Tangage dans la majorité, qui veut reprendre la barre

Le départ annoncé du gouvernement de Gérard Collomb s'est ajouté mardi à la liste des écueils déjà nombreux pour la majorité en cette rentrée mouvementée où Emmanuel Macron tente de regagner du terrain en étoffant le volet social de sa politique. /Photo prise le 12 septembre 2018/REUTERS/Gonzalo Fuentes

par Elizabeth Pineau

PARIS (Reuters) - Le départ annoncé du gouvernement de Gérard Collomb s'est ajouté mardi à la liste des écueils déjà nombreux pour la majorité en cette rentrée mouvementée où Emmanuel Macron tente de regagner du terrain en étoffant le volet social de sa politique.

Tandis qu'Assemblée, les députés La République en marche (LaRem) élisaient Gilles Le Gendre à la présidence de leur groupe parmi sept candidats, le chef de l'Etat présentait son plan sur la santé, après celui contre la pauvreté.

Une offensive sur le front social dans une période chaotique marquée par des sondages en berne et les soubresauts de "l'affaire" Alexandre Benalla, qui sera entendu mercredi par une commission d'enquête au Sénat.

Mardi, au Palais-Bourbon, l'opposition tentait de capitaliser sur le départ annoncé de Gérard Collomb en vue des élections locales de 2020 à Lyon, alors que le gouvernement se remet à peine du départ surprise de Nicolas Hulot et Laura Flessel.

Outre Gérard Collomb, d'autres ministres ne cachent leurs ambitions pour les élections municipales, comme Benjamin Griveaux et Mounir Mahjoubi à Paris.

"TITANIC"

"Le navire prend l'eau" a considéré le député LR Eric Ciotti, reprenant à son compte la comparaison avec le Titanic utilisée par la députée Frédérique Dumas, qui vient de quitter LaRem pour le groupe UDI, Agir et Indépendants.

"Le Titanic dont j'ai parlé c'est la France, les passagers ce ne sont pas les députés, ce sont les Français. Aujourd'hui on est assez loin du port d'arrivée, c'est important de dire qu'il y a des choses qui ne vont pas", a-t-elle expliqué devant la presse. "S'il y a tangage c'est qu'il y a dysfonctionnement. On est suffisamment tôt dans le mandat pour lancer un coup de semonce et dire qu'il faut que l'on travaille autrement."

Sans forcément lui donner raison, des députés de la majorité disent être conscients de la nécessaire cohésion du groupe pour mettre en oeuvre la politique d'Emmanuel Macron et éviter les discordances qui ont, par exemple, émaillé les débats sur l'immigration et l'interdiction du glyphosate dans les champs.

Ou encore, récemment, l'idée d'une réforme des droits de succession avancée par certains députés et le délégué général de LaRem, Christophe Castaner, mais contrée par l'Elysée.

"Il faudra débattre davantage entre nous en amont sur des sujets difficiles à venir comme les retraites, la bioéthique ou la PMA (procréation médicalement assistée-NDLR)", souligne un député.

Elu nouveau "patron" du groupe LaRem à une majorité confortable, le consensuel Gilles Le Gendre devrait se mettre dans les pas de Richard Ferrand dont il fut le bras droit, dans un tempo calqué sur celui de l'exécutif, avec le souci constant d'éviter les vagues.

"Nous sommes absolument unis maintenant pour aller de l'avant, pour soutenir le programme de réformes du président de la République et du gouvernement", a-t-il dit devant la presse à l'Assemblée, promettant de "nouvelles pratiques" en interne.

Il devra aussi mieux considérer ses alliés du MoDem, qui se sont parfois sentis oubliés et dont le chef de parti, François Bayrou, réclame un cap dans les réformes.

"SE PARLER VRAIMENT"

"Aujourd'hui le groupe s'est émancipé, les gens sont installés", a dit à Reuters le député LaRem Jean-Baptiste Djebbari, pour qui "une nouvelle phase s'ouvre" dans un quinquennat où "tout le monde a envie de faire une bonne deuxième année".

Membre du pôle "social" dont la cheffe de file Brigitte Bourguignon n'a recueilli que 19 voix lors du scrutin interne, sa collègue Sonia Krimi prône un dialogue approfondi.

"Il faut se parler vraiment et ne pas se contenter de donner des os à ronger aux députés en disant 'tiens, occupe-toi de ce rapport'", a-t-elle dit à Reuters.

"Ce que Frédérique Dumas a dit, je le signe, mais ma place est dans la majorité", a-t-elle dit.

Comme elle, nombre de députés LaRem ont regretté qu'aucune femme - qui constituent la moitié du groupe - n'ait accédé à la présidence de l'Assemblée, ni à celle du groupe.

"A chaque fois qu'on arrive sur des sujets non pas techniques mais de positionnement politique resurgit cette idée d'un plafond de verre pour les femmes", a souligné la présidente du groupe Socialistes et apparentés, Valérie Rabault, qui demeure la seule représentante de la gent féminine à ce poste.

(Elizabeth Pineau)