JO 2024 (gym): "Ma place est avec l'Algérie", Kaylia Nemour savoure son sacre aux barres asymétriques et ne regrette rien
Kaylia Nemour n'a que 17 ans mais elle a déjà tant vécu. La jeune gymnaste algérienne s'est offert le titre olympique aux barres asymétriques à Bercy, ce dimanche 4 août, au terme d'une performance de haut vol.
Sur son agrès favori, l'adolescente a fait honneur à son statut en obtenant des juges une note de 15.700. Un bien meilleur score que sa rivale Qiu Qiyuan. Cette dernière lui avait ravi le titre de championne du monde à Anvers d'un rien en novembre dernier. Aujourd'hui, le destin lui sourit et l'or change de main.
"C'est fou. Je suis choquée. J'y crois toujours pas encore. Pour moi, il y a encore autre chose après les Jeux olympiques, après la médaille d'or", savoure Kaylia Nemour au micro de RMC, dans un mélange de joie et d'incrédulité. "Je suis très, très contente d'avoir gagné cette médaille d'or aujourd'hui. C'est vraiment le résultat et la récompense de toutes les années de travail que j'ai faites, surtout ces trois dernières années. Je suis passée par des périodes compliquées et c'est woaw, c'est incroyable."
Le soutien des Français et des Algériens
Avec ce titre olympique, Kaylia Nemour écrit non seulement l'histoire de son pays mais aussi celui de son continent. Jamais jusqu'aux Jeux de Paris une athlète africaine n'avait décroché le plus beau des métaux en gymnastique.
"C'est vraiment incroyable, je suis trop, trop contente. Le fait que ça s'est déroulé à Paris, il y a eu tout le soutien des Français et des Algériens et je pense que ça n'aurait pas été mieux à l'étranger", estime la jeune gymnaste.
Ce soutien local n'a rien de surprenant car Kaylia Nemour dispose aussi de la nationalité française. Elle est née en Indre-et-Loire et s'entraîne en France. Et sans un incroyable imbroglio, Kaylia Nemour n'aurait jamais porté les couleurs du pays d'origine de son père.
Colère et tristesse
Le casus belli remonte à 2021. Celle qui a intégré l'équipe de France à l'âge de 12 ans connaît une forte poussée de croissance, dont découle un problème osseux relativement rare: une ostéochondrite. Kaylia Nemour doit être opérée des deux genoux.
Un an plus tard, après avoir obtenu le feu vert de son chirurgien, elle aspire à reprendre la compétition. Mais son retour au plus haut niveau est freiné par un avis médical rendu par la Fédération française de gymnastique, qui émet "des restrictions temporaires de pratique".
C'est le début d'une bataille juridique de plusieurs mois entre le club de Kaylia Nemour - Avoine-Beaumont - et la Fédération. L'adolescente en est la victime collatérale et finit par être exclue du collectif France. "Clairement, j'étais en colère, triste, je ne comprenais pas, je trouvais que ce n'était pas juste", se souvient Nemour auprès de l'Agence France-Presse (AFP).
Finalement, après mûre réflexion, ses parents et elle décident de changer d'allégeance. Depuis 2022, elle représente l'Algérie, un pays que l'adolescente connaissait assez peu avant de choisir de le représenter, mais qu'elle découvre avec grand plaisir.
"Elle a trouvé un équilibre"
Peut-être est-ce là la meilleure décision de sa jeune carrière, quand l'on voit les résultats de l'équipe de France de gymnastique. Kaylia Nemour, en tout cas, n'aspire à aucun retour en arrière. "Je ne prendrai pas la décision de retourner pour la France. Ma place est avec l'Algérie. Je suis très, très fière et contente de représenter ce pays", assure-t-elle à notre micro.
Avant le début des JO, Marc Chirilcenco, son entraîneur, avait souligné "que Kaylia est Française mais qu'elle a choisi de représenter l'Algérie pour ses convictions sportives". Et d'ajouter: "Aujourd'hui, elle a trouvé un équilibre".
C'est donc sous les couleurs de l'Algérie qu'elle fera carrière. Et peut-être, qui sait, qu'elle continuera à marquer l'histoire de son pays. À 17 ans, elle n'est pas que championne olympique. La gymnaste a déjà donné son nom à une figure sur les barres: le "Nemour". Un élément qui a intégré le code de pointage de la Fédération internationale de gymnastique. Rien que ça.