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Suicide de Lucas: que risquent les quatre adolescents jugés prochainement?

Un bouquet de fleurs déposé devant le collège Louis-Armand où était scolarisé Lucas à Golbey. - Frederick Florin / AFP
Un bouquet de fleurs déposé devant le collège Louis-Armand où était scolarisé Lucas à Golbey. - Frederick Florin / AFP

Ils ont 13 ans. L'un d'eux était même âgé de 12 ans lorsque les faits qui leur sont reprochés se sont produits. Quatre collégiens vont être jugés prochainement pour "harcèlement ayant entraîné un suicide" après la mort de Lucas, qui a mis fin à ses jours début janvier à l'âge de 13 ans.

L'infraction de "harcèlement ayant entraîné un suicide ou une tentative de suicide" a été créée par la nouvelle loi du 2 mars 2022. Si le harcèlement scolaire est puni de trois ans d'emprisonnement, lorsque l'infraction est aggravée la peine passe à 10 ans de prison et 150.000 euros d'amende.

Des "moqueries" à plusieurs reprises

Une enquête avait été ouverte pour "harcèlement" par le parquet d'Epinal après le suicide de Lucas, scolarisé au collège Louis-Armand à Golbey, dans les Vosges. Les proches du garçon évoquaient un harcèlement récurrent depuis septembre en raison de son homosexualité.

Au terme des investigations, auditions de camarades de classe, analyses des téléphones portables, des réseaux sociaux et du journal intime de la victime, la justice considère que des faits de harcèlement ont pu entraîner ce passage à l'acte.

"Lors de leurs auditions, les mis en cause, deux filles et deux garçons âgés de 13 ans, scolarisés dans le même établissement que Lucas, ont uniquement admis avoir proféré à plusieurs reprises des moqueries à l'encontre de leur camarade", a poursuivi le magistrat.

La loi française a mis en place un principe de discernement à partir de l'âge de 13 ans, c'est-à-dire que le mineur, à partir du moment de cet âge, est en capacité de comprendre les actes qu'il commet et d'en comprendre également les conséquences. Un principe qui comporte des exceptions et ce sera à un juge pour enfants du tribunal judiciaire d'Epinal de statuer.

"Justice réparatrice"

Une audience aura prochainement lieu pour déterminer les responsabilités et, si ces dernières sont reconnues par la justice, les sanctions à apporter à ces quatre mineurs. "Le tribunal pour enfants et la cour d'assises des mineurs ne peuvent prononcer une peine privative de liberté supérieure à la moitié de la peine encourue" par une personne majeure, est-il écrit dans le code de justice pénale des mineurs définissant l'excuse de minorité.

Ainsi, une peine peut être prononcée par un juge pour enfants si trois conditions sont réunies: que le mineur mis en cause soit âgé de 13 ans ou plus, si les circonstances et les faits le justifient et si le parquet a pris des réquisitions en ce sens. Le procureur d'Epinal a annoncé que les quatre mineurs qui seront convoqués devant un juge dans le cadre de l'enquête sur la mort de Lucas vont faire l’objet d’une évaluation par la protection judiciaire de la jeunesse avant leur jugement.

Cette mesure vise à apporter au magistrat des éléments sur la personnalité, la situation des mineurs et éventuellement une certaine dangerosité.

"La limite a été plus que franchie"

"La justice pénale des mineurs est très bien faite, analyse Me Laure Boutron-Marmion, avocate spécialisée dans les dossiers de harcèlement scolaire. (…) On a une bonne justice réparatrice, on a l’idée qu’on va faire primer l’éducatif sur le répressif. Quand on passe devant le tribunal pour enfant, on est jugé, mais comme on est face à un adulte en devenir, on estime qu’il faut trouver la bonne sanction. Les sanctions sont toujours teintées d’éducatif."

"La limite a été plus que franchie, poursuit l'avocate. Il faudra démontrer qu’ils (les quatre mineurs mis en cause, NDLR) en avaient conscience et il faudra une peine. Une peine assez forte mais il faudra l’accompagner d’un entourage avec un éducateur et on fera primer l’évolution du mineur."

Article original publié sur BFMTV.com