Ligue 1: Saint-Etienne est dans le rouge, mais ne s'affole pas

Pour son retour en Ligue 1, l’ASSE avance en plein cauchemar au niveau des résultats (0 point, 0 but marqué et une dernière place en Ligue 1). Mais le catastrophisme n’est pas de mise à l’Etrat, le centre d’entraînement. A cela plusieurs explications, notamment la vente du club il y a 100 jours – le 2 juin 2024 qui donne du crédit à la théorie de la mutation obligatoirement longue d’un modèle à l’autre, de celui des 20 dernières années, porté par les vendeurs (Bernard Caiazzo et Roland Romeyer) à celui des nouveaux boss canadiens et des méthodes rompues au sport business nord américain, Mais il faudra quand même gagner un jour pour ne perdre trop de temps dans la mise en place du projet de Kilmer Sport Ventures.

Un rachat en mode Ligue 2

Quand elle lance les transactions pour le rachat, l’équipe opérationnelle autour d’Ivan Gazidis, Huss Fahmy et Jaeson Rosenfeld, les hommes du propriétaire, Lawrence Tanenbaum, le milliardaire canadien de Toronto possédant des franchises dans de nombreuses disciplines voie leurs futurs-employés se prendre les crampons dans le gazon dans la course à la montée. En avril-mai, les montagnes russes accompagnent en effet le parcours des Verts: c’est donc plutôt en mode Ligue 2 que les acquéreurs construisent leur modèle de reprise. Mais tout s’accélère, sur le terrain, au moment même où, dans le secret des bureaux, les pourparlers se terminent. Et quand ils signent l’acquisition (environ 16 millions d’euros), ce lundi 3 juin 2024, l’ASSE vient de gagner, la veille à Metz le droit de revenir dans l’élite, deux ans après l’avoir quittée. Tout change pour la saison sportive 24-25, mais en fait rien ne change dans la préparation en amont, assure dans un rapide point presse qui suit l’officialisation Ivan Gazidis: "Ligue 1- Ligue 2, cela nous est égal, car notre projet est sur du long terme. Le fait d’être en Ligue 1 accélère le projet mais rend aussi les choses plus urgentes. Notre volonté, c’est de rester longtemps. C’est l’avantage de ne pas être un fonds de pension puisque notre propriétaire a acheté le club sur ses fonds propres. Nous n’avons pas de dead line de vente de joueurs programmée."

Reste la réalité d’un classement où les Verts accèdent in-extremis aux barrages grâce à une troisième place décrochée avec certes 50% de victoires (19/38 matches) mais aussi avec près d’un quart de défaites (11/38 matches), là où Le Havre, l’année précédente n’en avait perdu que 3... tout en peinant à se maintenir l’année suivante à l’étage du dessus. C’est dire s’il fallait recruter, une donnée peut être difficile à appréhender (et à concrétiser) dans l’urgence d’un mercato particulier (droits TV en baisse qui plus est), débuté juste après le feu vert de la DNCG, le 27 juin.

Une organisation pas banale, mais pas bancale non plus

Soucasse, Perrin, Rustem d’un côté ; Gazidis-Fahmy-Rosenfeld de l’autre. En théorie, une fois en place, "anciens et modernes" se retrouvent, l’un au-dessus de l’autre, la nouvelle équipe d’hommes forts recouvrant les "anciens", en place depuis décembre 2021. Mais intelligemment, tous ces dirigeants apprennent à travailler, ensemble, sans se regarder en chien de faïence, et se faisant mutuellement confiance, la formule d’Ivan Gazidis - "nous n’allons pas faire la révolution, mais une simple évolution" n’étant pas qu’un effet de manche. Et dans la pratique, sur ces 100 jours de fonctionnement, tout se marie plutôt bien : certes, il y a deux "trios" qui se superposent si on prend les ordres d’arrivée en scène dans le Forez ; mais chacun, finalement, trouve sa place, malgré la difficulté de la langue et aussi de la distance : Ivan Gazidis habite New York, Jaeson Rosenfeld, Chicago et Huss Fahmy, Londres quand les "historiques" sont en "présentiel", au centre d’entraînement de l’Etrat.

