JO 2024 (escrime): "une ambiance de stade de foot", comment le Grand Palais s'est transformé en chaudron
Deux immenses tribunes se font face. Et soudain, du bruit. Le Grand Palais a inauguré sa première journée de compétition pour les Jeux olympiques ce samedi avec l’escrime. Et l’enceinte, en plus d’être majestueuse, a délivré une ambiance incandescente tout au long de la journée. Elle est inévitablement montée crescendo à l’entrée en lice des épéistes françaises avec Coraline Vitalis. Elle fut la première à se faire porter par la vague de soutien incandescente du public français pour se défaire de la Polonaise Renata Knapik-Miazga. Quelques instants plus tard, Marie-Florence Candassamy et Auriane Mallo-Breton, en jeu au même moment sur deux pistes parallèles, ont surfé sur les bruyants "Allez les Bleues" ou des "popopopopopopo lolo, olé", bien connus des amateurs de Roland-Garros. Les trois ont ensuite livré leur duel respectif au même moment en 8es de finale. Ce qui a parfois donné lieu à de grandes acclamations sur une touche gagnée par l’une, au moment où l’une de ses compatriotes s’inclinait. "On a l'habitude d'être plusieurs à tirer en même temps, ce n'est pas un souci", sourit Coraline Vitalis. "Quand t'entends le public, c'est qu'elles (les Françaises, NDLR) ont touché et on se dit: 'à notre tour'."
"Je n’ai jamais vécu ça de ma vie", confie l'expérimenté Boladé Apithy
"L'ambiance est incroyable", ajoute-t-elle. "Ce matin, j'ai pris un petit coup de pression sur le premier match! Je me suis dit, je ne veux pas les décevoir. Le public pousse, c'est incroyable et je suis contente de vivre ça." Les six escrimeurs français en lice ce samedi se sont servis de ce soutien pour se remettre dans le match ou retourner des situations mal embarquées comme Auriane Mallo-Breton qui a infligé un 10-0 à l’Ukrainienne Vlada Kharkova (15-10) pour se hisser en demi-finales. Elle sera la seule encore en lice pour la session finale ce soir (duel face à la Hongroise Eszter Muhari à 19h25) devant un public en fusion.
Tout au long de la journée, les 8.000 spectateurs ont fait un énorme boucan en tapant des pieds pour faire vibrer le structure métallique des tribunes. Le fameux "Seven Nations Army" a retenti en chœur sur les exploits français. Ce vacarme n’empêche pas les entraîneurs de passer leurs consignes, comme l’a confié Julien Médard, manager des sabreurs français après la défaite de Maxime Pianfetti (25 ans) contre l’Américain Mitchell Saron (15-12): "on est assez loin mais j’arrivais à me faire entendre".
Eliminé en huitièmes de finale après un combat acharné avec l’Allemand Matyas Szabo (15-13) Sébastien Patrice a harangué la foule à chaque touche gagnée. Et elle lui a bien rendu. "Ce sont des chefs", lance le Marseillais.
"En escrime, je n’ai jamais connu ça"
"Je suis fier du public français, je suis fier d’être français. C’est magique ce qu’ils nous ont fait vivre, ça m’a galvanisé malheureusement seulement jusqu’en tableau de 16 (8es de finale mais pas plus loin). Un gros big up à eux."
L’expérimenté Boladé Apithy (38 ans) s’est lui senti "comme Kylian Mbappé", lors de son entrée en lice. Lui aussi éliminé en 8es de finale, il se projette sur la compétition par équipes et va se précipiter vers autres escrimeurs français pour les prévenir de ce soutien à venir. "C’est une dinguerie! Je veux dire à la Fédé d’organiser une compet tous les ans ici", sourit-il. "Le premier match était hyper dur et tout le monde te pousse, ça te donne de la force. Contre le Canadien (Fares Arfa, son bourreau en 8es), je pensais que je n’étais pas bien mais tu entends les encouragements et tu te dis: ‘mais en fait, je vais le faire’. Je n’ai pas réussi mais c’est énorme. Je vais rentrer au village après et je vais dire aux autres qui vont tirer: ‘appuyez vous sur le public, c’est une force incroyable’. Je n’ai jamais vécu ça de ma vie. Je suis dégoûté d’avoir perdu mais je suis content d’avoir vécu ça. C’est ma meilleure défaite."
"Les Français ont chauffé le public"
Les étoiles sont aussi dans les yeux des supporteurs. "On a été très surpris parce que ça ressemble à une ambiance de stade de foot, ça résonne", confie Raphaël, ancien pratiquant, présent depuis ce matin avec sa femme Julia. "C’est une super ambiance pour tous les pays, tous les athlètes. Il y a des gens de partout dans le monde et ça encourage, c’est incroyable. Les Français ont joué le jeu, ils ont chauffé le public, c’est pas quelque chose qu’on a forcément l’habitude de voir dans l’escrime et ça rend un truc incroyable pour les spectateurs."
Jacques, accompagné de ses petits-enfants, est aussi bluffé. "C’est superbe, je ne pensais pas que la disposition de cette façon nous permettrait d’avoir une vue aussi plongeante sur les escrimeurs. Il y a une très bonne ambiance et c’est bien organisé. Je ne pensais pas que ce serait aussi chaleureux." Sa petite fille, Ludivine, qui pratique l’escrime, affiche aussi des étoiles plein les yeux et se rêve en future athlète olympique. En attendant, elle est impressionnée "par les points accrochés au plafond" en référence à la sonorisation et aux lumières suspendues au toit de la grande verrière. Là où les échos de la foule rebondissent comme dans un chaudron.