La stratégie de Jean-Luc Mélenchon met en péril la gauche, comme le montre cette étude
POLITIQUE - La conclusion ne manquera pas de nourrir les arguments de ceux qui, à gauche, appellent à rompre avec La France insoumise. Dans une vaste étude postélectorale réalisée par l’institut Ipsos pour Le Monde, la Fondation Jean Jaurès, le centre de recherches politiques de Sciences Po et l’Institut Montaigne, la stratégie du parti fondé par Jean-Luc Mélenchon suscite un fort rejet auprès de l’opinion. Au point que le leader insoumis, tout comme son mouvement, semblent emprunter tranquillement mais sûrement le chemin d’une diabolisation dont il sera difficile de revenir.
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Réalisée sur un échantillon de 11 204 personnes (ce qui est un format bien plus large que les sondages habituels) du 26 juillet au 1er août, l’enquête publiée ce vendredi 30 août souligne que les perceptions négatives à l’endroit de LFI ont considérablement augmenté ces derniers mois. Résultat : 74 % des sondés affirment qu’il s’agit d’une formation d’extrême gauche (ce qu’elle n’est pourtant pas au regard de son programme), ce qui constitue une hausse de neuf points par rapport à une étude similaire réalisée par le même institut en septembre 2023.
Plus grave, 72 % des personnes interrogées estiment que le parti mélenchoniste attise la violence (contre 60 % il y a un an) et 69 % qu’il représente un danger pour la démocratie (contre 57 % l’an passé). En parallèle, le parti de gauche radicale recule sur les marqueurs positifs. À titre d’exemple, seulement 22 % des sondés jugent que La France insoumise est capable de gouverner, ce qui représente une chute de six points en un an. Tout aussi préoccupant concernant le Nouveau Front populaire, cette forme de rejet de LFI s’observe également chez les sympathisants socialistes, lesquels jugent à 57 % que cette formation est dangereuse pour la démocratie et à 68 % qu’elle attise la violence.
Diabolisation ou impasse stratégique ?
Preuve, s’il en est, que malgré le contexte d’une union de la gauche à travers le NFP, LFI souffre d’un plafond de verre y compris chez ses partenaires. Et pas seulement au Parti socialiste : seulement 17 % des sympathisants écolos ont une bonne image de Jean-Luc Mélenchon. Car, effectivement, le premier des insoumis est devenu la personnalité politique suscitant le plus de rejet : 83 % des sondés en ont une image défavorable (contre 57 % pour Marine Le Pen). Le fruit, sans doute en partie, de l’intense campagne de diabolisation menée par la Macronie, qui bien souvent dresse un signe égal entre LFI et le RN. Bien que, et c’est à souligner, seulement 25 % des sondés jugent que la formation de gauche est « souvent injustement diabolisée ».
Autre élément d’explication : la stratégie conflictuelle assumée par les troupes du triple candidat à la présidentielle, notamment sur des sujets particulièrement abrasifs comme la guerre menée par Israël à Gaza, ou sur les méthodes clivantes (voire provocatrices) utilisées par LFI, que ce soit à l’Assemblée ou dans le champ médiatique. Récemment, c’est la volonté unilatérale de destituer Emmanuel Macron qui a nourri le procès en « bordélisation » souvent instruit à l’encontre de LFI. Alors, les insoumis doivent-ils mettre de l’eau dans leur vin pour remonter la pente ?
C’est en tout cas l’avis partagé sur X par le politologue Frédéric Sawicki, pour qui le parti mélenchoniste « doit changer de stratégie dans l’intérêt de ses électeurs et de toute la gauche ». Pour l’heure, ce n’est pas vraiment la direction que semble prendre la France insoumise qui, de manière générale, relègue ce type d’études au rang des attaques injustifiées fomentées par le « bloc bourgeois » et relayées par « les répondeurs automatiques médiatiques ». Au risque d’affaiblir la coalition de gauche, contrainte de composer avec un partenaire devenu sulfureux et peu inquiet de cumuler tant de perceptions négatives, que ses adversaires seront ravis de brandir pour tenter de percer l’unité du NFP.
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