Rentrée littéraire : Après le succès des « Impatientes », Djaïli Amadou Amal frappe (de nouveau) très fort

L’étoile militante des lettres camerounaises, lauréate du Goncourt des lycéens 2020, démonte un système mortifère dans « Le Harem du roi ».  - Credit:
L’étoile militante des lettres camerounaises, lauréate du Goncourt des lycéens 2020, démonte un système mortifère dans « Le Harem du roi ». - Credit:

« Boussoura n'arrive toujours pas à se rappeler à quel moment précis son époux, Seini, le médecin proche de ses patients, le père affectueux, le mari aimant et complice, s'est transformé en roi tout-puissant. » Elle ne s'en souvient pas car ça a commencé doucement, sans faire de bruit, comme une femme légère qui va pieds nus dans la nuit. Il faut dire qu'ils étaient modernes, Boussoura et Seini, même qu'il se disait « féministe ». Ils s'étaient mariés vingt-cinq ans auparavant, ils avaient eu quatre enfants, ils vivaient à Yaoundé et s'aimaient « à l'européenne », écrit Djaïli Amadou Amal.

Et puis, comme il était fils de roi, ce qui arrivait souvent, et que le roi était mort, Seini avait été « rappelé ». Et il était devenu « lamido », c'est-à-dire « commandeur des croyants, garant des traditions et de la religion » d'un petit royaume qui n'est pas l'État nation. Alors ils s'étaient installés au palais de l'autre temps, Boussoura, seule, Seini entouré d'esclaves sexuelles et de concubines délicieuses et ambitieuses. Bien sûr, il « n'aimait que Boussoura » et il « avait besoin d'elle à ses côtés », mais il ne pouvait pas « mépriser » le harem.

Un système mortifère

Il fallait bien l'« honorer ». Prouver sa puissance virile. Car plus d'enfants y naissent, plus la gloire du lamidat est grande. « Donnez tout pouvoir à l'homme le plus vertueux qui soit, écrivait Hérodote, vous le verrez bientôt changer. » Assurément. Seini devint très, très lamido – question de devo [...] Lire la suite