Tanzanie: une manifestation de l'opposition bloquée, multiples arrestations
La police tanzanienne a brièvement arrêté lundi plusieurs figures de l'opposition et empêché une manifestation de leur parti à Dar es Salam, dernier épisode de l'intensification de la répression politique dans ce pays d'Afrique de l'Est.
Malgré l'interdiction des autorités, le principal parti d'opposition, Chadema, avait appelé à une manifestation après le meurtre d'un de ses dirigeants, Ali Mohamed Kibao, enlevé par des hommes armés et retrouvé mort le 7 septembre.
Mais la police anti-émeute a été déployée à travers la ville avec des canons à eau pour empêcher les rassemblements, et le président de Chadema, Freeman Mbowe, et son adjoint, Tundu Lissu, ont été rapidement arrêtés, avec des dizaines d'autres personnes.
"Nous sommes surpris par l'ampleur de la force utilisée par la police pour menacer les gens et réprimer notre liberté", a déclaré M. Mbowe à ses partisans avant d'être emmené par la police, selon une vidéo partagée par le parti en ligne.
En fin de journée, le parti a annoncé sur X que MM. Mbowe et Lissu et au moins une autre personnalité du parti avaient été libérés sous caution. Il a ajouté que Freeman Mbowe avait "décidé de rester au poste de police jusqu'à ce que tous les autres membres et sympathisants arrêtés lors de la manifestation soient libérés sous caution".
Chadema accuse la présidente, Samia Suluhu Hassan, de revenir aux pratiques autoritaires de son prédécesseur John Magufuli, après avoir montré des signes d'ouverture démocratique à son arrivée au pouvoir en mars 2021, en rouvrant rapidement, par exemple, des médias interdits.
Il accuse également les forces de sécurité d'être impliquées dans plusieurs récentes disparitions d'opposants, et dans le meurtre d'Ali Mohamed Kibao.
Outre MM. Mbowe et Lissu, deux figures politiques nationales, Chadema avait annoncé dans l'après-midi que "plusieurs leaders des régions côtières et plus de 40 membres du parti", ainsi que des employés de son siège, avaient également été interpellés.
Plus tôt, le commandant de la police Jumanne Muliro avait fait état de 14 arrestations au total.
En août, la répression avait été encore plus importante lorsque le parti a tenté d'organiser un rassemblement pour la journée de la jeuness. Mbowe et Lissu, déjà, ainsi que des centaines d'autres personnes, avaient été arrêtés, puis libérés quelques jours plus tard.
- "Le prix de la démocratie" -
Les groupes de défense des droits humaines et les gouvernements occidentaux, y compris les États-Unis, ont critiqué l'intensification de la répression à l'approche des élections locales de novembre et générales de fin 2025.
La police avait affirmé que la manifestation prévue lundi serait violente. Mais dans un discours diffusé sur X dimanche, M. Mbowe a indiqué que son parti souhaitait des "manifestations pacifiques". "Nous ne portons pas d'armes et nous n'avons pas l'intention de violer la paix comme certains le prétendent".
"Au cas où certains d'entre nous seraient arrêtés, blessés ou même tués, priez pour nous et ne faites jamais marche arrière. Nous faisons cela pour faire de notre pays un endroit paisible où il fait bon vivre", a-t-il ajouté.
Freeman Mbowe a été arrêté lundi matin alors qu'il s'adressait à des journalistes dans le quartier de Magomeni, l'un des points de départ prévus pour la manifestation, selon une vidéo postée par Chadema sur les réseaux sociaux. "Voici le prix de la démocratie dans notre pays", a-t-il lancé alors que des policiers l'emmenaient.
L'arrestation de son adjoint Tundu Lissu, dont la maison dans la banlieue de Dar es Salaam avait été encerclée par la police, avait été annoncée un peu plus tôt.
Le Chademo compte 20 députés au parlement, contre 365 au parti présidentiel Chama Cha Mapinduzi (CCM) - dénonce une répression croissante à son égard. Le CCM est au pouvoir depuis l'indépendance du pays d'Afrique de l'Est en 1961.
Après le meurtre de M. Kibao, l'ambassade américaine en Tanzanie a notamment demandé "une enquête indépendante, transparente et rapide".
"Nous n'avons pas à recevoir des directives sur ce que nous devons faire dans notre propre pays", avait rétorqué mardi dernier Samia Suluhu Hassan. "Après le bon travail des réformes, nous ne tolérerons aucun acte qui provoquerait des troubles dans notre pays", a-t-elle lancé.
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