La recette gagnante? "Tous se sont vus comme des alliés", résume un familier du siège de l’ASSE, grâce à l’entregent d’Ivan Gazidis et de sa personnalité qui diffuse calme et sérénité. Il distille lors de ses premières prises de parole des phrases, plutôt bienveillantes, basées sur du concret. En substance, Jean François Soucasse vient de réussir dans sa position de président-exécutif le mariage des acheteurs et des vendeurs: pourquoi ne pas lui (re)donner son poste de directeur général avec place au Conseil d’administration? Loïc Perrin, directeur sportif sous l’ère Romeyer/Caiazzo, lui, reçoit l’onction du nouveau patron qui souligne en "on" et en "off", la qualité de son recrutement. Si pour quelques supporters frondeurs, l’ex-capitaine garde le débit de la descente en mai 2022, pour les nouveaux dirigeants, il a le crédit du recrutement de la remontée. Quant à Samuel Rustem, il voit son rôle recentré sur des projets stratégiques à long terme, tout en restant, au quotidien et notamment, lors de ses déplacements, proche de l’équipe professionnelle, ce qui a minima dit beaucoup de la confirmation de la qualité de son travail et des autres "anciens" de la maison.

Jusque là, le mariage démarre plutôt bien dans les habitudes de travail concrètes : les anciens faisant ainsi gagner un an d’expérience, par leurs connaissances et leurs réseaux dans le foot français, aux nouveaux, qui leur en savent gré. En lieu et place d’une vie en parallèle, s’installe une vie professionnelle « collégiale », avec croisement des méthodes "stéphanoises" et "nord américaines", mâtinée d’Angleterre, Gazidis et Fahmy ayant travaillé ensemble à Arsenal. Il faudra juste scruter, si sur le long terme, tout cela peut survivre à la très logique lune de miel initiale et, potentiellement, aussi, à de résultats loin des attentes (des supporters).

Un recrutement XXL, jeune mais un peu déséquilibré

Neuf joueurs nouveaux, 23 millions d’euros dépensés (un record à St-Etienne dans toute l’histoire) dont le seul jeune attaquant belge (Stassin) qui égale le précédent chèque conséquent des Verts pour Lois Diony en 2016, avec finalement, un effectif déséquilibré d’une trentaine de joueurs, dont 12 milieux de terrain: "Il va falloir construire l’expérience", explique Olivier Dall’Oglio qui, dans sa feuille de route "idéale", cherchait... de l’expérience: or, 1 seul a joué en Ligue 1 (Abdelhamid) et a 36 ans, quand le plus "vieux" des recrutés (Pierre Cornud) est d’abord un spécialiste du championnat d’Espagne (Oviedo, Sabadell, Ibiza, Linense) entre 2017 et 2023 avant un crochet par le Maccabi Haïfa. Quant aux "têtes" d’affiche, Lucas Stassin, (attaquant belge qui vient de Westerlo), Paul Ekwah, (milieu en provenance de Sunderland), Augustine Boyaké, (Ghanéen en provenance d’Autriche) et Igor Miladinovic (Serbe), ils ont respectivement, 21,22, 23 ou encore 19 ans. Ils vont devoir vite s’adapter pour faire basculer une statistique à l’aube de cette 4e journée: 2 des recrues ont débuté les trois premiers matches, et 5 au total ont joué tout ou partie d’une rencontre du championnat 24-25. Olivier Dall’Oglio va devoir faire avec tout ce petit monde, dont des joueurs entre indésirables ou déclassés, qui ont fait la montée : Bouchouari, Monconduit et Briançon. "Les nouveaux ont apporté de la fraîcheur, cela s’est senti dans les séances de la semaine, explique "ODO". C’est le côté positif, on a enregistré des arrivées. Ces garçons arrivent avec beaucoup de fraîcheur, on a bien animé les derniers entraînements, j’en suis satisfait. Bien sûr, ces garçons vont devoir s’adapter mais ils vont stabiliser l’équipe. Ils sont prêts. Pierre Ekwah n’a pas fait énormément de matches, mais physiquement, ce n’est pas mal. C'est un joueur qui va nous donner une présence athlétique devant la défense, nous aider sur les coups de pieds arrêtés défensifs et offensifs. Il a une qualité de relance, une bonne vision et intelligence de jeu. Lucas Stassin, lui, a déjà commencé sa saison en Belgique, il est totalement prêt. C'est un vrai chasseur de but. Il se place et se déplace très bien. Il a une qualité technique, un bon jeu de tête et il aime la prise de profondeur."

