"Terrifier 3": c'est quoi ce film d'horreur interdit aux moins de 18 ans?

Des scènes de mise à mort insoutenables où le sang coule à flot, des malaises et des vomissements lors d'une avant-première britannique... Le film d'horreur Terrifier 3 débarque en salles ce mercredi nimbé d'un parfum de scandale. Troisième volet des aventures d'un tueur en série pervers baptisé Art le Clown, ce long-métrage est le premier film d'horreur en vingt ans à être interdit aux moins de 18 ans en France.

Terrifier 3 est tombé sous le couperet du décret du 23 février 1990, qui interdit aux mineurs les œuvres comportant "des scènes de sexe non simulées ou de très grande violence". Si Nymphomaniac - Volume 2 ou Love ont été visés, aucun film d'horreur depuis Saw 3 en 2006 n'a écopé de cette sentence. Même le très dur Martyrs y avait échappé en 2008 et avait pu sortir avec une interdiction aux moins de 16 ans.

Le déjà très gore Terrifier 2, sorti début 2023 en France, avait de son côté obtenu une interdiction aux moins de 16 ans. Et le troisième volet avait décroché lors du premier examen par le Comité de classification une interdiction aux moins de 16 ans sans avertissement. Comment expliquer cette différence de traitement? Et ce revirement? Sûrement le sort réservé aux enfants dans Terrifier 3.

La mise à mort face caméra d'enfants ou d'adolescents est considérée comme l'un des plus grands tabous du cinéma. Et dès les premières minutes de Terrifier 3, un adolescent est retrouvé décapité sur son lit. Dans une autre scène, Art le clown, qui se fait passer pour un Père Noël de supermarché, fait exploser un groupe d'enfants avec des cadeaux piégés. Un plan montre un cadavre d'enfant au visage explosé.

"Film d'auteur"

Si l'interdiction de Terrifier 3 vient confirmer l'ambition du créateur de la licence Damien Leone, qui avait affirmé en 2023 vouloir faire de ce nouvel opus "le plus effrayant et le plus sombre de la trilogie", la décision de la Commission de classification "va gravement nuire à la sortie du film, pourtant attendue par des dizaines de milliers de spectateurs français", ont déploré vendredi dernier ses distributeurs français.

"L'histoire du cinéma de genre, ses excès et ses outrances, sont intimement liés à l’histoire même du cinéma", poursuivent dans leur communiqué les équipes ESC Éditions, Shadowz Films et Factoris Films. "Restreindre son accès aux spectateurs sera toujours une décision grave au message inquiétant, isolant les auteurs en les éloignant de leur public".

"Film d'auteur", Terrifier 3 s'adresse "à un public cinéphile, passionné, respectueux des œuvres et des salles qui les diffusent", poursuivent encore ses distributeurs. Avec environ 110 copies et des séances essentiellement le soir, la vie en salles de Terrifier 3 risque cependant d'être brève sans un soutien du public. D'autant que le moindre débordement en salles pourrait conduire à la déprogrammation du film.

Violence grand-guignolesque

Conçu avec un minuscule budget de 2 millions de dollars, Terrifier 3 propose des scènes d'une violence "parfaitement 'grand-guignolesque' et irréaliste", insistent ses distributeurs français. "Le film ne se prend jamais au sérieux, et nous savons que les spectateurs auront toute la distance, toute la maturité nécessaire pour comprendre et appréhender cette démarche artistique."

Certes impressionnantes et cruelles, les scènes de Terrifier 3 sont souvent excessives dans leur traitement. Le sang y est volontairement rouge vif, comme pour accentuer leur dimension cartoonesque. Les cadavres ressemblent à des mannequins. Avec ses mimiques puériles, Art le Clown est lui-même dans une outrance parfois grossière. Un décalage comique qui peut susciter le rire chez certains spectateurs.

Une formule que le créateur de la licence, Damien Leone, développe depuis une décennie. Cette nouvelle figure du cinéma d'horreur indépendant américain, fan du genre depuis ses 3 ans, a créé dans les années 2000 Art le Clown. Ce personnage à l'humour sadique et tordu apparaît dans plusieurs courts-métrages, réunis en 2013 dans le film à sketches All Hallow's Eve.

Scie à métaux

Fort de ce premier succès, Damien Leone développe un premier long-métrage avec le concours du producteur Phil Falcone. Il le finance grâce à une campagne de financement participatif. Réalisé avec seulement 35.000 dollars, Terrifier rencontre un certain succès et rapporte 416.000 dollars. Une scène désormais célèbre impliquant une scie à métaux achève d'en faire un film culte.

Une suite est aussitôt lancée, toujours grâce au financement participatif. En salles en octobre 2022 aux États-Unis, Terrifier 2 transforme l'essai. Produit pour 250.000 dollars, il en rapporte 15,7 millions. Malgré les moyens réduits, un autre morceau de bravoure horrifique marque les esprits, inspiré par un livre sur Jack l'éventreur. On y voit une femme être écorchée vive.

Terrifier 3 propose lui aussi une scène horrifique d'anthologie où Art le Clown découpe membre par membre à l'aide d'une tronçonneuse un couple en plein ébat sexuel sous une douche. Une scène qui repousse les limites et place le public dans une position d'extrême inconfort. Lors de l'avant-première au Royaume-Uni, des spectateurs ont vomi avant de quitter la salle. Des sacs avaient d'ailleurs été distribués à cet effet.

Défi de regarder

Ce spectacle d'une cruauté sans limite, marque de fabrique de la franchise, vient satisfaire des fans d'horreur rarement rassasiés. Dans sa critique du second volet, Le Monde résumait en ces termes la réussite de la licence Terrifier: "C'est dans la quête d'une sorte de pureté, l'expression d'une essence même de l'horreur, que réside la beauté de l'œuvre de Damien Leone (...) La cruauté, ici, est sans explication, et la pulsion y est à vif."

Un nihilisme qui renoue avec l'aspect crapoteux des films d'horreur des années 1970 et 1980. Et qui contribue à la renommée de la saga tout en mettant le public au défi de regarder ces films sans se couvrir les yeux. Un défi que de nombreux utilisateurs de TikTok pourrait se lancer - et qui pourrait contribuer à faire de Terrifier 3 le plus grand succès de la licence malgré son interdiction aux mineurs.

Article original publié sur BFMTV.com