Coupe du monde féminine: comment Pedros a convaincu les binationales de jouer pour le Maroc

A la veille d'un huitième de finale très particulier entre la France et le Maroc, Reynald Pedros est revenu sur la façon dont il a convaincu les joueuses binationales d'évoluer sous la tunique marocaine. Disposant d'une grosse diaspora en France et en Espagne, l'actuel sélectionneur des Lionnes de l'Atlas a su convaincre, grâce à un projet grandissant pour le football féminin local.

Un projet colossal depuis 2020

"On a toujours été très honnêtes avec elles, quand on les a contactées, on leur a expliqué le projet. Ça fait maintenant trois ans... C'était difficile à entendre de dire: "On a un projet avec le Maroc, on veut aller au moins en demies de CAN pour aller à la Coupe du monde." Je conçois que le projet peut être écouté mais bon...", retrace Reynald Pedros, ancien entraîneur de l'OL féminin et en charge de la sélection marocaine depuis 2021.

Les Lionnes de l'Atlas ont énormément progressé depuis 2020 et l'investissement massif de la fédération marocaine dans le football féminin local, suivant la volonté du roi du Maroc. Un plan au long terme a été construit, visant à faire progresser le championnat marocain, en s'appuyant sur de solides performances de l'équipe nationale comme locomotive. Lors de la dernière CAN qui avait lieu au Maroc, les joueuses de Reynald Pedros se sont hissées jusqu'en finale, alors qu'elles se qualifiaient pour la première fois dans la compétition.

"Il y en a qui sont venues, d'autres qui ont attendu"

Un projet qui a séduit certaines binationales, qui représentent aujourd'hui 13 joueuses parmi les 23 sélectionnées pour ce tout premier Mondial de l'équipe marocaine féminine. Les joueuses profitent du tout nouveau centre d'entraînement de la fédération, le complexe Mohamed VI, inauguré en 2019 et qui fait une très belle place aux équipes féminines nationales. Les équipes trouvent ainsi à leur disposition tous les moyens possibles pour performer au meilleur niveau.

"Il y en a qui sont venues, d'autres qui ont attendu et m'ont dit: "Ecoutez coach, je préfère attendre peu, voir si je suis appelée en équipe de France..." On leur a dit que la porte était toujours ouverte, on a toujours eu des discussions avec elles. Après la CAN ça a commencé à changer un petit peu, certaines filles ont regardé et nous ont recontacté. En nous disant: "On a vu la CAN, c'est pas mal, c'est sérieux, vous allez au Mondial!""

"Si tu n'as pas de résultats c'est compliqué"

"Après c'était à nous de choisir: est-ce qu'on avait besoin niveau qualitatif des binationales ou pas. Celles avec qui on avait déjà eu un premier contact, qui nous ont recontacté, on a eu une discussion et puis ça s'est fait naturellement. Certaines ont redonné leur accord en disant qu'elles étaient intéressées, donc on a fait le suivi et elles sont venues avec nous. Mais c'est toujours une question de... si tu n'as pas de résultats c'est compliqué."

"Maintenant on a eu un projet concrétisé par des résultats et derrière c'est plus facile pour les joueuses de se positionner. C'est comme ça qu'on a récupéré pas mal de binationales et je pense qu'aujourd'hui elles ne sont pas mécontentes d'être avec nous et de participer à cette Coupe du monde."

Un travail de scouting et des talents locaux

Avant ce long travail de scouting initié par l'Américaine Kelly Lindsey à son arrivée à la tête de la section féminine marocaine en 2020, le Maroc ne jouait qu'avec très peu de binationales, qui avaient du mal à être convaincues par les conditions proposées. Depuis, de nombreuses langues se croisent dans le vestiaire, certaines joueuses, comme l'attaquante de Tottenham Rosella Ayane née à Reading en Angleterre, ne parlent d'ailleurs ni français ni arabe. Ce qui en fait une sélection polyglotte, obligeant le staff à croiser les langues pour faire passer ses messages.

Face à la Colombie, c'est Anissa Lahmari, ex-joueuse de l'En Avant de Guingamp née à Saint-Cloud, qui a marqué le but qualifiant le Maroc pour les huitièmes de finale. Un but marqué sur une passe décisive de Sakina Ouzraoui Diki, née à Barcelone et ayant fait toute sa carrière en Belgique. Elles jouent aux côtés de nombreuses joueuses locales de l'AS FAR, principal club féminin du pays, qui pour certaines sont en sélection depuis de nombreuses années.

Article original publié sur RMC Sport