TDAH : quels symptômes et quelle prise en charge chez l’adulte ? Les réponses d’une neuropsychologue

Chez l’adulte, les symptômes du trouble déficit de l’attention avec hyperactivité (TDAH) varient de ceux observés chez l’enfant.
Westend61 / Getty Images/Westend61 Chez l’adulte, les symptômes du trouble déficit de l’attention avec hyperactivité (TDAH) varient de ceux observés chez l’enfant.

DIAGNOSTIC - Dans l’imaginaire collectif, il est souvent associé à l’image d’enfants turbulents et bruyants, incapables de rester en place. C’est pourtant une idée erronée de ce qu’est le TDAH (trouble déficit de l’attention, avec ou sans hyperactivité). Il est certes dépisté majoritairement chez les enfants, mais peut aussi persister à l’âge adulte.

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La prévalence de ce trouble du neurodéveloppement est estimée à 2,8 % des plus de 18 ans par la Haute Autorité de santé (HAS). « 15 % des enfants atteints de TDAH continueraient à présenter des caractéristiques cliniques qui répondraient aux critères de diagnostic à l’âge de 25 ans », précise l’instance de santé dans une note datant de 2021.

Quels sont les symptômes du TDAH chez l’adulte ? Comment poser un diagnostic et pour quel traitement ? Réponses de Laura Geati, neuropsychologue installée à Paris.

Le HuffPost. Quels sont les symptômes les plus courants du TDAH chez l’adulte ?

Laura Geati. Comme chez l’enfant, le TDAH a, chez l’adulte, une origine neurobiologique : les patients qui en souffrent ne produisent pas assez de dopamine, une hormone qui permet de maintenir le niveau de motivation et donne la sensation que l’on fait quelque chose d’agréable sur le moment.

Ce sont principalement les problèmes de déficit d’attention au travail qui mettent la puce à l’oreille. On peut lister quatre grandes catégories. D’abord, la difficulté d’attention soutenue : un adulte souffrant de TDAH va avoir tendance à procrastiner dans ses tâches, à être distrait car il est difficile pour lui d’ignorer les stimuli externes. Ensuite, le déficit de mémoire à court terme, qu’on appelle la mémoire de travail, et qui se traduit par des étourderies ou des difficultés à se souvenir des conversations, des rendez-vous. Les adultes TDAH ont aussi des difficultés à planifier les activités de la vie quotidienne, peinent à terminer les tâches qu’ils ont entamées et ont une faible conscience du temps. Enfin, il faut relever la perte fréquente d’objets.

Le TDAH peut-il se manifester de manière subtile chez les adultes, sans hyperactivité apparente ?

Il existe plusieurs types de TDAH : avec une prédominance impulsivité et/ou hyperactivité et une forme combinée. L’hyperactivité se manifeste aussi à l’âge adulte, mais sous une autre forme que chez l’enfant. L’adulte possède une maturité intellectuelle qui lui permet d’inhiber certains traits que l’on peut observer à l’enfance, comme les mouvements, les cris…

Chez l’adulte, l’hyperactivité se manifeste surtout sous la forme de troubles exécutifs listés plus haut, mais aussi sous la forme d’une nervosité interne, d’une impulsivité. Pour éviter cela, les adultes TDAH développent des stratégies d’évitement, afin d’esquiver les situations où ils doivent rester immobiles comme les cours, les réunions, les files d’attente… Cela leur demande beaucoup d’effort et donc d’énergie. Enfin, l’hyperactivité peut aussi prendre la forme d’un manque d’inhibition : il leur arrive fréquemment de couper la parole, de se mettre en avant pour pouvoir sortir de cette agitation interne. Cela peut occasionner des problèmes relationnels avec leur entourage, qui leur reproche de se comporter de manière immature.

Comment le TDAH est-il diagnostiqué chez l’adulte ?

Le diagnostic est multidisciplinaire. En cas de soupçon de TDAH, par exemple en cas de problèmes de concentration, un adulte peut consulter un psychiatre ou un neurologue, qui redirigera ensuite vers un neuropsychologue pour effectuer un bilan complet. Ce bilan comprend une anamnèse, c’est-à-dire un retour sur les répercussions des troubles sur la vie quotidienne, et l’administration des tests, qui servent à évaluer le niveau d’attention et à indiquer quel type de TDAH le patient présente. À titre personnel, je fais aussi un test de QI car des études ont montré le lien entre haut potentiel intellectuel et TDAH.

Les adultes diagnostiqués tardivement avec un TDAH sont-ils nombreux ?

Oui. Jusqu’à récemment, ce trouble était mal connu du grand public et donc moins bien diagnostiqué. Les adultes souffrant de TDAH se sont vus reprocher durant leur enfance d’être dans la lune, d’être trop agités ou turbulents… Ces adultes se sont souvent sentis différents durant leur enfance, ont beaucoup culpabilisé de ne pas réussir à être plus efficaces ou de ne pas maîtriser leur impulsivité. Cela a pu engendrer chez eux de la souffrance, qui se manifeste par une faible estime de soi, un trouble anxieux, un état dépressif ou un épuisement professionnel. Faire un bilan neuropsychologique leur permet de se comprendre, d’agir sur leurs symptômes et de recouvrer de la confiance en soi.

Quelle est la prise en charge du TDAH chez l’adulte ?

La prise en charge associe psychothérapie et, si nécessaire, traitement médicamenteux. En France, il existe quatre médicaments autorisés, qui augmentent les niveaux de dopamine pendant 8 à 12 heures : la Ritaline, le Concerta, le Quasym et le Medikinet. Hormis dans les formes les plus sévères, le traitement médicamenteux n’est pas recommandé en première intention. Mais il va permettre aux adultes qui en bénéficient de mieux se concentrer sur leurs tâches car il inhibe temporairement les symptômes. Ces médicaments ne sont pas addictifs et peuvent être momentanément arrêtés momentanément, par exemple pendant les vacances ou hors des périodes scolaires.

Quant à la psychothérapie, elle comprend deux volets : d’abord la remédiation cognitive, pour donner aux patients des stratégies comportementales et ainsi diminuer l’impact du TDAH sur leur quotidien. Mais il est aussi primordial de les accompagner psychologiquement pour comprendre comment ce trouble a pu encombrer leur vie et travailler sur leur manque d’estime de soi.

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