Performances et médailles, engouement, organisation, héritage: des Jeux paralympiques de Paris 2024 au presque parfait
La nuit tombe sur les Jeux de Paris 2024. Bientôt, ils ne seront plus qu'un intense et joyeux souvenir. La parenthèse enchantée se refermera à 20h30, ce dimanche 8 septembre, au Stade de France. Mais il ne sera ni question de tristesse ni de nostalgie lors de la cérémonie de clôture des Paralympiques, pensée - à nouveau - par Thomas Jolly.
Intitulé "Paris est une fête", le spectacle fera la part belle aux artistes, et plus particulièrement aux DJ labelisés "French Touch". Charge à eux de faire danser l'enceinte dyonisienne et de chasser le spleen du retour à la normalité.
Pendant onze jours, comme durant les JO, les superlatifs ont accompagné les épreuves et leur organisation. De là à faire de ces Paralympiques "les Jeux de référence", plaide Marie-Amélie Le Fur, la présidente du Comité paralympique et sportif français (CPSF). Un terme également employé par Andrew Parsons, président du Comité paralympique international.
Michaël Jeremiasz, chef de mission de la délégation française, ne peut qu'appuyer ce propos: "De tous les intervenants, que ce soient athlètes, staffs, observateurs étrangers, pour eux ce sont les plus grands Jeux paralympiques de l'Histoire".
L'euphorie portée par les performances
Ces Jeux paralympiques ont mis en lumière de grands champions internationaux, à l'instar de la Chinoise Yuyan Jiang et du Bélarusse Ihar Boki en para-natation. La première a décroché sept titres à Paris, le second cinq.
Mais ce sont surtout les performances des parathlètes tricolores qui ont aidé à prolonger la fête née durant les Jeux olympiques. Portée par des figures comme Alexis Hanquinquant, Aurélie Aubert, Ugo Didier ou Marie Patouillet, la délégation française a empoché 75 médailles, dont 19 en or, son meilleur total depuis 2000.
Le paracyclisme (21 médailles) et la para-natation (14) ont été de loin les disciplines où les Bleus ont été les plus en réussite. Elle ont permis à la délégation tricolore d'accrocher le top 8, l'objectif fixé par le ministère des Sports.
Les chiffres illustrent un progrès par rapport à Tokyo (54 médailles, 11 en or, 14e place au classement). Si Marie-Amélie Le Fur. La présidente du CPSF espérait doubler le nombre de titres paralympiques obtenus, l'intéressée n'est pas déçue pour autant. "C'est un véritable succès sportif. En huit ans, on a triplé le nombre de médailles gagnées par l'équipe de France", se félicite-t-elle.
L'ensemble des parathlètes français rejoindront les athlètes des JO pour un défilé sur les Champs-Élysées le 14 septembre. Une célébration bien méritée après une moisson de médailles conséquente.
Une billetterie record
C'est un cercle vertueux: la performance nourrit l'engouement du public et les encouragements poussent les parathlètes à se surpasser. Comme l'espérait Marie-Amélie Le Fur, les Jeux paralympiques ont su surfer sur la vague née des JO, malgré un calendrier marqué par la rentrée scolaire et les tractations politiques.
Selon Tony Estanguet, le président du Comité d'organisation de Paris 2024, le nombre de billets vendus (ou distribués) "a dépassé les 2,5 millions". "Il y a eu plus de personnes qui sont allées voir la para-natation que la natation aux Jeux", fait remarquer l'ancien céiste.
Sur l'ensemble des Jeux, 12,1 millions de sésames ont trouvé preneur. C'est un record. En 2012, Londres avait vendu 8,2 millions de billets pour les JO et 2,7 millions pour les Jeux paralympiques. Sur ce dernier point, aucune ville n'a fait mieux.
"On a reçu en plus cette semaine presque 200.000 scolaires. C'était la plus grande sortie scolaire jamais organisée. Ce sont 300.000 personnes au total qui ont été invitées", savoure Amélie Oudéa-Castéra, ministre des Sports démissionnaire, invitée de BFMTV ce dimanche matin.
Une couverture médiatique sans égale
Au total, 165 chaînes de télévision ont couvert les Jeux paralympiques de Paris. Jamais on n'en avait compté autant. France Télévisions a développé un programme équivalent à celui des JO, retransmettant les 22 disciplines au programme.
À date du 7 septembre, le diffuseur français recensait 45 millions de téléspectateurs, rapporte L'Équipe. S'y ajoutent notamment les 5,3 millions de personnes postées devant la finale du cécifoot samedi soir. À titre de comparaison, 24,8 millions de téléspectateurs avaient été comptabilisés en France lors des Jeux de Rio, 24 lors de ceux de Tokyo.
