JO 2024 (BMX freestyle): un juge de la finale d’Anthony Jeanjean révèle comment sont notés les riders
Sous les l'œil avisé de l’Obélisque, et dans la chaleur étouffante de la place de la Concorde, le public a soudainement retenu son souffle. Près de deux minutes à attendre fébrilement le verdict des juges. Puis le couperet tombe, comme un coup de froid venu climatiser un Parc urbain pourtant en surchauffe: malgré un deuxième run étincelant, il manque 1,06 point (sur 100) à Anthony Jeanjean pour s’emparer de la première place provisoire de la finale de BMX freestyle.
>> Toute l'actualité des JO de Paris 2024 EN DIRECT
Quelques minutes plus tard, c’est même pour 0,15 point que la médaille d’argent échappe au rider français, finalement troisième et paré de bronze. Une issue terriblement frustrante. Et un rappel brutal: dans cette discipline comme dans n’importe quel autre sport basé sur les notes (skateboard, breakdance, plongeon, natation artistique…), les juges ont tout simplement le pouvoir de faire basculer le destin d’un athlète. D’un côté comme de l’autre.
https://serviciel.bfmtv.com/iframe/eyJ0eXBlIjoid2lkZ2V0LWdyYWNlbm90ZSIsInNvdXMtdHlwZSI6InJlc3VsdGRldGFpbCIsInNwb3J0X2lkIjoiNjIxIiwicGhhc2VfaWQiOiIyNjc3MjU0In0%3D
Pour les finales de BMX freestyle de ce mercredi 31 juillet (femmes puis hommes), cinq juges étaient chargés de départager les riders. Dont le Français Rémi Adrix. "On a un panel de juges, avec un juge principal en plus. Ce dernier coordonne le travail des autres juges. Après, on fait une délibération sur le run du rider", résume le juge fédéral, originaire de Caen.
Interrogé à la sortie de la finale d’Anthony Jeanjean, Rémi Adrix, qui n’a par ailleurs pas été rémunéré pour cette mission, nous a ensuite détaillé tous les critères de notation. "Ce qu’il faut savoir, c’est qu’il n’y a pas de note. Ce n’est pas tel ou tel critère qui vaut tel ou tel nombre de points. C’est vraiment une appréciation générale. Ça reste artistique, il n’y a pas une base de données où tout est répertorié, avec un nombre précis de points pour tel ou tel trick. Ce qui est pris en compte, c’est la variété des tricks, l’utilisation de l'espace, la prise de risque, etc..."
"On note toujours en fonction du classement pour savoir où on décide de situer le rider"
En prenant en compte tous ces critères, chaque juge attribue donc un score sur 100 au rider. Pour avoir le score final, une moyenne est ensuite faite. Avec une notion importante: chaque note est établie en prenant en compte ce qu’ont fait les autres riders et donc les conséquences que cela aura au classement. "Les notes sont un outil pour mettre quelqu’un premier, deuxième ou troisième. On note toujours en fonction du classement pour savoir où on décide de situer le rider. C’est une appréciation générale qui est faite", insiste Rémi Adrix.
Prenons l’exemple de la finale d’Anthony Jeanjean. Pour prendre la première place, le Français devait faire mieux que les 94,82 de l’Argentin José Torres Gil. Au moment de noter Anthony Jeanjean, chaque juge se demande donc si son run mérite la première place. Si un juge pense que oui, il lui donnera donc la note de 95 ou plus. S’il pense que non, il lui donnera moins.
En une seule note, un juge peut donc briser les rêves de titre ou de médaille d’un rider. Un sacré poids sur les épaules. "On pourrait penser qu’il y a une part de subjectivité, mais non", balaye Rémi Adrix au sujet d’une éventuelle pression. "L’idée est d’être objectif. Le travail du juge est de juger. On est juge, on fait nos notes, point. Être Français et juger un Français? Ça ne change rien. On est objectifs et c’est tout."
Le juge fédéral conclut en excluant toute sorte de pression de la part des riders ou de leur staff. "Il n’y en a pas, pas dans de telles compétitions. On aime ce sport et on le joue, c’est tout." Avec toute la cruauté qui va avec.