"Il y a une pression telle que l’enfant finit par craquer": le fléau des "Projets Mbappé" dans le foot amateur
Le club de l'US Colomiers, dans la région toulousaine, est toujours sous le choc. Les voitures de deux de ses éducateurs ont été brûlées, dans la nuit de lundi à mardi. Une plainte a été déposée et la structure a décidé de se mettre en veille jusqu'au 11 novembre pour dénoncer ces violences qui pourraient potentiellement être la dernière illustration en date des dérives des fameux "Projets Mbappé" dans le foot amateur.
Depuis plusieurs années, les éducateurs sont nombreux à tirer le signal d’alarme pour dénoncer les comportements agressifs de parents qui veulent faire de leur enfant le futur crack du football mondial. L’enjeu d’un contrat et les sommes associées à une telle signature peuvent rendre fou. Un triste phénomène qu'a aussi remarqué Gérard Bellehigue, président de l’Amicale Nationale des Educateurs et du Cosmo Taverny, club situé dans le Val-d’Oise.
"L’enfant qui réussit est l’enfant qui est soutenu et aidé, pas l’enfant qui est sous pression"
"On voit ce phénomène monter depuis cinq ou six ans. Le football reflète ce qu’est la société aujourd’hui, avec de plus en plus de violences d’une minorité. Il y a des comportements violents et des incivilités. Dernièrement, j’ai vu un parent entrer sur le terrain parce que son fils s’était accroché avec un adversaire. Il a tiré l’oreille de l’adversaire… C’était le rôle de l’éducateur et non du parent d’entrer sur le terrain et de séparer les enfants", a-t-il témoigné ce samedi matin sur le plateau de BFMTV.
La réussite de son enfant vire parfois à l'obsession. "Chez certains parents, l’enfant est un investissement. Ils n’ont pas peur de le dire. Ils l’inscrivent dans un club, avec en plus de ça des coachings particuliers et individuels, alors que le football est un sport collectif. Nous ce qu’on fait, c’est qu’on met en place des réunions en début de saison. Malheureusement, tous les parents ne viennent pas. Seulement 40% d’entre eux. Ça sert pourtant à leur expliquer comment on fonctionne et ce qu’on attend des enfants. Le football, comme tous les sports collectifs, est là pour voir comment l’enfant va s’intégrer dans la société. Ça doit être un plaisir", a développé Gérard Bellehigue.
Ces dernières années, plusieurs clubs ont décidé pour marquer le coup de supprimer des séances d’entraînement ou de basculer sur des séances à huis-clos. "J’ai plusieurs exemples de parents qui ont mis des pressions énormes sur leur enfant, et l’enfant arrête alors le football à 14-15 ans. Il ne supporte plus. Ça vient souvent des papas. L’enfant ne supporte plus d’avoir son père qui le critique du matin au soir. Il y a une pression telle que l’enfant finit par craquer. Aujourd’hui, l’enfant qui réussit est l’enfant qui est soutenu et aidé, pas l’enfant qui est sous pression", a conclu Gérard Bellehigue.