Syrie: des inscriptions laissées par des prisonniers dans une prison d'Assad effacées, les ONG s'indignent
Les ONG insistent sur la nécessité de préserver les "preuves des atrocités", parmi lesquelles des écrits laissés par les détenus sur les murs de leurs cellules. Des noms et des numéros de téléphone pour contacter les familles des prisonniers pouvaient y figurer.
Un vestige du passé. Des familles de disparus ont appelé les nouvelles autorités syriennes à protéger les preuves des crimes commis sous le règne de Bachar al-Assad, après que des inscriptions sur les murs d'une ancienne prison ont été recouvertes de peinture.
Des milliers de prisonniers ont été libérés après la chute d'Assad, chassé du pouvoir le 8 décembre par des rebelles islamistes, mais de nombreux Syriens continuent de chercher des traces de leurs proches disparus.
"Honteux"
Dans le chaos qui a suivi sa chute, alors que journalistes et familles se précipitaient dans les centres de détention, des documents officiels ont été laissés sans protection, parfois détruits ou volés.
Les ONG ont insisté sur la nécessité de préserver les "preuves des atrocités", parmi lesquelles des écrits laissés par les détenus sur les murs de leurs cellules.
Cependant, une vidéo semblant montrer des jeunes recouvrant des inscriptions avec de la peinture blanche et y apposant le nouveau drapeau syrien, ainsi que des représentations de chaînes brisées, a circulé sur les réseaux sociaux ces derniers jours, suscitant la colère de militants des droits humains.
"Peindre les murs des quartiers de sécurité est honteux, surtout avant le début des nouvelles enquêtes sur les violations des droits humains", a déclaré Diab Serriya, co-fondateur de l'Association des détenus et disparus de la prison de Saydnaya (ADMSP)
"C'est une tentative de détruire les traces de torture ou de disparition forcée et cela entrave les efforts pour collecter des preuves", a-t-il ajouté.
Contacts pour les familles
"Sur les murs, il y a des noms et des numéros de téléphone pour contacter les familles et les informer du sort de leurs enfants", a écrit sur Facebook Joumana Chtaioui, une Syrienne qui a été détenue dans trois prisons différentes sous Assad.
"Dans chaque nouvelle cellule, nous écrivions un souvenir pour que ceux qui suivaient puissent se souvenir de nous", a-t-elle ajouté.
Une pétition lancée mardi 14 janvier appelle les nouvelles autorités à mieux protéger les preuves et à accorder "la plus haute priorité" aux enquêtes sur le sort des disparus.
"Certains sont allés jusqu'à peindre les cellules, dissimulant leurs caractéristiques, ce qui, pour nous, représente un grand préjudice pour les détenus", ont déclaré les signataires, dont l'ADMSP.
La présidente du Comité international de la Croix-Rouge, Mirjana Spoljaric, a déclaré la semaine dernière que ce serait un "défi colossal" de déterminer le sort des disparus durant la guerre civile en Syrie.
Elle a précisé que le CICR suivait 43.000 cas, mais que ce chiffre était probablement bien inférieur au nombre total de disparus.
Plus de 100.000 personnes sont mortes en détention sous la torture ou en raison de conditions sanitaires précaires en Syrie depuis 2011, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH).