«Suspiria», un remake qui prend latex

Bâclée et informe, la nouvelle version du film de Dario Argento par Luca Guadagnino étale gêne et ennui sur deux heures et demie.

Retirez les couleurs et Jessica Harper, il ne reste à peu près rien du film d’Argento. Si, la musique. Mais pas un récit, à peine un conte. Suspiria 1977, c’était cette jolie comptine horrifique et criarde interdite aux moins de 16 ans. Sans les cris, les coloris et le baroque, sans le rouge sang, Suspiria 2018 est cet à peu près rien qui reste. Un film incolore mais étonnamment pédant, bien décidé à en remontrer, question histoire, à son devancier qu’il dit admirer (il ne va pas dire le contraire).

Gynécée. Luca Guadagnino bâcle par contrepied systématique, avec l’insolence appliquée des enfants gâtés, sans reculer devant le détour forcé, gênant, par la Shoah : cette épouse disparue dans un camp et ce vieux deuil impossible, comme le passé qui ne passe pas de l’Allemagne, affaire de sorcellerie, de souterrains maléfices, émanation de l’esprit troublé et hanté d’un vieillard - l’ensemble étant par ailleurs si fumeux et incompréhensible. Son gynécée aux ordres, Guadagnino déplace ses danseuses perdues ou disloquées aux quatre coins de plans fugaces, marronnasses. Parfois l’on voit les comédiennes fondre sous des couches de maquillage et de latex en vieillissement digne des masques de farces et attrapes (Tilda Swinton, on t’a reconnue). Suspiria est ce brouillard abstrus, anti-remake têtu, reconstitution moisie du Berlin-Ouest des années de plomb, avec l’école de danse pour jeunes filles qui abrite les sorcières et l’inconscient au sous-sol. Ce n’est ni filmé, ni monté, ni fait ni à contrefaire, à tel point qu’il est difficile de discerner le style du réalisateur de Call Me by Your Name sorti en début d’année, film dont on pensait peu de bien mais un peu, qu’on pouvait dire au moins «de bonne facture». Ici, quelle idée, quelle audace ? Signer un brûlot foufou, anarchique, désordonné, au gré de six «actes» occultes et ténébreux ? On se (...) Lire la suite sur Liberation.fr

«André Robillard» Le bon, le brut et le troublant
L’agent fait le bonheur
Au revoir
Orson Welles sort ses trips
Claire Denis: «Le film m’a permis d’imaginer la fin de l’humanité comme le devenir d’autre chose»