, si on se retrouvait dans sa situation, que l'on serait aussi fortes qu'elle. C'est ce qui est inspirant, de se dire qu'elle n'est pas une super-héroïne, c'est une femme comme les autres : elle est une épouse, une mère, une amie, une femme, un être humain. Elle n'est pas parfaite, elle déborde d'émotions, elle fait des erreurs, particulièrement cette saison, elle va faire des choses très discutables sur le plan moral. Et avec les premiers épisodes, vous n'avez encore rien vu. Ce qui se passe dans la seconde moitié de la saison… C'est complètement différent et c'est vraiment dur. Quoi qu'il en soit, je me sens fière quand je me mets dans sa peau et ça me donne de la force.

Certaines personnes ont trouvé la saison 2 difficile à regarder, en raison de tout ce que traverse June. A quel point avez-vous influé sur la fin de la saison, ce moment où on pense vraiment qu'elle va s'échapper, et puis finalement non ?

Ce n'était pas mon idée, mais j'ai trouvé que c'était tellement bien et tellement complexe, que j'ai voulu le pousser au maximum. Avec Mike Barker, le réalisateur, et le directeur de la photo, on en a beaucoup discuté et on voulait vraiment appuyer au maximum ce qui était écrit dans le script. Le moment où elle voit le Commander Lawrence, où elle se dit qu'il fait partie de la Résistance, qu'il y a un homme très haut placé qui aide des femmes et des enfants à fuir, il fallait le faire durer. Et ensuite, lors qu'elle se tourne et qu'elle regarde la voiture partir, qu'elle se retourne vers Emily et qu'elle marche très lentement vers le camion… Je crois que c'était mon idée qu'elle pose sa main sur la porte et qu'elle mettre presque un pied dans le camion pour qu'on pense qu'elle va monter, avant de dire cette dernière phrase « Appelle-la Nichole, dis-lui que je l'aime » et de refermer la porte. Je voulais que ce soit le plus frustrant possible, le plus horrible possible. On savait qu'on allait énerver les gens, qu'on allait les frustrer, que certains allaient avoir envie de nous tuer ! Mais on devait le faire.


La relation entre June et Serena est l'un des aspects les plus passionnants de la série. En ce début de saison, Serena se révèle moins dure et June semble avoir de l'empathie pour elle. Est-elle vraiment honnête ou essaie-t-elle de manipuler Serena pour en faire une alliée ?

Je pense que c'est quelque part entre les deux. Je ne crois pas que ce soit de la manipulation, je pense qu'elle reconnaît en Serena une alliée potentielle souhaite faire en sorte que cela puisse servir sa cause. Elle pense comprendre Serena, elle est persuadée que Serena fera passer cette enfant avant elle-même. Elle croit en elle, elle croit qu'elle fera ce qu'il faut.

Certains personnages vont aller à Washington, qui est une version plus violente et plus orthodoxe de Gilead. Quel effet cela aura-t-il sur June ?

Il y a quatre choses qui se passent dans l'épisode 6 qui la poussent vers la seconde moitié de la saison, mais je ne peux pas trop en dévoiler, je ne veux pas vous gâcher la découverte, mais ce que je peux vous dire, c'est qu'elle réalise que Gilead peut devenir encore bien pire et que c'est aussi à ce moment qu'elle se rend compte que l'horloge tourne et que si elle doit agir, il faudra agir vite.

Et ce nouveau costume ?

C'est très brutal à voir et en tant que Lizzie, en tant productrice, j'ai une tolérance très élevée pour les choses vraiment insoutenables et j'ai tenu à faire en sorte qu'on le voit le plus longtemps possible à l'écran. Je voulais que ce soit une image marquante.


Comment les événements actuels [la menace du retour des lois anti-avortement dans plusieurs Etats des Etats-Unis] résonnent avec votre interprétation du personnage de June ?

La série est un bon exutoire pour exprimer des choses que je ressens à titre personnel. J'espère que les gens ne se contenteront pas d'en parler et qu'ils vont utiliser ce sentiment de peur provoqué par la série et l'impression terrifiante que c'est finalement très pertinent pour passer à l'action.

Comment trouvez-vous l'équilibre entre votre rôle de productrice et votre travail d'interprète de June ?

Les deux se complètent et l'actrice et la productrice avancent vraiment main dans la main, surtout maintenant, après trois saisons. Je dirais que mon rôle de productrice prend une place beaucoup plus importante – ce qui est un peu dingue car je suis quasiment dans toutes les scènes – car c'est un rôle que je tiens en permanence, ça ne s'arrête pas après les quatorze heures de plateau par jour, c'est donc quand même beaucoup plus difficile !

Nous avons vu que les Marthas et les Handmaids commençaient à s'allier. Avez-vous l'impression que c'est aussi le cas dans la vraie vie, que les femmes se serrent les coudes au-delà de leurs différences (de classe sociale, de couleur de peau, etc.) ?

Je crois, oui. Même si leurs vies sont très différentes, si elles ne viennent pas du même endroit ou si elles ont eu des expériences diamétralement opposées, les femmes arriveront toujours à se rassembler autour d'une cause. Il y a un accord sur les choix, la liberté et les droits qui les unit. C'est le cas à Gilead : même si leurs parcours sont différents et qu'elles n'ont pas nécessairement les mêmes objectifs, elles savent qu'elle veulent avoir le choix. Quant à celles qui sont complice du systèmes, leur complicité et leur complaisance constituent une véritable trahison.

Le teaser de l'épisode 5, disponible à partir du 20 juin sur OCS :