"J'en ai chié": ces Français disputaient leur premier Tour de France, ils racontent leurs pires et meilleurs souvenirs
Leur meilleur souvenir sur le Tour
Axel Laurance (23 ans, Alpecin-Deceuninck): "Je suis déjà fier de moi. Je garderai forcément en tête d’avoir couru la deuxième étape dans l'échappée (entre Cesenatico et Bologne). La montée de San Luca était incroyable. C’était juste magique de pouvoir jouer la victoire d'étape. C'est un sentiment vraiment spécial. Après, je retiens les victoires collectives (trois pour Jasper Philipsen), ça a été trois belles semaines."
Thomas Gachignard (23 ans, TotalEnergies): "C’est quand je me suis retrouvé seul en tête sur la 16e étape (entre Gruissan et Nîmes). Ce n’était pas prévu au programme que je parte à l’avant. Mais j’ai saisi l’occasion et c’était juste incroyable. J’étais tout seul, je me faisais encourager par le public, ça me donnait des frissons d’entendre mon prénom. Ça m’a poussé à aller le plus loin possible. J’ai été désigné combatif de l’étape et je me suis retrouvé sur le podium avec de grands champions. J’ai pu discuter avec Pogacar, Evenepoel, Girmay. Ce sont des trucs à vivre, j’en suis très content."
Mattéo Vercher (23 ans, TotalEnergies): "Je pense bien sûr à la victoire d’Anthony (Turgis) lors de la 9e étape sur les chemins blancs à Troyes. Et à ma deuxième place sur la 18e étape (à Barcelonnette). On a fait un super Tour avec l’équipe, c’était génial, ce sera gravé à vie. C’est pour ça qu’on fait ce sport, on sait qu’il y a beaucoup de sacrifices pour peu de moments joyeux. Quand ça arrive, il faut savoir en profiter."
Hugo Page (22 ans, Intermarché-Wanty): "On a vécu trois semaines absolument extraordinaires avec trois victoires d’étapes et le maillot vert (pour Biniam Girmay). On avait pas mal de pression mais ça s’est bien passé. On va pouvoir bien fêter ça ce soir ! L’image la plus forte, c’est la première victoire de Biniam (à Turin lors de la 3e étape). Il y a aussi notre arrivée samedi main dans la main, c’était un beau moment, on relâchait toute la pression avec le sentiment d’avoir bien fait le travail."
Ce qui les a le plus surpris
Axel Laurance: "Tout m’a marqué. Tous les coureurs qui ont fait le Tour avant nous disent 'tu vas voir, c'est super dur, rien que pour prendre une échappée'. Tu ne les crois pas trop, tu te dis que ça ne peut pas être pire que sur certaines courses. Mais au final, rien que pour prendre l'échappée, il faut vraiment être très, très fort. Le niveau est incroyable, tous les coureurs sont au top et à 200%. Ça donne d'énormes batailles."
Thomas Gachignard: "La vitesse à laquelle ça roule. Je savais que ça roulerait très vite mais peut-être pas à ce point. Il y a aussi le gruppetto. Les gens pensent que c’est facile mais ça ne l’est pas du tout. Il faut gérer les montées à 300 watts et rouler à fond dans les descentes et les plaines. Il n’y a jamais de journée facile sur le Tour, c’est dur tous les jours. Quand ce n’est pas dur, c’est que c’est la journée de repos (sourire). C’est très tendu, il y a tellement d’enjeux. Il y a un stress permanent qui rend aussi la course dangereuse."
Mattéo Vercher: "Ça roule extrêmement vite, c’est le haut niveau. Il y a peu de jours de récupération, tous les coureurs sont préparés à 100%, il faut savoir répondre présent. C’est une course ultra difficile. J’ai aussi été marqué par l’euphorie du Tour. Ce n’est pas du tout pareil qu’à la télévision, il faut le vivre en vrai parce que c’est incroyable. Sans les spectateurs, ce serait tellement plus dur, notamment dans les cols. J’en ai bien profité."
Hugo Page: "Ce qui m’a le plus surpris, c’est l’approche des sprints. C’était très, très nerveux. Ce n’est comparable avec aucune autre course. C’est simple, ça commence déjà à frotter et à être nerveux à 50 kilomètres de l’arrivée ! Je n’avais jamais vécu ça dans une autre course."
Leur plus mauvais souvenir
Axel Laurance: "Après mon échappée, jusqu'à la fin de semaine, j'ai eu du mal à dormir. Je n'étais vraiment pas bien physiquement. J'en ai chié, je souffrais pas mal, surtout les étapes où ça mettait deux heures à sortir. Certaines étapes de montagne aussi... Sur les étapes 18 et 19, je n'étais pas bien du tout, j'étais vraiment fatigué. Quand c'est comme ça, c'est assez long et dur."
Thomas Gachignard: "Les deux premières semaines ont été un calvaire, j’ai été emmerdé par la maladie. J’ai eu du mal à exister sur ce Tour, ce qui m’a un peu déçu mais j’ai au moins pu le finir avec une belle dernière semaine. Après la première journée, je n’étais même pas sûr de pouvoir continuer. Il y avait la chaleur en plus de la maladie. Le week-end en Italie a été horrible, j’étais complètement KO. J’ai aussi eu une autre journée en deuxième semaine où je me suis demandé pourquoi j’étais là. J’étais nul, ça n'allait pas à cause de mon angine. Ça descendait sur les bronches et j’avais du mal à respirer. Quand on est malade, on ne fait pas de vélo normalement, mais là ce n’était pas possible de s'arrêter (sourire). J’ai pu compter sur le soutien de ma conjointe pour garder le moral. Mentalement, c’était dur mais j’en ai un peu dans la tête donc ça a aidé. Beaucoup sont rentrés chez eux parce qu’ils étaient malades, moi je voulais finir mon premier Tour. Avec en plus l’arrivée inédite à Nice, il n’y en aura sans doute pas d’autres comme ça."
Mattéo Vercher: "Il y a eu plus de journées galères que de journées faciles (rires). Mais quand c’est comme ça il faut prendre son mal en patience et juste penser à franchir la ligne dans les délais. Un Tour de trois semaines, c’est compliqué parce que le corps réagit différemment. Ça a été très dur les deux jours qui ont suivi ma deuxième place. J’ai complètement lâché moralement et physiquement. J’ai décompressé, je n’avais plus rien dans les pattes, c’était difficile. Mais il fallait finir parce que le Tour de France, ça se respecte. Je suis content d’avoir pu aller au bout."
Hugo Page: "Le seul vrai mauvais moment, ça a été la chute de Biniam (Girmay) dans le final de la 16e étape (à Nîmes). Mais ça fait malheureusement partie du vélo et ça n’a pas trop eu d’impact sur le maillot vert. J’ai évidemment eu des journées compliquées, mais je me disais que c’était pareil pour tout le monde. Dans ces moments-là, il faut s’accrocher. Je suis resté motivé. Dans l’équipe, dès que l’un des gars était en difficulté, l’autre savait prendre le relais. C’est ce qui nous a permis de lutter tous ensemble."