Syrie: des milliers de personnes dans les rues pour fêter "la victoire de la révolution"
Des milliers de Syriens sont descendus ce vendredi 13 décembre dans les rues, à travers le pays, répondant à l'appel du chef de la coalition armée qui a pris le pouvoir à Damas, Abou Mouhammad al-Jolani, pour fêter la "victoire de la révolution" après la chute, dimanche, du régime de Bachar al-Assad.
"Je veux féliciter le peuple syrien pour la victoire de la révolution et je les appelle à descendre dans les rues pour exprimer leur joie", a déclaré Abou Mouhammad al-Jolani, qui se fait appeler désormais de son vrai nom, Ahmad al-Chareh.
A l'issue d'une offensive de 11 jours, la coalition rebelle dominée par son groupe islamiste sunnite radical Hayat Tahrir al-Sham (HTS) s'est emparée dimanche de Damas, mettant fin à un demi-siècle de pouvoir de la famille Assad.
Une "joie indescriptible"
A la mi-journée, à Damas, la capitale, Alep, dans le nord, ou Soueida, dans le sud, des milliers d'hommes, femmes et enfants, convergent dans les centres. L'ambiance est à la fête, beaucoup brandissent le drapeau à trois étoiles, symbole du soulèvement de 2011, adopté par les nouvelles autorités.
"Les Assad père et fils nous ont oppressés mais nous avons libéré notre pays de l'injustice", s'enthousiame à Alep un policier de 47 ans, tandis qu'une sono diffuse slogans et chants.
"Notre joie est indescriptible", s'exclame Haitham Houdeifa, 54 ans dans le fief druze de Soueida, théâtre de manifestations anti-Assad depuis un an et demi. "Uni, uni, uni, le peuple syrien est uni", scandent les fidèles à la célèbre mosquée des Omeyyades à Damas où est attendu Abou Mouhammad al-Jolani pour la prière hebdomadaire.
Mais la liesse est aussi teintée de gravité: sur les murs de la mosquée, des dizaines de photos de personnes disparues aux mains des anciens services de sécurité sont accrochées, témoignant de la douloureuse quête de proches menée par de nombreux Syriens après des décennies de féroce répression.
De nombreux défis
Le pays, multiethnique, multiconfessionnel et morcelé doit faire face à de nombreux défis, face auxquels les nouvelles autorités tentent de rassurer, et la communauté internationale se mobilise. HTS affirme avoir rompu avec le jihadisme mais reste classé "terroriste" par plusieurs capitales occidentales, dont Washington. Le chef de la diplomatie américaine, Antony Blinken, a jugé "impératif" de lutter contre la résurgence du groupe jihadiste Etat islamique (EI), lors d'une conférence de presse vendredi.
Le ministre israélien de la Défense, Israël Katz, a lui ordonné vendredi à l'armée de "se préparer à rester" tout l'hiver dans la zone tampon avec la Syrie à la lisière de la zone du plateau du Golan annexée par Israël après sa conquête en 1967, où elle est entrée, ce que l'ONU a condamné, après la victoire rebelle.
Israël a aussi mené ces derniers jours des centaines de frappes en Syrie contre des sites militaires stratégiques. Son objectif est que les équipements de l'armée syrienne ne tombent pas entre de "mauvaises mains", a déclaré Antony Blinken, mais Washington discute avec Israël "de la voie à suivre".
Le Premier ministre de transition, Mohammad al-Bachir, a appelé les Syriens exilés à rentrer, s'engageant à "garantir les droits de tous". Quelque six millions de Syriens, un quart de la population, ont fui le pays depuis 2011, quand la répression de manifestations prodémocratie a déclenché une guerre civile dévastatrice, qui a fait plus d'un demi-million de morts.
L'UE a annoncé vendredi le lancement d'un pont aérien humanitaire destiné à la Syrie, via la Turquie, après que le Programme alimentaire mondial (PAM) a lancé un appel urgent à des crédits de 250 millions de dollars pour y fournir "une aide alimentaire" en Syrie. L'ONU a recensé plus d'un million de nouveaux déplacés depuis le lancement de l'offensive rebelle