Stéphane Séjourné présenté à Bruxelles, mais ce choix passe mal en France

Dans un discours officiel devant le Parlement européen, Ursula von der Leyen a présenté mardi le commissaire européen de la France.

Stéphane Séjourné devra être nommé vice-président exécutif de la Commission, en charge de la prospérité et de la stratégie industrielle.

Le ministre démissionnaire des Affaires étrangères a été proposé par le président Macron lundi, à la suite de la démission surprise de Thierry Breton.

Les rumeurs prêtaient à Ursula von der Leyen la volonté d'écarter M. Breton, devenu trop autonome et même son rival dans la Commission.

"Globalement, bonne position", mais...

« Globalement, la France a une bonne position dans cette nouvelle commission, Stéphane Séjourné se verra attribuer un large portefeuille », explique à Euronews Olivier Costa, politologue à Sciences Po et au CNRS.

L'ancien commissaire français Thierry Breton a démissionné lundi, accusant Ursula von der Leyen de « gouvernance douteuse ». M. Breton était commissaire au marché intérieur. On peut donc se demander si la nomination de M. Séjourné comme l'un des six vice-présidents de la Commission constitue une avancée pour la France.

Pour Olivier Costa, ce ne sera pas forcément le cas. « Symboliquement, si Stéphane Séjourné est assermenté en tant que vice-président, il deviendra l'un des poids lourds de la Commission. Mais dans la pratique, M. Breton était très puissant au sein de la Commission et capable d'affronter von der Leyen et de la défier ».

Le Parti populaire européen (PPE), présidé par Mme von der Leyen, est le groupe le plus important du Parlement européen, mais il occupe également 15 des 27 postes de la Commission. Le groupe européen centriste Renew et le groupe de gauche des sociaux-démocrates devraient disposer de cinq sièges chacun.

« La France sera plus faible, car Emmanuel Macron appartient à la famille libérale européenne. La modification des équilibres politiques au sein de la Commission européenne va inquiéter le président », prévient Olivier Costa.

Colère en France contre la décision de Macron de choisir Séjourné

En France, une grande partie des réactions à l'annonce de la nouvelle composition de la Commission a été dirigée contre la décision du président Macron de remplacer Thierry Breton par M. Séjourné. Allié de longue date de M. Macron, M. Séjourné est devenu le plus jeune ministre français de l'Europe et des Affaires étrangères en janvier.

La gauche est très critique avec le choix de lâcher M. Breton et aussi le choix de nommer M. Séjourné qui est très proche du président. Cela va bien (aussi) dans le narratif de l'extrême droite qui veut toujours nous expliquer que la Commission européenne décide de tout et que la France n'a plus de souveraineté. Et là, ils tiennent un bon exemple pour montrer que Mme von der Leyen est capable d'imposer des choses au président français.

« Macron envoie son clone à la Commission sans consulter personne et au mépris du vote des Français », a accusé Manon Aubry, eurodéputée du parti de gauche dure La France Insoumise, sur X. “Le coup de force permanent continue”, a-t-elle ajouté. Mardi, LFI a lancé une motion de destitution contre le président Emmanuel Macron à l'Assemblée nationale.

A l'autre bout du spectre, les critiques ont également fusé. « Pour l'extrême droite, le fait qu'Emmanuel Macron ait été contraint de changer de candidat joue en leur faveur pour revendiquer. Ils peuvent prétendre que la Commission européenne décide de tout et que la France n'a pas de souveraineté », commente M. Costa.

Laurent Jacobelli, membre du Rassemblement national, a accusé M. Macron de promouvoir « la République des copains » lors d'une interview sur la chaîne de télévision française LCI.

Les critiques pointent aussi le caractère "diaphane" de M. Séjourné comme chef du quai d'Orsay et le fait qu'il "ne boxe pas dans la même catégorie" que M. Breton.

Malgré ces critiques, le nouveau commissaire français aura des responsabilités importantes dans les domaines de l'industrie, des petites et moyennes entreprises et du marché unique - à condition d'obtenir un satisfecit des députés lors des auditions au Parlement européen.

En ce qui concerne les prochaines étapes du processus, les commissaires désignés doivent être soumis à une audition parlementaire et à un vote de confirmation avant de pouvoir être installés dans leurs fonctions. Au vu des retards actuels, la formation de la prochaine Commission pourrait être reportée au-delà de l'objectif initial de début novembre.