"Quand l’équipe joue mal, il faut le dire": Djorkaeff, Pires, Coupet... Ce que les anciens Bleus pensent des critiques contre Deschamps
L'Euro a agi comme un révélateur pour une partie des supporters de l'équipe de France. Une question, déjà existante les mois précédents, s'est fait plus pressante dans les esprits: après 12 ans de règne, Didier Deschamps ne doit-il pas céder la main?
La claque contre l'Italie (1-3), vendredi 6 septembre, a ajouté une couche à la contestation. L'incendie a vite été éteint contre la Belgique (2-0), lundi, mais l'avant-match a été marqué par quelques sifflets à l'égard du sélectionneur des Bleus.
Interrogés en marge d'un tournoi de padel sponsorisé par Emporio Armani à Paris, ce mardi, plusieurs anciens joueurs de l'équipe de France ont accepté de donner leur sentiment sur ce possible début de divorce entre Didier Deschamps et les supporters.
"Je crois qu'on oublie un peu..."
"J’ai eu cet écho comme quoi il y avait eu beaucoup de sifflets à l’annonce du nom de Didier Deschamps. Ce n’est pas bien, parce que je crois qu’on oublie un peu… Ce que les Anglais ont, et ce qui fait leur force, c’est la reconnaissance", plaide Robert Pirès.
Selon Youri Djorkaeff, "le public français est comme tous les publics, il est habitué à avoir du bon". "Il ne comprend pas quand ça n’est pas bon parce qu’on a les joueurs, on a l’équipe, on a tout ce qu’il faut. Des matchs comme contre l’Italie, ça ne devrait pas arriver, il faut dire ce qui est. Que ça soit Didier ou pas Didier, quand l’équipe joue mal il faut le dire", déroule l'ancien joueur de l'Inter.
Robert Pirès concède qu'"effectivement l’équipe de France ne joue pas très bien depuis un petit moment". "Je suis le premier à le dire, et c’est peut-être à lui d’apporter un peu de fraîcheur, de trouver d’autres joueurs".
Une exigence "normale"
La situation sportive ne nécessite pas pour autant de tirer la sonnette d'alarme, selon Youri Djorkaeff. "L’équipe a mal joué et s’est bien rattrapée. Il n’y a rien d’acquis en équipe de France, il faut toujours se remettre en cause. C’est ça aussi la force des grandes équipes. Dans les cycles il y a toujours des hauts et des bas, mais là on ne peut pas dire non plus que ça soit un grand bas".
Florent Sinama-Pongolle, une sélection au compteur, est du même avis. L'ancien avant-centre de Liverpool estime que Didier Deschamps "a remis un peu les pendules à l’heure en sortant un match convenable contre les Belges, une grande nation aussi".
Cela étant, le consultant de Canal+ comprend les critiques. "À un moment donné, les entraîneurs qui gagnent beaucoup, on est plus exigeant avec eux. Mais c’est normal, ça s’est toujours passé comme ça. Pareil pour les joueurs. C’est exactement ce qu’il se passe avec Didier", justifie le Réunionnais.
Une responsabilité partagée
Pour Robert Pirès, la cause de la pauvreté du jeu des Bleus est aussi à mettre en relation avec le profil des joueurs formés en France. "Ce qui me dérange, c’est qu’aujourd’hui on n’a pas de joueurs techniques", observe l'ex-milieu de terrain d'Arsenal. "Quand je vois l’Espagne, le Portugal, l’Angleterre, l’Allemagne… C’est dans ce domaine-là qu’on pèche. (…) On a des très bons joueurs, mais ce sont tous les mêmes."
Or la responsabilité de la formation n'incombe pas à Didier Deschamps. "Je parle de la Fédé, de la DTN. Il faut peut-être changer la formation, qui n’est plus basée sur la technique", s'interroge Robert Pirès. "Il ne faut pas s’en prendre qu’au sélectionneur. Aujourd’hui, le sélectionneur est en place, il est là, mais s’il n’a pas de joueurs techniques qui peuvent faire la différence, que peut-il y faire? Pas grand-chose…"
Ancien portier de l'équipe de France, Grégory Coupet note qu'une "usure", y compris "médiatiquement", s'est installée au fil du mandat de Didier Deschamps. "Ce n’est jamais évident, quand vous avez une grande équipe, de la renouveler. On a un sélectionneur qui a des résultats depuis un petit moment...", fait-il remarquer.
Le fait d'avoir un grand entraîneur prêt à prendre la succession de Didier Deschamps amplifie également cette envie de changement, argumente Grégory Coupet. "On sait aussi ce qu’il y a derrière: tout le monde, à demi-mot, attend Zizou". L'ancien Lyonnais appelle néanmoins à "rester prudent": "On sait ce qu’on perdrait, sans savoir ce qu’on gagnerait".