JO 2024: photos, tweets... Pour la classe politique, l'envie d'exister pendant la "trêve olympique"
Loin du "JO bashing" qui dominait avant le début de la compétition, la France entière se prend "aux Jeux". Les audiences des chaînes qui diffusent les épreuves explosent, les "fanzones" installées dans la capitale font le plein, même les sportifs français et étrangers sont surpris de l'engouement des spectateurs venus les soutenir sur les lieux de compétition.
L'effusion des jeux ferait presque oublier que le gouvernement démissionnaire est chargé des affaires courantes depuis le 16 juillet, et qu'aucune majorité à l'Assemblée n'a émergé du second tour des élections législatives du 7 juillet.
Un enjeu désormais pour une partie de la classe politique: ne pas disparaître pendant la "trêve olympique", sonnée le 23 juillet par le président de la République. Une mission prise très (trop?) à coeur par Emmanuel Macron depuis le début de la compétition.
La journée du vendredi 2 août est un modèle en la matière. À peine rentré du fort de Brégançon, résidence estivale des présidents français, le chef de l'État a entamé un marathon entre les différents lieux de compétition où concouraient les athlètes français. Et l'on a pu suivre la journée d'Emmanuel Macron sur son compte Twitter. L'emploi du temps était chargé.
Emmanuel Macron omniprésent
Premier arrêt à Versailles, où se tiennent les épreuves d'équitation. Les cavaliers tricolores, qualifiés en finale, finissent en bronze sous l'oeil du président français, installé dans les tribunes.
"Nos trois cavaliers nous ont offert un spectacle magnifique, une superbe compétition et je pense qu’on peut tous être très fier d’avoir ces épreuves ici", a-t-il déclaré.
Interrogé à l'issue de l'épreuve sur la présence du chef de l'État, Simon Delestre, membre de l'équipe française, a été clair, rapporte une reporter de France TV. "C’est pas pour lui qu’on fait ça".
Prochaine étape du pèlerinage présidentiel: le volleyball de plage. Cette fois-ci, pas de médaille pour la paire française éliminée par les Pays-Bas. Mais l'occasion d'un autre tweet, en anglais, du chef de l'État, installé dans les gradins au pied de la tour Eiffel.
En milieu d'après-midi, c'est du côté de l'Arena du Champ-de-Mars, pour les épreuves de judo, que se met en scène Emmanuel Macron. D'abord consolant Romane Dicko, la judokate championne du monde 2022, grande favorite des JO qui échoue en demi-finale. Celle qui venait chercher l'or finit médaillée de bronze.
Une scène qui n'est pas sans rappeler une autre accolade entre le président et le footballeur Kylian Mbappé, après la défaite des Bleus en finale de la Coupe du monde 2022 face à l'Argentine.
Une journée terminée en apothéose après la médaille d'or de Teddy Riner, et la 4e obtenue par Léon Marchand. L'occasion d'une nouvelle salve de tweets pour le chef de l'État.
"Impossible n’est pas Français !", célèbre alors le président Français en fin de soirée, évidemment présent au plus près des bassins au complexe sportif Paris La Défense Arena, et du nageur Léon Marchand.
Des ministres pas en reste
Tout aussi visibles, deux membres du gouvernement démissionnaire ne se ménagent pas pour exprimer leur joie sur les réseaux sociaux, et célébrer les médailles françaises, depuis le début de la compétition. Gabriel Attal et sa collègue des sports Amélie Oudéa-Castéra pourraient même prétendre à une médaille d'or si c'était une discipline olympique.
Depuis la cérémonie d'ouverture le 26 juillet, pas une médaille n'est remportée sans qu'elle fasse l'objet d'un tweet du Premier ministre démissionnaire. Souvent agrémenté d'un "mème", ces images, gifs ou vidéos repris en masse sur les réseaux sociaux.
Que ce soit à la faveur du podium 100% français en BMX le 2 août: "Vous n'êtes pas content? Triplé", partage alors le Premier ministre sur son compte X (ex Twitter), avec cet extrait vidéo du champion du monde de football Kylian Mbappé.
Ou le même jour, lors de la quatrième médaille d'or remportée par Léon Marchand: "Léon Marchand est vraiment le dauphin qu'il pense être. Fierté", félicite-t-il.
Amélie Oudéa-Castéra, ministre des Sports démissionnaire, adopte un registre plus lyrique, invitée de Télématin le 1er août, assurant que Léon Marchand "nous a tous transpercé le cœur".
Ou encore ce samedi, lorsqu'elle tweete, "Que je t’aiiiimeeee. Des Jeux qui rassemblent, des Jeux qui marient ! ". En référence à la double demande en mariage par leur conjoint des Françaises Sarah Steyaert et Charline Picon, dans la foulée de leur médaille de bronze en voile.
Discrétion à gauche et au RN
Du côté de l'alliance du Nouveau Front populaire, les responsables des partis de gauche s'attellent à faire campagne pour la nomination de Lucie Castets comme Première ministre.
Le calme est olympien sur les réseaux sociaux de Manuel Bompard, coordinateur national de la France insoumise (LFI), depuis la cérémonie d'ouverture le 26 juillet.
"Merci à l’ensemble des personnes mobilisées depuis des années pour rendre cette soirée possible. Quelle fierté quand la France parle au monde", saluait-il alors. Silence radio concernant les JO depuis.
Mais engagement politique et engouement pour les JO, que la France accueille pour la première fois depuis 1924, ne sont pas incompatibles. Du côté d'Olivier Faure, premier secrétaire du Parti socialiste (PS), la fièvre olympique guette. Le député de Seine-et-Marne ne rate aucune médaille française.
Même assiduité pour Fabien Roussel, secrétaire national du Parti communiste (PCF), depuis son camping en Corse.
Du côté de Marine Tondelier, la fièvre olympique est là. La secrétaire nationale des Écologistes félicite sur son compte Twitter les sportifs français. Sans oublier son engagement écologique.
"En ce jour du dépassement, je le dis et le redis : pas de trêve climatique !", alertait-elle le 1er août. Date symbolique à laquelle l'humanité dépasse la capacité de production de ressources annuelle de la planète.
"Je suis capable de faire plusieurs choses en même temps, et je pense que tous les gens du NFP aussi. On peut se réjouir, trembler avec les Français, s'émouvoir de leurs victoires. Mais on est au travail avec Lucie Castets, avec l'ensemble des partenaires du NFP pour la rentrée", a-t-elle expliqué le 30 juillet, au micro de Télématin.
Du côté de l'extrême droite, la discrétion est de mise. Marine le Pen, s'astreint à féliciter les médaillés d'or tricolores.
"Une légende du judo français, un immense champion a marqué une fois encore l’histoire des Jeux olympiques. Bravo et merci à Teddy Riner pour ces moments d’émotion et ce magnifique parcours", a-t-elle félicité samedi 2 août.
Le président du Rassemblement national (RN), Jordan Bardella, se contente lui de relayer les publications du compte officiel de l'équipe de France olympique.
Alors, le sport serait-il en train de devenir politique?
"Je pense que c'est une très mauvaise idée de politiser le sport", déclarait Emmanuel Macron en 2022 avant le lancement de la coupe du monde de football au Qatar
Une déclaration à rebours de l'attitude du président de la République depuis le début de la compétition. Alors que ce samedi 3 août, Teddy Riner combat en équipe pour la médaille d'or, peu de doute sur le fait que le chef de l'État devrait les féliciter publiquement, médaille d'or ou pas, après l'épreuve.