Bordeaux: Lopez, King Street, GACP, M6... comment les Girondins ont dégringolé en l’espace de six ans
Un monument du football français à l’agonie. Bordeaux a annoncé ce mardi dans un communiqué qu’il renonçait à faire appel de sa rétrogradation administrative en National 1, prononcée le 9 juillet dernier par la DNCG. Après avoir espéré ces derniers jours le rachat du club par le groupe américain Fenway Sports Group (propriétaire notamment de Liverpool), les Girondins se dirigent vers un redressement judiciaire. Ils risquent même de se retrouver en National 2 ou en National 3 si leur prochain passage devant la DNCG n’est pas concluant. Un cauchemar pour tous les amoureux du club au scapulaire (fondé en 1920), qui a vu son destin basculer vers le précipice il y a six ans…
2018: Bordeaux sous pavillon américain
Après quasiment deux décennies à la tête du club, le groupe M6 décide en 2018 de vendre Bordeaux aux fonds d’investissement américain General American Capital Partners (GACP) et King Street. Nicolas De Tavernost, le PDG de M6 (détenu par le groupe Bertelsmann), explique ne plus avoir les moyens de financer les ambitions des Girondins et se dit convaincu par le sérieux des nouveaux propriétaires. "On ne peut jamais être totalement rassurés, mais on a essayé de prendre le maximum de garanties", déclare-t-il à l’époque. "Ce sont des professionnels et ils se sont engagés à gérer le club de manière ambitieuse." La transaction est estimée entre 70 et 100 millions d’euros. Une somme en partie empruntée à Fortress Investment Group, une autre société américaine.
En débarquant dans le Sud-Ouest de la France, GACP, dirigé par Joseph DaGrosa, affirme vouloir injecter des montants conséquents sur une courte période, avec le but assumé de réaliser des profits. Alain Juppé, le maire de Bordeaux, certifie que les garanties présentées sont solides. C’est en réalité le début de la descente aux enfers pour Bordeaux. Entre la masse salariale trop conséquente, l’embauche de nombreux cadres et le train de vie dispendieux des dirigeants américains, les Girondins se retrouvent rapidement dans le rouge. D’autant que les résultats sportifs ne suivent pas.
2019: King Street se sépare de GACP
Après un peu plus d’un an de gestion désastreuse, King Street se sépare de GACP et reprend seul la tête du club, en comblant un déficit de 35 millions d’euros. Mais le fonds d’investissement new-yorkais, venu en Gironde pour gagner de l’argent aux côtés de GACP, n’a pas vraiment envie de s’implanter dans le paysage sportif. Ses dirigeants ne veulent plus dépenser et imposent une cure d’austérité au Haillan. Mais avec des moyens restreints, les Girondins ne parviennent pas à s’améliorer sur le terrain et enchaînent les désillusions. Les mauvais résultats entraînent des profits en baisse et enclenchent un cercle vicieux qui mène au désengagement de King Street. Le fonds d’investissement américain remet finalement le club en vente au printemps 2021.
2021: Gérard Lopez arrive en sauveur mais...
Quelques mois plus tard, Gérard Lopez rachète l’équipe aux six titres de champions de France (le dernier en 2009) et parvient à éviter le dépôt de bilan. L’homme d’affaires hispano-luxembourgeois, ancien propriétaire du Losc, espère un retour rapide en Coupe d’Europe. Mais la situation se complique sérieusement dès l’année suivante, lorsque Bordeaux est rétrogradé en Ligue 2 après avoir terminé dernier du championnat.
Face aux difficultés économiques des Girondins, la DNCG prononce leur rétrogradation en National à l’été 2022. Gérard Lopez parvient à négocier avec King Street et Fortress pour qu’ils renoncent à une grande partie de la dette du club au scapulaire (près de 75%). Et le CNOSF puis le Comex de la FFF se prononcent finalement pour le maintien de Bordeaux en Ligue 2. Mais aucune restructuration profonde n’est entreprise à ce moment-là. Lopez table sur une remontée en Ligue 1 dans les deux ans, en misant sur la vente de joueurs et les droits TV. Un pari largement perdant. Après avoir injecté plus de 50 millions d’euros de sa fortune personnelle, l’entrepreneur de 52 ans a récemment décidé d’arrêter les frais, en laissant planer un épais brouillard sur l’avenir de Bordeaux. Seul un rachat cet été aurait pu éviter cette situation, mais Fenway Sports Group a finalement renoncé, probablement face à l'état des comptes girondins.
Au terme de six ans de mauvais choix humains, financiers et sportifs, les Girondins poursuivent leur chute. En attendant de savoir jusqu’où ils vont devoir creuser...