Autre chiffre éloquent: 10,2 millions de téléspectateurs ont suivi la cérémonie d'ouverture des Jeux paralympiques. Il s'agit de la 7e audience de l'année, derrière les cérémonies d'ouverture et de fermeture des JO et quatre matchs de l'équipe de France de football à l'Euro.
Amélie Oudéa-Castéra se réjouit que les médias aient joué leur rôle pendant onze jours: "Je crois qu'il y a eu une mise en lumière des para-sports, de nos athlètes, dans toutes leurs composantes, avec les différentes formes de handicaps".
Une réussite organisationnelle
À l'image des JO, les Jeux paralympiques n'ont pas été perturbés par des couacs majeurs. Amélie Oudéa-Castéra décrit même "un grand succès organisationnel, un grand succès populaire".
"Je crois qu'au fond, c'était presque la dimension la plus importante. Elle a été nourrie par un vrai succès sportif avec l'atteinte de nos objectifs", estime la ministre démissionnaire.
Seul petit point noir: l'accès aux tribunes de presse des sites paralympiques, parfois peu adapté aux journalistes à mobilité réduite, comme le relate un confrère de L'Équipe.
Selon les organisateurs, l'acheminement vers les sites de compétition s'est bien déroulé dans l'ensemble. "Pour ces Jeux Paralympiques, comme précédemment pour les JO, nous avions planifié le transport de 300.000 spectateurs pour les para, en transport 100% décarboné. Tout cela en pleine période de rentrée scolaire, avec cinq millions de voyageurs sur les lignes", tient à rappeler Valérie Pécresse.
Amélie Oudéa-Castéra met à ce titre en exergue "la vitesse à laquelle on a transformé un certain nombre de services au cœur des transports, la manière dont les personnes en situation de handicap ont été accueillies au cœur de nos stades, dans nos enceintes. La méthode aussi a été transformée parce qu'on a travaillé main dans la main avec des personnes en situation de handicap".
L'intéressée concède toutefois qu'il n'a pas été possible de réaliser des "miracles" et de transformer "le métro parisien en deux ans" pour le rendre plus accessible.
Héritage et projection vers l'avenir
La mobilité des personnes en situation de handicap est érigée en priorité pour les années à venir. Fin août, Valérie Pécresse a ainsi proposé un projet de "métro pour tous", vaste et coûteux mais nécessaire.
Sur le sujet de la mobilité, Michaël Jeremiasz clame: "On ne peut plus reculer". L'ancien parathlète met en garde contre l'idée d'une "parenthèse enchantée" sur le plan de l'inclusion. "Ce serait plus grave que si on n'avait pas organisé les Jeux", argue-t-il.
Les Jeux "vont contribuer à banaliser le regard qu'on porte sur l'autre", déroule encore Michaël Jeremiasz, espérant que "l'État et le gouvernement se [sentiront] obligés de faire le boulot et qu'on [accélérera] cette transformation, que tous les chantiers pour accéder à cette citoyenneté se [mettront] en place".
"Il y a surtout l'envie, qui je pense est plus forte que jamais, de continuer à changer la vie des personnes en situation de handicap. Modifier le regard, c'est bien, mais [il faut] continuer à transformer notre société pour permettre de mieux accueillir le handicap", résume Amélie Oudéa-Castéra.
Sur le volet sportif, les prochains chantiers porteront sur l'accès à la pratique pour les personnes en situation de handicap. 13 études d'impact doivent être publiées dans les prochains mois pour une analyse détaillée. "On s'attend à (avoir) entre 15% et 18% de licenciés en plus. On est prêt pour les accueillir", promet la ministre.
La question du financement des handisports se pose également, tout comme celle de la féminisation de l'équipe de France. Marie-Amélie Le Fur rappelle qu'à Paris, la délégation tricolore ne comptait que 82 femmes sur 237 parathlètes.
Enfin, l'accent sera mis sur les sports peu pourvoyeurs de médailles à Paris. On pense naturellement au para-athlétisme ou à l'escrime-fauteuil, ainsi qu'aux sports collectifs. Le sacre des joueurs de cécifoot "doit nous encourager".
Selon Amélie Oudéa-Castéra, "on a des potentiels formidables en basket-fauteuil et rugby-fauteuil et cela doit nous montrer notre capacité à passer du top 8 au top 5". Encore un objectif élevé, mais l'équipe de France paralympique a démontré qu'elle n'avait pas peur des défis.