Badminton: qui est Alex Lanier, le nouveau crack du bad français qui se voit déjà en haut de l'affiche
De sparring-partner à grand champion, il n'y a qu'un pas, que l'on peut franchir en une poignée de semaines. Au début des Jeux olympiques, Alex Lanier la jouait collectif, renvoyant les volants des badistes français en compétition dans le cadre de leur préparation.
Lui, 29e mondial, ne pouvait pas participer au tournoi puisqu'une seule place était réservée à la France. En simple, elle était dévolue à Toma Junior Popov, 19e mondial et meilleur tricolore du circuit international. En double, il n'a simplement pas été retenu.
Cette période olympique, le jeune normand de 19 ans en a tiré les bénéfices pour parfaire sa condition physique et mentale avant l'Open du Japon, une compétition classée Super 750.
L'histoire du badminton français écrite en lettres d'or
Pour sa première participation à un tournoi du deuxième grade sur le circuit, le jeune homme n'avait aucune envie de faire de la figuration à Yokohama. Contre toute attente, il a fait bien mieux que cela.
Ce dimanche 25 août, le pensionnaire de l'INSEP, licencié à l'ASPTT Strasbourg, a remporté l'Open du Japon face au Taïwanais Chou Tien-Chen (21-17, 22-20), 10e mondial. Jamais jusqu'ici un Français n'avait gagné un tournoi de cette ampleur. Jamais non plus un joueur ne s'était adjugé un Super Series à un si jeune âge.
Jonglant entre les styles de jeu, d'un coup "très attaquant et d’un coup très défensif", Alex Lanier a écrit l'histoire du badminton tricolore en lettres d'or. Son parcours sur le court était pourtant semé de joueurs du gratin mondial.
Sur son tableau de chasse, le Caennais de naissance a notamment accroché Lee Zii Jia, numéro 6 mondial. Le Malaisien, médaillé de bronze aux JO, n'est autre que le tombeur de Toma Junior Popov en huitième de finale du tournoi individuel. Le droitier s'est également offert le scalp de l'Indonésien Chico Aura Dwi Wardoyo (numéro 34), du Japonais Kenta Nishimoto (numéro 11) et surtout du numéro 1 mondial, le Chinois Shi Yu Qi, au terme d'un match acharné (17-21, 21-16, 21-18) de près d'une heure trente.
"J'ai joué mon meilleur bad"
Une fois la victoire finale acquise, Alex Lanier n'a pas manqué d'enlacer son entraîneur, Kestutis Navickas. Puis il s'en est allé distribuer des volants dans les tribunes de Yokohama.
"Je n’ai pas trop les mots", a-t-il d'abord réagi en conférence de presse. "Je suis un peu trop fatigué pour réaliser ce qu'il se passe. Après le titre, c'est toute la pression qui redescend et toutes les émotions qui arrivent, car jusque-là je les contrôlais plus ou moins."
Alex Lanier a ensuite accordé un peu de place à l'euphorie: "C’est vraiment incroyable ce qu’il s’est passé sur le terrain et toute la semaine, j’ai eu un niveau de jeu incroyable, j’ai joué mon meilleur bad. J’arrivais à rester calme, tout se passait bien et était dans le bon ordre".
Entraînement, cours, entraînement
Ce sacre propulse le Français dans une nouvelle dimension. L'obtention des 11.000 points de l'Open du Japon va lui permettre d'effectuer un bond au classement mondial, d'entrer dans le top 20 et possiblement de prendre la place de numéro 1 tricolore.
Sa vie s'apprête à changer. Jusqu'ici, le jeune homme partageait son temps entre études de sciences formelles à la Sorbonne - qui propose un partenariat avec l'INSEP - et badminton.
"Généralement, je me lève vers 8 heures, j'ai un entraînement de 9 heures à 12 heures ou 13 heures. Ensuite, j'ai deux heures de maths, suivies de mon deuxième entraînement. Et j’ai la soirée pour moi!", relatait Alex Lanier sur le site de l'université en janvier dernier. "J’ai la chance de bénéficier du dispositif sportif de haut niveau qui me permet d’aménager mon emploi du temps."
Une pointure dans les tournois junior
Dans cet entretien, il retraçait également son parcours. Le badminton, il y a goûté très jeune "grâce à (ses) parents", à Dives-sur-Mer (Calvados). "Je pense que j'ai choisi ce sport parce qu'il est ludique, et quand on est petit, on a aussi besoin de se dépenser et de courir partout", déroule-t-il. "C'était l'un des premiers sports que j'ai essayés dans mon enfance. Je m'amusais, je prenais du plaisir, et c'est pourquoi je suis revenu au badminton."
En 2020, il quitte le domicile familial. "Je suis parti à l'âge de 15 ans environ", racontait-t-il sur BFM Normandie en décembre 2023. "Cela n'a pas été si dur que ça. Quand j'étais plus jeune et que je suis arrivé à l'INSEP, tous les week-ends ou toutes les deux semaines, je rentrais chez moi."
Alex Lanier ne tarde pas à enchaîner les titres chez les jeunes. Il devient l'un des poids lourd de chacune des catégories. "J'étais champion d'Europe U15, U17, U19. J'ai fait troisième aux championnats du monde junior", égrène le Normand.
Des objectifs en pagaille
Sur le World Tour, le jeune homme n'avait glané qu'un seul titre avant Yokohama. Il s'agit de l'Open du Canada, arraché en 2022, à seulement 17 ans et huit mois. Personne n'avait remporté un tournoi senior aussi jeune. C'était à l'époque un Super 100.
En juillet, dernier, Alex Lanier a atteint la finale du même tournoi, aujourd'hui classé Super 500. Cette performance lui a donné accès au top 30 mondial, signe d'une progression linéaire.
Pour l'avenir, le badiste fourmille d'ambitions. "Je pense que mon objectif à long terme est d'être numéro 1 mondial et de remporter la médaille d'or olympique ainsi que le titre mondial", a-t-il crânement reconnu après sa victoire contre Chou Tien-Chen. "Mais je préfère d'abord et surtout me concentrer sur ce que je dois faire sur le court."
S'il a manqué les JO de Paris, c'est bien dans la capitale française que le Normand espère triompher l'an prochain, à l'occasion des championnats du monde. "Je veux réaliser quelque chose de vraiment énorme dans ce tournoi. Je veux être l'un des meilleurs joueurs. Donc, bien sûr, je dois m'y préparer", assure Alex Lanier.
Son discours laisse penser qu'il est déjà projeté sur les prochaines échéances. La première arrive vite: dès la semaine prochaine, le Normand étrennera son nouveau statut à l'occasion d'un Super 500, en l'occurrence l'Open de Corée.