Steinmeier, meilleur atout pour débloquer la crise à Berlin?

Frank-Walter Steinmeier n'était pas le premier choix de la chancelière Angela Merkel pour la fonction de chef de l'Etat, mais ce social-démocrate pourrait bien être son dernier espoir de conserver le pouvoir dans la crise politique actuelle. /Photo prise le 20 novembre 2017/REUTERS/Axel Schmidt

par Andrea Shalal

BERLIN (Reuters) - Frank-Walter Steinmeier n'était pas le premier choix de la chancelière Angela Merkel pour la fonction de chef de l'Etat, mais ce social-démocrate pourrait bien être son dernier espoir de conserver le pouvoir dans la crise politique actuelle.

celui qui a dirigé à deux reprises la diplomatie allemande a reçu mardi des dirigeants des Verts ainsi que du FDP (Libéraux), après l'échec des négociations sur la formation d'une coalition tripartite de gouvernement.

Jeudi, il recevra Martin Schulz, le chef de file du SPD, deuxième parti le plus important au Bundestag, pour tenter de le convaincre de reconsidérer, pour le bien du pays, la décision de son parti de ne pas poursuivre l'expérience de la "grande coalition" avec la CDU-CSU de la chancelière Merkel.

Angela Merkel préfère que l'Allemagne retourne aux urnes plutôt que de devoir diriger un gouvernement minoritaire, mais Frank-Walter Steinmeier incite les états-majors politiques à éviter un nouveau scrutin, qui, selon les analystes, se solderait par un renforcement du parti d'extrême droite AfD.

Cette formation anti-immigration a fait son entrée au Bundestag, en recueillant près de 13% des suffrages lors des élections législatives du 24 septembre.

"Le président allemand, qui a rarement été aussi puissant dans l'histoire constitutionnelle de l'Allemagne, tient les rênes actuellement", écrit mardi le journal Rheinische Post.

C'est la première fois qu'un président fédéral allemand doit s'impliquer directement dans les efforts de mise sur pied d'une coalition de gouvernement.

Ceux qui ont rédigé la Loi fondamentale allemande ont mis au point un processus complexe permettant d'éviter les élections fréquentes qui avaient affaibli la République de Weimar, dans les années 1920, et facilité la marche d'Adolf Hitler vers le pouvoir au début de la décennie suivante.

DISCOURS REMARQUÉ

De nouvelles élections devront sans doute avoir lieu si Frank-Walter Steinmeier échoue à convaincre les conservateurs, les Verts et le FDP de retourner à la table des négociations, ou s'il ne réussit pas à persuader ses anciens collègues du SPD de rester au gouvernement.

Or, le SPD souhaite désormais une cure d'opposition pour se refaire une santé, car il a enregistré le 24 septembre son pire résultat électoral depuis les années 1930.

Agé de 61 ans, Frank-Walter Steinmeier, suivant la tradition de ses prédécesseurs à la présidence, a rendu sa carte de parti lorsqu'il a pris ses fonctions, mais il pourrait malgré tout user de son influence auprès de la direction du SPD, où il a occupé pendant des années de hautes fonctions.

Ses premiers mois à la présidence ont considérablement manqué de panache, et certains politologues ont douté qu'il puisse assumer la fonction aussi bien que son prédécesseur, Joachim Gauck, en tant qu'autorité morale au-dessus de la politique partisane.

En octobre, cependant, il a prononcé un discours remarqué à l'occasion de l'anniversaire de la réunification allemande, après quoi il s'est rendu en visite en Russie pour tenter d'apaiser les tensions avec Vladimir Poutine. Il était le premier chef de l'Etat allemand à aller à Moscou depuis 2010.

Fils de charpentier originaire du Land de Rhénanie du Nord-Westphalie, Frank-Walter Steinmeier a depuis longtemps l'oreille de l'ancien chancelier social-démocrate Gerhard Schröder.

Il a aussi une longue expérience de coopération avec Angela Merkel, ayant été son ministre des Affaires étrangères durant la première "grande coalition" SPD-droite de 2005 à 2009, avant de retrouver ce portefeuille de 2013 à 2017, quand les deux blocs ont gouverné de nouveau ensemble.

(Eric Faye pour le service français, édité par Gilles Trequesser)