Whisky en solitaire, "marché aux filles" et parking souterrain: le récit de la soirée qui vaut à Ben Yedder d'être accusé d'agression sexuelle

Wissam Ben Yedder s’est présenté ce mardi 17 septembre devant la chambre d’instruction de la cour d’appel d’Aix-en-Provence. Une audience organisée après l’appel du procureur de la République de Nice dans le cadre de ce dossier d’agression sexuelle, où il sera jugé le 15 octobre. La décision sera rendue mercredi matin. Récit.

Ce vendredi soir de septembre, Wissam Ben Yedder est dans une voiture garée sur le parking d’une plage à Cap d’Ail, sa ville de résidence à quelques mètres de la Principauté. L’ancien attaquant de l’AS Monaco n’a toujours pas trouvé de club et passe sa soirée seul, sur ce parking. L’avocat général va d’ailleurs pointer du doigt le récit de cette soirée en affirmant: "Elle n’est pas très joyeuse la situation, monsieur Ben Yedder."

Le joueur, polo noir sur les épaules et visage fermé, regarde souvent l’arrière de la toute petite salle d’audience d’Aix-en-Provence. Lors de ce passage devant la chambre de l’instruction, un premier déroulé de cette soirée du 6 septembre sera expliqué par l’une des trois juges.

En fin de journée ce 6 septembre, lorsqu’il est installé dans sa voiture, un petit groupe de 4-5 jeunes passent leur soirée à proximité. L’un des jeunes va reconnaître l’ancien international français. Selon le récit, le joueur est avec une bouteille de whisky et du coca dans sa voiture, il est déjà sous l’empire d’un état alcoolique. D’ailleurs, lors de son interpellation par les gendarmes de Cap-d’Ail, il sera contrôlé avec un taux de 0,76mg d’alcool par litre d’air expiré (soit 1,52g par litre de sang).

Ben Yedder va sympathiser avec le petit groupe. Devant les enquêteurs, la jeune fille rapportera que le joueur l’a regardée avec insistance lors de la première prise de contact. Finalement, Ben Yedder va emmener faire un tour dans sa voiture la jeune femme, née en 2001, et un jeune garçon. Ce dernier quittera le véhicule et laissera la plaignante seule avec l’attaquant. "Vous allez placer votre main entre ses cuisses et vous allez tenter de l’embrasser, fait savoir la juge lors de l’audience programmée mardi après-midi. La jeune femme dit qu’elle n’est pas intéressée et que vous ne l’avez pas laissée partir." La plaignante se croit alors bloquée dans le véhicule garé dans un parking souterrain. Selon l’avocat général, la jeune femme a rapporté que Wissam Ben Yedder avait essayé de se masturber devant elle, "mais précise que vous n’étiez pas en érection".

Toujours selon le récit effectué devant la chambre d’instruction, la jeune femme va réussir à fuir, avant de se réfugier derrière une poubelle, de regagner son groupe d’amis et puis de se réfugier dans un endroit de confiance chez un proche. Elle portera ensuite plainte pour les faits qu’elle dénonce. Devant les gendarmes, cette jeune fille fait état d’attouchements, alors que les deux autres témoins décrivent un comportement "agressif et alcoolisé" du joueur, mais ils n’étaient pas présents au moment des faits présumés.

Lorsque les gendarmes vont vous interpeller, ces derniers relèveront "des yeux brillants" et "que vous sentiez l’alcool", fait savoir l’une des juges. Lors de sa garde à vue, Wissam Ben Yedder va reconnaître le délit routier (il a d’ailleurs écopé d’une suspension de permis pour une durée de six mois) mais va formellement contester les accusations d’agression sexuelle.

"On se sent tout puissant parce qu’on est un joueur de football", dira l’avocat général lors de cette audience. "On peut tout se permettre. On se retrouve quand même dans une situation un peu triste pour vous, quand on se retrouve sur le parking d’une plage, seul un vendredi soir. Tellement seul que vous êtes dans une voiture avec une bouteille de whisky. Les jeunes vous reconnaissent et puis on fait un peu le marché aux filles ‘tient celle-là est libre ou pas’."

