"Le peuple est mobilisé derrière Imane": avec ces JO 2024, Khelif devient une icône nationale pour l'Algérie

Il n’a pas hésité à traverser l’Atlantique pour venir donner de la force. Redouane a quitté son domicile de New York pour être présent ce samedi à l’Arena Paris Nord, située à Villepinte. A une trentaine de kilomètres au nord-est de la capitale. Comme de nombreux Algériens, le quadragénaire s’est déplacé pour soutenir Imane Khelif lors de sa victoire face à la Hongroise Luca Anna Hamori. Et il a vibré pour la combattante de 25 ans, qui fait l’objet d’une polémique sur sa féminité.

"J’ai pris l’avion hier (vendredi), je suis venu pour Imane. Avec toute cette polémique, elle a besoin de soutien de la communauté, de tous les Algériens et même du monde entier. Parce que c’est injuste. Il y a eu des comportements irresponsables de la part de certains athlètes. Quand on perd, c’est facile de faire ce genre de commentaires, mais il y a un impact énorme derrière. C’est une vraie discrimination. Je n’imagine pas ce qu’elle et sa famille doivent ressentir, c’est terrible. Mais elle restée forte malgré tout ça. On est très fiers d’elle."

"C’est le côté algérien, il ne faut pas nous piquer"

Dans un élan de solidarité, des dizaines de supporters algériens ont investi les gradins de la salle de Seine-Saint-Denis pour encourager Imane Khelif en chantant et en agitant leurs drapeaux blanc et vert. "Je suis très contente qu’elle ait gagné. Elle a prouvé à tous ceux qui l’ont critiquée que c’est une grande championne, savoure Lilia, qui vit à Paris. Elle est restée focus et l’a été super "strong". Ça nous a fait un peu de peine de la voir pleurer à la fin mais je pense que ce qu’il s’est passé l’a beaucoup affectée. Il faut un mental d’acier. On sera toujours derrière elle. C’est le côté algérien, il ne faut pas nous piquer. Si tu nous piques, tu nous réveille. Aujourd’hui, le peuple algérien est mobilisé derrière Imane. On l’appréciait de base et cette polémique nous a encore plus soudés derrière elle. On va la pousser jusqu’à la médaille d’or inchaAllah et quoi qu’il arrive, on sera avec elle."

Hocine, originaire de Sarcelles (Val-d’Oise), confirme avec son drapeau sur le dos: "On est tous venus soutenir Imane, en équipe, en famille. Elle le mérite. Il fallait l’encourager parce qu’elle a beaucoup subi. C’est une très grande femme. Elle l’a encore prouvé aujourd’hui. Sur le ring et dans la vie aussi, parce que pour subir autant et ne pas répondre à toutes les critiques des haters, il faut avoir du courage. A la fin du combat, on a vu son émotion. Tout ce qu’elle a subi, elle l’a rendu sur le ring. A chaque fois qu’on va parler sur elle, ça va la rendre encore plus forte."

"C’est une polémique injustifiée"

Au milieu de la foule de supporters d’Imane Khelif, Sonia, née en Algérie et installée en France depuis neuf ans, appuie: "On est venus pour lui montrer qu’elle n’est pas toute seule. C’est une polémique injustifiée. Elle a peut-être de l’hyperandrogénie, mais c’est accepté dans la boxe. Certains ont dit qu’elle était née homme alors que c’est faux. L’IBA l’a disqualifiée l’an passé sans grandes explications. Elle a gagné plusieurs compétitions et elle aussi perdu plusieurs combats, c’est la preuve qu’elle peut être battue. En tant qu’Algériens, on se soutient entre nous. Le cyberharcèlement qu’elle subit n’est pas normal, donc on est derrière elle."

Mohamed, venu de Seine-et-Marne, suivait les performances d’Imane bien avant les débats enflammés et les remarques nauséabondes: "Je l’ai vu combattre lors des Jeux méditerranéens 2022 à Oran, c'est un talent pur. Après, j’ai suivi un peu son ascension. Lorsqu’elle a été interdite de combattre par l’IBA en 2023 à cause d’un taux de testostérone soi-disant trop élevé, je l’ai encore plus suivie à ce moment-là. Je ne comprends pas cette polémique aujourd’hui. On sait tous ce que c’est une fille. Les actes de ses adversaires, c’est juste de la déstabilisation pour essayer de prendre un ascendant psychologique. La boxe, c’est l’un de sports de prédilection en Algérie. C’était déjà une icône, mais là, elle l’est encore plus."

"La combattante des opprimés"

Fouad, qui réside dans l’Essonne, est révolté par le traitement que subi la boxeuse algérienne: "C’est un harcèlement mondial. Même Trump s’en mêle maintenant. C’est une grande injustice. Ça doit être quelque chose de très difficile. On est venus lui dire que des gens la soutiennent de tout leur cœur. Aujourd’hui, elle a donné une leçon, parce qu’elle est très jeune mais très mature. Elle a les valeurs sportives en elle. Elle a été imperméable à ce qui se dit sur elle, c’est très fort. On est très fiers d’elle. Les Algériens adorent ces situations-là, parce qu’ils détestent l’injustice. Ça fait d’Imane la combattante des opprimés. C’est une icône nationale et même internationale, on en parle partout. Son histoire est l’une des plus belles des JO. Et si elle va au bout, ce sera encore plus beau."

En attendant, sa victoire en quart de finale face à Hamori, qui l’avait attaqué durement sur les réseaux en la qualifiant notamment d’homme, a été couverte par des médias du monde entier. Une nuée de journalistes s’est ruée en zone mixte dès la fin du combat. Extrêmement émue et soutenue par toute sa délégation, Khelif est venu s’exprimer tant bien que mal. En tentant de se frayer un chemin face à la multitude de micros tendus par des reporters collés derrière les barrières de sécurité. Des chants à la gloire d’Imane et de l’Algérie ont été lancés, dans une ambiance électrique et désordonnée. Hassiba Boulmerka, championne olympique du 1.500m aux JO en 1992, était présente pour participer à la mobilisation.

"Imane, c’est une affaire d’Etat"

"Les gens pensent que c'est franchement odieux, souffle Omar, un journaliste algérien. Le CIO lui a permis de concourir et sa disqualification des Mondiaux amateurs, c'est un fait personnel de l'IBA, qui n'a consulté personne. Il y a des femmes qui ont plus de testostérone que d'autres. Ça ne veut pas dire que ça entame leur féminité. Les Algériens, ce qui les fait sortir de leurs gonds, le mépris. Et elle a été victime de mépris."

Khireddine Barbari, le chef de la délégation algérienne, acquiesce au micro d'RMC Sport. En confirmant une volonté nationale de soutenir la boxeuse de 25 ans face à la polémique qui l’entoure à Paris: "Imane, c'est notre championne. Imane, c'est une affaire d'Etat. Imane est vice-championne du monde. Elle est là pour gagner la médaille olympique. On est tous derrière elle. On sait très bien les gens qui sont derrière cette polémique. Mais ça a donné plus de motivation à notre championne. One, two, three, viva l'Algérie!"

Article original publié sur RMC Sport