Mais on ne s'affole pas!

3 matches, autant de défaites, 0 but marqué... Les Verts sont marqués au fer rouge pour leur retour en Ligue 1. Les supporters, à fleur de peau, dans les dernières années de Ligue 1 post-Covid ont rangé leur banderole et freinent leur impatience de revoir la vie en rose. Mais paradoxalement, le calme règne à l’Etrat et personne s’affole : un sentiment ressenti de l’extérieur se confirme dans l’intimité du vestiaire. Olivier Dall’Oglio le souligne : "C’est l’idée : ne pas s’affoler.  On veut simplement que St-Etienne reste en ligue 1. Nous devons donc être patient, il faut garder notre sérieux, notre patience pour que cela avance. Cela va se construire pas à pas. Cela tombe bien, c’est l’ambiance générale au sein du club." Et les dirigeants ? "Ils sont sur la même ligne", assure le technicien stéphanois. Confirmation, en interne, on entend souvent de la bouche des néo-dirigeants la formule : "step by step". La langue varie, mais la ligne d’horizon reste la même.

Confirmation avec les acteurs, dont l’un des derniers venus, Pierre Cornud, le latéral gauche : "La dynamique n’est pas idéale, car en fait, il faut "huiler" tout cela. La trêve internationale a permis que nous nous connections. Et je peux vous dire que cela se ressent de l’intérieur. Nous commençons à comprendre comment joue les uns et les autres. Je crois que l’équipe est "finie"." Comprenez que la mayonnaise commence à prendre. Alarmé ? "Oui, il y a une urgence de points mais il faut d’abord se focaliser sur le fait de devenir une équipe." Un (bon) résultat face à Lille en ouverture de la 4e journée ne ferait toutefois pas de mal dans cette construction, les succès ayant toujours cette vertu de resserrer les liens et de crédibiliser les méthodes.

LE MERCATO DES VERTS :

PROLONGATION DE CONTRAT :

  • 3 juillet : Aimen Moueffek

  • 24 juillet : Michael Nadé

ARRIVÉES : 9

  • 5 juillet : Yunis Abdelhamid, 36 ans

  • 9 juillet : Ben Old (Néo Zelandais),

  • 11 juillet : Zuriko Davitachvili, ailier géorgien, 23 ans : 8 buts et 8 PD en L2 et 6 M

  • 13 juillet : Augustine Boakye, il jouait en Autriche au Wolsberger AC. Ailier ghanéen, 24 ans

  • 9 aout : Igor Miladinovic … Serbe 21 ans, qui vient de Currcki, Serbie …

  • 21 août : Brice Maubleu, 33 ans GF 38

  • 22 août : Pierre Cornud, 27 ans, Macabi Haifa (Europa League) après bcp de clubs en Espgane

  • 30 août : Lucas Stassin, jeune attaquant de 19 ans et international espoir Belge - KVC Westerlo (Belgique). Prêt jusqu'en 2028 avec une option d'une saison supplémentaire.

  • 30 aout : Pierre Ekwah : Milieu de terrain formé et révélé en Angleterre -  Sunderland AFC sous la forme d'un prêt avec option d'achat

DÉPARTS :

  • Dylan Chambost en MLS (Crew de Colombus) … 26 ans

  • Etienne Green va à Burnley

  • Maxence Rivera, Dunkerque

  • Et aucun prêt, confirmé, dont Ivan Cardona reparti en Allemagne et qui a signé en Espagne

Article original publié sur RMC Sport