La plaignante a rapporté aux enquêteurs que Wissam Ben Yedder, malgré son état, n’avait pas été violent ce soir-là. L’avocat général, qui défend la position du Parquet de Nice dans ce dossier, souhaite le versement d’une caution qui "ne peut être inférieure à 50.000 euros", si Ben Yedder reste libre jusqu’à la date de son procès. "Il faut montrer à la plaignante, ce n’est pas parce qu’il est riche et puissant qu’il peut s’en sortir", conclut l’avocat général. Ce dernier a aussi évoqué l’hypothèse, mise en avant par les deux avocates du joueur, d’une cure de désintoxication à l’alcool au CHU de Nice. "Si c’est ça, je ne veux plus le voir jusqu’au jour du jugement", commente l’avocat général.

La défense de Wissam Ben Yedder a ensuite évoqué que l’appel du Parquet de Nice "était irrecevable" pour des questions très techniques. Si l’appel est jugé recevable par la chambre d’instruction, alors Me Roumiantseva a questionné les juges ("Quel est l’intérêt d’une détention provisoire dans ce dossier ?"), tout en mettant en avant que Wissam Ben Yedder est une personne "totalement insérée en France" et que c’est un "primo délinquant dans les affaires sexuelles". "J’espère que sa carrière n’est pas terminée", fait savoir son avocate. "C’est l’un des meilleurs buteurs de la Ligue 1. Il était en négociation avec plusieurs clubs, dont un club français avant cette soirée." Et de poursuivre: "Le fait qu’il aurait posé sa main sur la cuisse de la plaignante, en réalité ce ne sont pas des faits graves. (…) Une vidéo-surveillance montre la voiture à 2h11 avec la plaignante à l’avant du véhicule. Et puis on peut aussi voir que la plaignante sort à 2h24 de l’immeuble de monsieur Ben Yedder. La scène dans le parking a donc duré quelques minutes."

Vient ensuite le moment d’évoquer les problèmes d’alcool du joueur. "Les problèmes d’alcool, que pouvait avoir Wissam Ben Yedder, sont réguliers et massifs. Le psy qui le connaît et qui le suit, explique ça par une dépression et une très grande anxiété. Je n’excuse pas le comportement, mais j’explique comment ces événements ont pu avoir lieu", ajoute Me Roumiantseva, avant d’évoquer un "électrochoc" pour le joueur lors de sa garde à vue. Le joueur a "entamé un suivi psychiatrique, en mars dernier".

Selon ses représentantes, Mes Roumiantseva et Louze, depuis la sortie de sa garde à vue le 8 septembre, le joueur a débuté des démarches pour soigner son addiction à l’alcool. Lors de la dernière semaine, l’attaquant a vu un "psy spécialisé" et s’est rendu à un groupe de parole des alcooliques anonymes. Ses avocates mettent en avant la possibilité pour le CHU de Nice de l’accueillir à partir du 23 septembre et pour une durée de 14 jours afin d’effectuer une cure de désintoxication. "Il veut se soigner (…) et il n’y a aucun risque de fuite", termine Me Roumiantseva qui affirme que Ben Yedder est disposé à verser un cautionnement de 50.000 euros.

Devant les trois juges, Wissam Ben Yedder a répété son envie de se soigner. "Je fais des efforts, j’espère me guérir de cette situation", commente l’ancien international français. "D’arrêter définitivement, c’est la meilleure solution de me guérir. J’ai toujours pointé et j’ai toujours été présent quand la justice a fait appel à moi."

Cette audience devant la chambre d’instruction n’a pas vocation à juger le fond du dossier. Le 15 octobres prochain, Wissam Ben Yedder va comparaitre devant le tribunal correctionnel de Nice pour des faits d’agression sexuelle en état d’ivresse manifeste, refus d’obtempérer et conduite sous l’empire d’un état alcoolique. Ce dossier n’a rien à voir avec l’affaire où Wissam Ben Yedder est mis en examen pour viol. Dans ce dossier son contrôle judiciaire a d’ailleurs été allégée pendant l’été.

Article original publié sur RMC Sport