"La tête un peu ailleurs" : entre flottement et "loupés", la rentrée compliquée d'Emmanuel Macron

Le président français Emmanuel Macron au Palais de l'Elysée, à Paris, le 1er septembre 2022 - Ludovic MARIN / AFP

Dans l'entourage d'Emmanuel Macron, on s'inquiète d'un président qui peine à reprendre la main ces dernières semaines, accusant une baisse de moral. "Il est fatigué et navigue à vue, sans idée précise", décrypte un cadre de la majorité, en pointant la succession de mauvaises séquences depuis l'été.

Emmanuel Macron a-t-il encore envie ? Les cafouillages ne cessent de s'enchaîner pour le président, semblant atteindre son moral, inquiétant jusqu'à ses fidèles.

"Il a la tête un peu ailleurs en ce moment", avance auprès de BFMTV.com un député qui le connaît bien pour justifier le flottement des dernières semaines.

"Loupé" pour "tout faire proprement"

Après un début de mandat jugé raté, entre un casting à Matignon qui a duré des jours, l'épisode catastrophique du Stade de France et l'affaire Abad, le chef de l'État comptait bien reprendre la main à la rentrée.

"Je nous voyais tout blinder et tout faire proprement. Et bah, c'est loupé", lâche, sévère, un sénateur macroniste.

En pleine polémique sur les jets privés et alors que la France subit le second été le plus chaud de son histoire, entre sécheresse record et méga-feux en Gironde, Voici sort au mois d'août des photos du chef de l'État en train de faire du jet ski à quelques encablures du Fort de Brégançon. De quoi donner du grain à moudre à la gauche, de Sandrine Rousseau à Clémentine Autain.

"Le symbole n'était pas bien choisi. Qu'il ne le comprenne pas me laisse un peu sans voix et m'inquiète sur ce qui se passe dans sa tête'", alerte un ancien élu Renaissance.

Zigzags de langage

Le patron du MoDem, François Bayrou, a beau monter au créneau sur BFMTV pour défendre le locataire de l'Élysée, dénonçant une "polémique absolument ridicule", il est l'un des rares au sein de la majorité à le défendre publiquement.

Une dizaine de jours après ces photos, le président reprend le chemin de Paris. Pour son premier Conseil des ministres de la rentrée, Emmanuel Macron annonce gravement "la fin de l'abondance" et "de l'insouciance pour ceux qui en avaient encore", mettant en garde les Français face à la "grande bascule que nous vivons".

Mais moins d'une semaine après ces propos à la tonalité grave, l'exécutif change de partition. À la sortie du Conseil de défense et de sécurité nationale sur l'énergie le 2 septembre, Agnès Pannier-Runacher, la ministre de la Transition énergétique, se finalement veut très rassurante.

"Il navigue à vue"

Quatre jours plus tard, Emmanuel Macron tente également d'arrondir les angles lors d'une conférence de presse. Il incite alors les Français à "économiser 10% de ce que l'on consomme habituellement", un objectif "faisable par une série de gestes simples".

"On pouvait reprocher beaucoup de choses au président mais avant, il savait où il voulait aller. Là, j'ai l'impression qu'il est fatigué et qu'il navigue à vue, sans idée précise", décrypte un cadre de Renaissance, qui s'inquiète de cette stratégie de la godille.

De quoi pousser ses lieutenants à faire entendre leur propre partition. La Première ministre Élisabeth Borne ouvre ainsi la porte à une taxe sur les super-profits pendant l'été tandis que le patron de Bercy Bruno Le Maire s'y oppose fermement. Emmanuel Macron tente bien de clore le sujet en soutenant un dispositif européen. Mais plusieurs députés se voient malgré tout tenter de remettre le sujet sur la table pendant le budget 2022.

"Le bide" du Conseil national de la refondation

Dernier épisode qui montre le malaise du président: le Conseil national de la refondation qu'il envisageait comme "une nouvelle méthode démocratique" pour permettre de lancer - enfin - son second quinquennat.

Boycott des oppositions, scepticisme de sa propre majorité... Le dispositif a du plomb dans l'aile dès le lancement, jeudi 8 septembre. Pire encore : alors qu'Emmanuel Macron espérait que les conclusions de la journée donnent envie à certains absents à participer à la seconde édition, la reine Elizabeth II meurt. De quoi faire passer les travaux du CNR sous le radar.

"Il misait beaucoup dessus pour rebondir et avoir de l'allant. Ça finit en bide déprimant. Forcément, ça pèse sur le moral", avance encore un conseiller ministériel.

Dans les rangs de l'exécutif, on mise beaucoup sur l'arrivée de l'ancien lobbyiste Frédéric Michel comme conseiller spécial en communication et en stratégie auprès du président. "Est-ce qu'un seul homme peut lui remonter le moral et lui redonner envie de mouiller la chemise, j'espère", tente de positiver un élu. Sans trop y croire.

Article original publié sur BFMTV.com

VIDÉO - Jean-Michel Aphatie : "Le nouveau gouvernement montre les limites d'Emmanuel Macron"