Les JO 2024 comme France 98? "Une aspiration des Français à se réjouir ensemble"
Un air de France 1998 flotte sur la France 2024. Depuis le début des JO, le pays se rassemble et fête ses champions, de Teddy Riner à Léon Marchand, en passant par le triplé tricolore en BMX ou encore le pongiste Felix Lebrun en bronze à 17 ans… Comme à l’arrêt, loin de tous les débats politiques et polémiques quotidiennes, la France savoure. "On peut être surpris mais depuis la Révolution française, notre peuple a su se rassembler à certains moments dans une forme d’unité, de liesse spontanée, collective, explique l’historien Jean Garrigues ce lundi sur RMC. Quelque chose qui n’était pas prévu et qui éclatait parce que ça témoignait d’un besoin d’être ensemble, de se réjouir ensemble, de gagner ensemble. C’est quelque chose qui éclate à nouveau, me semble-t-il. Ça m’a rappelé la Coupe du monde 98, où il y avait eu un élan collectif. C’était lié aussi à l’époque au black-blanc-beur, l’idée que notre société n’était pas fracturée, qu’elle pouvait s’unir dans la diversité. Cela s’était manifesté par une popularité exceptionnelle de ceux qui étaient au pouvoir, en cohabitation, Jacques Chirac et Lionel Jospin."
L’exécutif actuel, avec Emmanuel Macron à l’Elysée et un gouvernement démissionnaire, peut-il bénéficier d’un effet JO? "Les situations sont très différentes, selon l’auteur de Jours heureux, quand les Français rêvaient ensemble (Payot). On sort d’une crise politique majeure pour laquelle le président a été désigné par beaucoup comme le coupable, même si les responsabilités sont nombreuses. Mais on est dans une situation beaucoup plus difficile qu’en 1998. La fracturation de la société française est beaucoup plus forte qu’à cette époque. Donc, est-ce qu’Emmanuel Macron va en tirer des bénéfices? Peut-être à court terme et ce serait logique, cohérent. Mais je ne suis pas sûr qu’à plus ou moins long terme, ça soit positif pour lui. On voit bien, en restant sur le plan politique, que la balle n’est plus tellement dans son camp. Elle est du côté des partis, des groupes parlementaires. On a l’impression que ce que dit le président, c’est beaucoup moins important que ça ne pouvait l’être à l’époque de Jacques Chirac et Lionel Jospin."
"On est complètement enfumés par ces polémiques sans fin de notre classe politique"
Après cet été rassembleur, l’espoir est désormais que la France garde le même esprit. Mais après la victoire des Bleus d’Aimé Jacquet en 1998, la France avait déchanté, jusqu’à la qualification de Jean-Marie Le Pen au second tour de l’élection présidentielle quatre ans plus tard. "On peut considérer que c’est une parenthèse, reconnaît Jean Garrigues. Le silence de La France insoumise laisse présager de nouvelles attaques, de nouvelles polémiques. A la rentrée, il y aura le vote du budget. Ça va provoquer énormément de tensions dans la vie politique. Mais ce qu’a montré cette période des JO, c’est cette aspiration des Français à se réjouir ensemble, à être ensemble, l’unité. La diversité de nos athlètes, c’est magnifique. Et le patriotisme dont ils sont imprégnés. Ce sont des choses qu’on avait totalement oubliées, alors qu’elles étaient présentes. On est complètement enfumés par ces polémiques sans fin de notre classe politique. Et on ne voit pas, au fond, ce qui est le plus important, au cœur de notre citoyenneté, de notre contrat social. C’est-à-dire cet amour que la majorité des Français ressentent pour leur pays."