Télétravail : de « nouveaux risques » psychosociaux pointés du doigt

Le guide « télétravail : de nouveaux risques, une prévention à adapter » va être distribué à quelque 6.000 entreprises publiques et privées.
10'000 Hours / Getty Images Le guide « télétravail : de nouveaux risques, une prévention à adapter » va être distribué à quelque 6.000 entreprises publiques et privées.

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Le guide « télétravail : de nouveaux risques, une prévention à adapter » va être distribué à quelque 6.000 entreprises publiques et privées.

DISTANCE - Le télétravail est porteur de « risques importants sur le plan psychosocial » et requiert une « vigilance » dans la durée, a prévenu mercredi 14 septembre la Fédération des intervenants en risques psychosociaux (FIRPS), en présentant un guide pratique pour une meilleure prévention.

Avec ce mode d’organisation qui s’est massivement développé avec le Covid, « au début, on ne trouve que des avantages, et les inconvénients potentiels (...) ont tendance à se distiller tout doucement, ce qui fait qu’ils vont être difficiles à déceler », a expliqué François Cochet, le président de la fédération, lors d’un point presse.

« Non seulement, peut-être que l’entreprise ne va pas les déceler, mais la personne elle-même risque de ne pas s’en apercevoir » à l’image de « la grenouille qu’on trempe dans l’eau tiède et puis on rajoute de plus en plus d’eau chaude jusqu’à ce qu’elle meure... », a poursuivi le responsable de la FIRPS, qui rassemble 23 cabinets spécialisés (Secafi, Stimulus, Qualisocial, Eléas...).

Accueil des nouveaux arrivants

Avec l’éloignement, des salariés pas au fait des nouveautés dans l’entreprise peuvent par exemple progressivement se trouver « disqualifiés », tandis que de nouveaux arrivants peuvent ne pas parvenir à trouver des repères, « autre point de vigilance extrême », a-t-il listé. « Le télétravail a grandement réduit les interactions informelles autour de la machine à café, pourtant vitales à l’intégration d’un nouvel arrivant », est-il souligné dans le guide.

Parmi les écueils du télétravail, d’autres intervenants de la fédération ont aussi cité les problématiques liées à la charge de travail, la déconnexion, ou encore de « nouvelles formes de conflits » plus complexes parce que les interactions ont changé.

Le fait de permettre aux collaborateurs de maintenir des espaces/des temps d’échanges informels est également essentiel pour prévenir les conflits, a fortiori, quand la distance accentue les malentendus. « La multiplication des réunions en visioconférence et des échanges par mails favorise les tensions et donc l’émergence de conflits, est-il rappelé. Or, en télétravail comme au bureau, un conflit se règle en tête à tête, sinon de visu, du moins par téléphone pour éviter l’escalade. »

Accentuer les inégalités de genre

Autre point de vigilance : le travail domestique étant toujours assumé à plus des deux tiers par les femmes, « le télétravail peut accentuer les inégalités de genre », prévient le guide.

« Le télétravail peut effectivement aider les femmes à mieux s’organiser, souligne-t-il. Mais il peut aussi les piéger en faisant reposer toute l’organisation familiale sur leurs épaules. Elles se retrouvent alors prisonnières de leur domicile et de leur double journée de travail, sujettes à une charge mentale augmentée. »

Une étude du Boston Consulting Group menée en 20212 vient appuyer ce point par une conclusion, signifiant que le télétravail « tend à pénaliser plus les femmes » tant au niveau de l’espace à disposition, que des interruptions ou d’une possible augmentation des tâches ménagères.

Autre point de vigilence, selon la Fédération, « toutes les addictions augmentent en télétravail » : numérique, tabac, alcool, drogue, médicaments, ou encore workaholisme. 60% des professionnels de services de santé au travail déclarent que le télétravail est un facteur de risque sur les consommations de substances psychoactives.

Des signes difficiles à déceler

Il est plus difficile, à distance, de déceler la détresse d’un salarié. « Des formes de surinvestissement ou, au contraire, de désengagement, un changement de rythme de travail, des erreurs inhabituelles, une surréactivité aux appels ou aux mails, de l’isolement, une fatigue générale, de nouvelles peurs… » liste le guide, sont autant de signes qui doivent être perçus et interprétés comme révélateurs d’un véritable mal-être.

Le risque est aussi que le salarié en souffrance reste silencieux, car « quand on gagne deux heures de trajet matin et soir, l’avantage est tellement considérable que si on n’est pas bien, on aura tendance à se le dissimuler à soi-même et si on est conscient, à ne pas le dire », a insisté François Cochet, le président de la fédération, lors du point presse.

La mise en place d’une « phase d’expérimentation, suivie de l’élaboration d’un bilan, testée dans certaines entreprises », est selon le guide de nature à permettre d’identifier les facteurs clés de succès, au regard des spécificités de l’entreprise.

Prévention

Le guide « télétravail : de nouveaux risques, une prévention à adapter » va être distribué à quelque 6.000 entreprises publiques et privées. Articulé en neuf chapitres (règles et principes, rôle du manager, droit à la déconnexion...), il fournit une série de recommandations, même si les experts soulignent que la « révolution du travail » née de la pandémie n’a pas encore montré toutes ses conséquences.

Selon les données de la direction des statistiques du ministère du Travail (Dares), publiées en avril, 21% des salariés avaient été au moins un jour en télétravail le mois précédent. Selon une autre étude, réalisée par Bpifrance et dévoilée ces derniers jours, 46 % des TPE-PME avaient adopté sa pratique fin décembre 2021, contre 27 % avant 2020.

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